MINIMAL art, maximum effects !  – Pinault Collection, Bourse de Commerce

Vue de l’exposition Minimal, Bourse de Commerce Pinault Collection photo Nicolas Brasseur/Pinault Collection

A partir d’un ensemble exceptionnel d’œuvres de la Pinault Collection, la directrice de la Dia Art Foundation, New York, Jessica Morgan retrace toute la diversité de ce mouvement et ses occurrences internationales, au-delà des Etats-Unis, berceau de toute une génération d’artistes avec le Japon (le Mono-ha ), le Moyen Orient, l’Amérique du Sud. Une géographie plurielle qui vise à redonner leur place à des voix plus invisibles. En parallèle Emma Lavigne est la commissaire de l’exposition dédiée à l’artiste pionnière brésilienne Lygia Pape, une première en France, tandis que les 24 vitrines du Passage de la Bourse de Commerce accueillent les iconiques Date Paintings (série Today) de l’artiste japonais On Kawara. 

Si l’on s’interroge sur les significations du mot minimal et leur variation selon les époques comme le souligne Jessica Morgan, ses déclinaisons sont nombreuses (décoration intérieure, architecture, alimentation) …devenant un véritable style de vie, une philosophie, tandis qu’en art ce courant désigne à partir des années 1960 des œuvres radicales qui repensent le statut de la sculpture, du socle et la place du regardeur désormais au cœur de l’expérience. Une proximité physique et dimension sensorielle qui s’accompagne avec l’essor de nouveaux mediums : la performance, la vidéo, le film…

Une « polyphonie silencieuse » comme l’écrit Emma Lavigne dans le remarquable catalogue et des points d’entrée multiples autour de grandes préoccupations formelles : la grille, la lumière, le matérialisme, la surface, la monochromie, l’équilibre qui séquencent naturellement le parcours.  L’architecture de Tadao Ando pour la Bourse de Commerce est l’écrin idéal pour cette symphonie de la radicalité.

En prologue les dérivés de blanc par Robert Ryman dont on se souvient de la remarquable exposition au musée de l’Orangerie, font face à l’installation de l’artiste Felix Gonzalez-Torres en hommage à son père, dont l’essence éphémère implique la participation du spectateur, tout en sapant l’autorité muséale. 

Puis l’on pénètre dans l’univers de l’artiste californienne Meg Webster qui sollicite nos différents sens pour suggérer un paysage mouvant. Comme un îlot émergent du sol, Mound est réalisé à partir d’argile et de sable, côtoie Mother Mound fait de terre rouge et un mur en cire très odorant, « Wall of Beeswax » , des ressources uniquement locales, tandis que l’on peut se perdre dans une petite enceinte végétale « Circle of Branches » constituée de brindilles et du foin. L’artiste précise que l’entretien des œuvres : arrosage fait partie intégrante de leur évolution dans l’espace.

L’incursion au Japon avec le mouvement Mono-ha « l’école des choses » autour d’œuvres exclusivement de la Collection Pinault au son d’Earth Horns With Electronic Drone (1974) de Yoshi Wada est un exercice presque spirituel autour des propriétés intrinsèques des matériaux. Puis l’on bascule dans les thématiques avec des artistes majeurs et iconiques : Sol LeWitt, Richard Serra, Walter de Maria, Hans Haacke, Eva Hesse ou Mary Corse mais aussi plus confidentiels : comme Dorothea Rockburne, Michele Stuart, Jackie Winsor, Anne Truitt, Maren Hassinger ou Senga Nengudi, souvent des femmes, ce qui pose la question de l’invisibilisation. La section Matérialisme est la plus aboutie à mon sens. 

Cet éblouissant parcours qui joue sur la potentialité du processus, de la matérialité, de la surface réfléchissante, de la lumière, de l’équilibre et de la gravité, de formes géométriques sérielles… se poursuit à l’entre sol avec Dan Flavin, Keith Sonnier ou François Morellet dans un ballet spectral et lumineux. Des interstices sont dédiés à Agnès Martin autour de ses toiles du Nouveau Mexique ou Charlotte Posenenske et ses sculptures modulaires à partir de conduits industriels, artiste qui a poussé la radicalité jusqu’à se retirer du circuit du monde de l’art. 

Assurément l’un des temps forts de la semaine de l’art à Paris qui va attirer les nombreux collectionneurs venus pour Art Basel. Une chance pour le public français qui ne voyage pas forcément aux Etats-Unis et n’a pas pu découvrir encore l’extraordinaire fondation de Donald Judd dans le désert de Chihuahua et la ville fantôme de Marfa. 

Infos pratiques :

MINIMAL

Du 8 octobre 2025 au 18 janvier 2026 

Bourse de Commerce

https://www.pinaultcollection.com/fr/boursedecommerce/minimal-