Félise de Conflans, résidence villa Belleville oeuvre Mimivirus photo Marie de la Fresnaye
Poursuivons notre panorama de la scène émergente, ces artistes au seuil de leur carrière particulièrement impactés par la crise. Félise de Conflans fait partie avec Aram Abbas de l’exposition collective : La mystérieuse affaire de styles curatée par Henri Guette à la Villa Belleville. L’occasion d’en savoir plus sur l’univers de cette artiste diplômée des Beaux Arts de Paris qui a complété son cursus à Los Angeles au Otis College of Art en 2016. Après avoir participé à plusieurs projets curatoriaux indépendants, Félise de Conflans a eu sa première exposition personnelle à la galerie Jérôme Pauchant en septembre 2019. Une réelle opportunité à ce moment du parcours toujours exigeant et critique pour un artiste. Visite avec elle de son atelier à la Villa Belleville alors que se termine sa résidence.
Comment définissez-vous votre pratique ?
Plutôt que le terme post-internet qui pourrait me correspondre, j’utiliserais celui de post-ordinateur (rires). D’aussi loin que je me souvienne, mon premier choc visuel remonte à l’arrivée des ordinateurs pendant ma jeunesse. J’observais beaucoup par exemple les visuels utilisés pour décorer nos blogs et me rendais compte que ces dégradés de couleurs donnaient une vraie sensation de volume sur le dessin. Je dirais donc que ce sont les ordinateurs qui m’ont éveillée aux questions de représentation, ce qui se ressent dans ma peinture.
Les Beaux Arts de Paris : le bilan
J’ai commencé chez Dominique Gauthier pour poursuivre chez P2F (Piffaretti, Fanchon, Figarella)en dernière année, après un échange à Los Angeles l’année précédente. Cette opportunité aux Etats Unis a été très positive. J’ai pu approcher d’autres façons d’enseigner l’art, moins formelles. J’avais parfois la sensation que l’on me demandait à l’avance de savoir vers quoi j’allais me projeter, alors que je fonctionne plus sur l’imprévu et sur la surprise quand je travaille. Je préfère être dans une approche plus intuitive pour réaliser et comprendre ensuite comment cela a du sens.
En terme de professionnalisation il est certain que l’on apprend finalement sur le tard et en faisant. En plus du portfolio qui est essentiel, on réalise que savoir accrocher son travail est tout aussi important que le reste.
L’expérience de l’échange à Otis College of Art
Nous avons la chance aux Beaux Arts de Paris d’avoir beaucoup de destinations possibles. Il y avait 3 écoles à Los Angeles. J’ai postulé pour 6 mois. Même si tous les étudiants ne font pas ce choix, j’avais très envie d’aller à Los Angeles et depuis très longtemps. J’étais décidée à y aller quoi qu’il arrive. Cette ville véhicule une certaine mythologie des images qui percute avec mon attrait pour les écrans et le cinéma étudié à Paris Diderot.
L’exposition à la galerie Jérôme Pauchant
A la sortie des Beaux Arts j’ai eu l’opportunité d’une résidence de création improvisée dans la galerie de Jérôme Pauchant suite à son invitation n’ayant pas d’atelier à ce moment là. Cela a donné lieu à l’exposition The Mirror.
La période de confinement a-t-elle été inspirante ou au contraire anxiogène ?
Cette période n’a pas été inspirante pour moi, cela a été particulièrement compliqué de produire et travailler dans un contexte si anxiogène. Ma tête était trop parasitée par d’autres choses pour être concentrée sur le travail. J’ai plus l’impression que les idées me viennent quand je suis dans un état de latence, presque méditatif.
Y at-il eu une prise de conscience de la situation des artistes face à cette crise ?
J’ai le sentiment d’une prise de conscience de manière générale et pas seulement de la situation des artistes. Cela a été un moment d’arrêt de toutes les activités même si le propre de la culture est de ne toujours pas être considérée comme essentielle. Si on a beaucoup parlé des intermittents du spectacle en revanche assez peu des artistes.
Votre participation à l’exposition collective de Henri Guette
J’y exposais un petit format de mon travail personnel en peinture ainsi qu’une installation du duo d’artiste/groupe de musique que nous formons avec Aram Abbas (sous le nom de BATMOON), et qui comprenait un panneau-peinture, des sculptures ainsi qu’une sérigraphie depuis laquelle les visiteurs pouvaient accéder directement à notre musique via un flashcode.
L’accrochage Villa Belleville
J’y mêle dans le cadre de visites d’ateliers des toiles à la fois abouties et encore en cours, ayant l’habitude de travailler sur plusieurs toiles en même temps.
Vos influences : Magritte en particulier
Magritte a été quelqu’un de très important en effet pour moi. Il est sans doute le peintre que j’ai le plus étudié et redécouvert d’ailleurs en lisant ses écrits que je ne connaissais pas dans le détail. Il a beaucoup écrit sur la peinture et je me suis rendu compte que l’étiquette surréaliste qui lui était collée n’était pas forcément l’unique façon d’entrer dans son univers. Il ne parle pas du rêve en tant que tel et reste plus dans une approche conceptuelle et philosophique de la peinture basée sur le visible qui se lit. J’ai alors tissé des liens avec l’univers graphique des ordinateurs ayant vu récemment une interview du co-créateur du jeu Adibou sur PC très populaire pour ma génération. (rires)
Roland Oskian déclarait avoir été le premier à créer des jeux sur ordinateurs pour des enfants qui ne savaient pas encore lire. On se trouvait ainsi avant même de savoir lire, devant des images interactives qu’il fallait savoir décoder.
En écoute : FOMO_Podcast
Site de Félise de Conflans :
Félise de Conflans (felisedeconflans.com)
L’exposition à la galerie Jérôme Pauchant (2019) :