Vue de l’exposition « Tout dans le cabinet mental », 2022.
De gauche à droite :Victor Yudaev, Radios, 2022, ensemble sculptural. Flora Bouteille, assistée d’Alexia Caamano et Théo Pézeril, Mobilier pour le bureau d’études TOGETHER UNTIL_ __(what)*?, 2022.Vir Andres Hera, Misurgia Sisitlallan, 2020, film.© Marc Domage / le Crédac
Bureau d’études et projet artistique fondé par Flora Bouteille (artiste/performeuse) et Cassandre Langlois (chercheuse/curatrice indépendante) en 2020,TOGETHER UNTIL L _ __ (what)* ? se déployait pour sa première édition au Crédac à la suite d’une résidence amicale proposée par Claire Le Restif pendant le confinement. Sous la forme d’une exposition évolutive « Tout dans le cabinet mental » le bureau d’études prolonge et interroge les enjeux liés à la pratique de la performance et à l’expérimentation de dispositifs. Flora Bouteille et Cassandre Langlois reviennent sur la genèse de ce projet totalement inédit à partir de leurs recherches formelles et théoriques engageant une cohabitation entre des œuvres fixes et des une programmation live. Une expérience radicale de déhiérarchisation des statuts et pratiques du commissariat d’exposition.
TOGETHER UNTIL _ __ (what)*? : vocation du bureau d’études et fonctionnement
TOGETHER UNTIL _ __ (what)*? (duo formé par Flora Bouteille, artiste et Cassandre Langlois, curatrice indépendante) : TOGETHER UNTIL _ __ (what)*? est un bureau d’études en performances que nous avons développé au début de la pandémie, d’où son nom. Pour le moment, nous fonctionnons en duo mais nous aimerions l’ouvrir à d’autres collaborations par la suite. Il s’agit d’un outil pour penser les pratiques de la performance d’aujourd’hui, leurs enjeux, leurs futurs, avec une visée critique et théorique. Avec ce dispositif de recherche, nous tentons principalement de créer un troisième lieu, qui ne soit pas toujours celui de l’exposition ou de la performance, mais plutôt qui puisse être un vrai temps de « recherche action ». Nous souhaitons, par ailleurs, créer des communautés de pensées mais aussi élaborer une archive via des interviews, des ateliers, des rencontres et des discussions. Le terme de « bureau d’études » est important, c’est un peu comme un costume. Il doit, au fur et à mesure, nous permettre de naviguer dans les hiérarchies et les institutions de l’art autrement que sous les statuts d’artiste ou de commissaire d’exposition
Tout dans le cabinet mental : genèse et enjeux
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L’exposition collective « Tout dans le cabinet mental » accueille les oeuvres, les interventions et performances de 18 invité·es artistes, commissaires et/ou chercheur·euses. Elle découle d’une résidence informelle réalisée en mars 2021 au Crédac. On y retrouve le travail de personnes que nous avions alors invitées comme la graphiste et photographe Marine Leleu, l’artiste sonore Victor Villafagne mais également Pierre Bal-Blanc, Virginie Bobin, Sasha Pevak et Nora Sternfeld que nous avions sollicité·es pour des entretiens. De nouvelles invitations ont également été formulées auprès de travailleur·euses de l’art avec qui nous avions l’envie de co-construire cette étape importante dans le développement de notre bureau d’études en performances, un développement rendu possible grâce à l’invitation de Claire le Restif et au soutien de son équipe.
« Tout dans le cabinet mental » nous a, en effet, permis de concrétiser certaines des recherches théoriques et formelles que nous avions précédemment menées au Crédac. L’idée de plateau – que nous définissions alors comme un espace scénique, de travail et studio de production – se manifeste ici sous la forme d’une grille au sol réalisée à l’aide de scotch blanc, un élément récurrent dans la pratique de Flora (Bouteille). Elle renvoie aux grilles de l’espace-temps qui se courbent à certains endroits lorsque des événements ont lieu. Dans la grande salle du Crédac, sur cette grille au sol, s’articulent performances et ce qu’il en reste dans l’espace, oeuvres fixes, mobilier et documents théoriques. D’autres pièces, comme les photographies de Marianne Maric, font aussi écho à des événements qui se sont tenus ailleurs dans Paris. On peut évoquer à ce titre la pré-première du film I GOT UP AT 8.59 AM. OCTOBER 19 2021 de Pierre Bal-Blanc au cinéma Luminor. L’exposition s’autorise également à accueillir, au fur et à mesure, de nouvelles pièces, de nouveaux éléments, traces.
Avec ce projet, nous nous interrogeons sur ce que produit l’art et sur ce que peut fabriquer un lieu de l’art aujourd’hui. Ce cabinet mental dont nous parlons est donc un lieu de projections. Nous avons proposé à l’artiste Aapo Nikkanen d’imaginer une installation qui forme un sas semi-transparent à l’entrée. Nous sommes également intervenues sur les fenêtres pour mieux nous concentrer sur ce qui se déroule sur le plateau. Dans la salle, les oeuvres font ainsi écho à cette dimension mentale et, souvent, à une certaine stratification des spatialités et des temporalités. L’exposition se construit aussi autour de deux zones rectangulaires en tapis de danse blanc. Le public est invité à y regarder les films de Vir Andres Hera et de Flora (Bouteille) mais aussi à lire différentes documentations et à s’allonger. Cette exposition est envisagée comme une étape de travail vouée à réunir des idées suscitées par les questions que nous nous posons ici. C’est pour cette raison que nous avons formulé toutes les deux un questionnaire que les visiteur·euses sont invité·es à remplir et à déposer sur l’un des murs de la salle.
La programmation associée au coeur de Tout dans le cabinet mental : quels temps forts
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Les deux pièces sculpturales de Victor Yudaev et les oreilles de Cally Spooner participent d’une démultiplication des corporéités dans l’espace. À travers la dimension spectrale de notre dispositif, nous avons cherché à créer un sentiment d’attente, l’impression d’un événement à venir. En effet, notre projet se déploie autour d’une importante partie live – qui n’est pas parallèle à l’exposition mais qui est l’exposition – comprenant des formats très divers : activation de performance, visite performée, conférence performée, performance participative, danse à distance, atelier, projection de film, répétition de performance, cours avec des étudiant·es de l’ENSAD et permanences. Cette diversité nous permet, à chaque fois, d’investir l’espace d’exposition d’une autre manière, de jouer tantôt sur des dispositifs très intimistes tantôt sur des dispositifs avec des jauges plus denses. Nous avons eu la chance de présenter une nouvelle performance de Dora Garcia, Révolution, tiens ta promesse, qui a été activée à trois reprises par le comédien Geoffrey Carey, une pièce participative d’Aapo Nikkanen, Intimacy, qui propose au public de rejouer l’une des expériences du psychologue américain Arthur Aron ainsi que les deux premières parties de la trilogie Disputational Methods de Flora Bouteille. Nous avons également accueilli, avec le Crédac, des travaux récents comme les Amitiés spirituelles de Vir Andres Hera et de Clovis Maillet ou proposés de manière différentes comme les Remote Dances de Myriam Lefkowitz et de Julie Laporte (c’était la première fois que le public vivait cette expérience, développée en plein confinement, installé dans un centre d’art et non chez lui). Alevtyna Kakhidze et Sasha Pevak, en collaboration avec Anti Gonna et Jan Bačynsjkyj, anticipent La Méthode de construction de la vérité politique (une performance de Alevtyna Kakhidze qui sera présentée au Centre Pompidou à l’automne 2022). Virginie Bobin, quant à elle, à développé un atelier, Les invisibles (titre de travail), sur les enjeux politiques et affectifs des langues et de la traduction dans les parcours d’exil. Enfin, nous pourrions évoquer L’assemblée des accessoires de Nora Sternfeld, une visite performée de notre exposition qui ouvrait sur la question suivante et essentielle pour nous : comment ne pas faire une exposition figée ? Ces différents temps ont été représentés par Sabine Tessonneyre sur un plan de salle qui est aussi une oeuvre que chacun·e peut emporter chez soi.
L’expérience de la résidence informelle au Crédac et son influence sur la suite
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Nous avons réalisé cette résidence informelle en mars 2021, en plein confinement. Nous avons pu investir différents espaces du Crédac, mais également une ancienne boutique de fleuriste située au coeur de la ville d’Ivry. C’est la première fois que notre bureau a été accueilli par une institution. Cela nous a permis de mieux comprendre comment nos rôles se partageraient au sein du bureau d’études et de concrétiser certaines choses via des entretiens, la production d’un film et des performances. Nous avons également produit, en collaboration avec Marine Leleu et Victor Villafagne, les premières images représentant notre travail, l’orientation esthétique et formelle du bureau d’études. Nous avons rencontré l’équipe du Crédac et démarrer une relation de travail avec eux.
Le concept de pre-enactment : votre définition et en quoi est-il essentiel ?
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Nous avons commencé à travailler sur ce concept, en septembre 2021, dans le cadre d’un projet que nous avons développé au sein de l’espace Niemeyer à Paris, suite à une invitation des commissaires Noam Alon et Nadiejda Hachami pour leur exposition « I scream, Ice cream » (2 au 24 septembre 2021). Le terme de pre-enactment désigne l’invention de scénarios hypothétiques, la spéculation sur des futurs possibles et l’expérimentation de temps et espaces fictifs pour mieux comprendre le présent. C’est plus spécifiquement la définition du philosophe autrichien Oliver Marchart, que nous avons pu interviewer, qui nous a intéressées. Il envisage le pre-enactment comme « l’anticipation artistique d’un événement politique ». L’art, comme tout autre domaine social, serait, pour lui, un lieu de formation, d’exercice, d’anticipation. C’est cette idée que nous avons eu envie d’exploiter avec « Tout dans le cabinet mental » en l’associant, notamment via la présence de la grille au sol et de zones en tapis de danse, à la notion de plateau de jeu.
Les prochains projets ou envies
Pour 2023, nous aimerions développé nos activités autour d’un projet tourné vers les modalités performatives du film/de la vidéo.
Question plus personnelle (à chacune) : à quand remonte votre 1ère rencontre avec l’art et décision d’en faire votre métier ?
Flora : Très tôt, au musée. J’ai décidé de devenir artiste vers 22 ans, en réalisant que l’art était un espace de liberté et d’expérimentations potentiellement sans limite, rare et unique dans nos sociétés.
Cassandre : À l’école grâce à une professeure qui a développé tout un programme autour de la figure de Jean Dubuffet, puis plusieurs chocs esthétiques à la fin de l’adolescence, plutôt du côté des arts vivants. C’est à partir de ce moment-là que j’ai commencé à m’intéresser peu à peu aux relations entre arts de la scène et pratiques curatoriales.
Egalement lors de votre visite :
Le goût des mots
Une exposition personnelle de Juliette Green
En partenariat avec La Bourse Révélations Emerige
2024
Une exposition personnelle d’Ethan Assouline
Cur. Sébastien Martins
Wolfgang Stoerchle (Crédakino)
Une sélection de vidéos de Wolfgang Stoerchle
Cur. Alice Dusapin
Infos pratiques :
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TOUT DANS LE CABINET MENTAL
Jusqu’au 10 juillet
Programmation à venir :
- Vendredi 17 juin, 14:00
Présentation du travail mené avec les étudiant·e·s de l’ENSAD dans le cadre du studio de performance para-normal activity de Flora Bouteille.Entrée libre.
- Dimanche 19 juin, 14:30-16:00
La Méthode de construction de la vérité politique, répétition d’une performance d’Alevtyna Kakhidze par Sasha Pevak en compagnie d’Anti Gonna et Jan Bačynsjkyj.
Entrée libre.