Arc de Triomphe Empaqueté, chantier © Didier Plowy – CMN
Après un été contrasté entre spectre d’une 4ème vague et gronde sociale élargie, catastrophes climatiques et le drame afghan aux portes de l’Europe face auquel Marseille et le Mucem s’engagent dans le prolongement de l’exposition L’Afghanistan au risque de l’art, que pouvons-nous attendre de cette rentrée ?
L’art sera-t-il le ressort pour nous permettre de rester optimistes ? C’est la carte qui va se jouer dans la capitale autour de plusieurs foires emblématiques hébergées dans le désormais Grand Palais Ephémère : Art Paris, la FIAC et Paris Photo qui misent sur l’effet d’attente et le retour possible d’une clientèle internationale en écho à une actualité muséale très riche, certaines expositions majeures ayant pu être décalées ou maintenues. L’Arc de Triomphe, symbole parmi les symboles, sera bel et bien empaqueté, selon la volonté de Christo, plusieurs fois ajournée. Un chantier titanesque entièrement financé par l’artiste et sa fondation. La magie de cet acte éphémère prendra-t-elle comme cela avait été le cas pour le Pont Neuf ? Nul ne le sait encore. Au menu également Anselm Kiefer, Georgia O’Keeffe, Baselitz, Vivian Maier et les chefs d’œuvres photographiques du MoMA au Jeu de Paume, tandis que Hangar Bruxelles accueillera Martin Parr.
L’art de Triomphe de Christo, legs posthume universel visible 16 jours
L’artiste d’origine bulgare naturalisé américain décédé en 2020 avait bénéficié d’une exposition rétrospective au Centre Pompidou. C’est donc la concrétisation d’un rêve plusieurs fois ajourné et l’ultime utopie du tandem Jeanne Claude-Christo qui voit le jour dans l’épicentre de Paris. D’un montant de 14 millions d’euros, le chantier se voit entièrement autofinancé par la vente d’œuvres préparatoires et originales de l’artiste selon le concept qui préside à chacune de ses interventions. Les chiffres donnent le tournis : une toile de 25 000 m² (100% recyclable) retenue par 3000 mètres de corde et 150 ouvriers mobilisés en continu jusqu’au 18 septembre, jour de la révélation ! Sous des allures de paquet cadeau géant, se cache le clin d’œil à l’enfance et son caractère transitoire comme le soulignait le couple. D’autant que le 3 octobre tout disparait, l’éphémère étant au cœur de leur démarche. Pendant ce temps la flamme du soldat inconnu est ravivée chaque jour. Le Centre des Monuments Nationaux est maître d’œuvre de ce projet sous la houlette du neveu de l’artiste Vladimir Javacheff. Les parisiens vont-ils adhérer à cette idée un peu folle ? et combien feront-ils le rapprochement avec le Pont Neuf Emballé en 1985 ? On se souvient en tous cas de l’émotion suscitée par les images de la prise de l’Arc de Triomphe par les Gilets Jaunes au plus fort de la crise.
Art Paris Art Fair, la FIAC, Paris Photo et .. AKAA
Effet d’incertitude, les poids lourds se sont précipités cette année pour être de la fête comme Thaddaeus Ropac, Almine Rech, Perrotin ou Kamel Mennour, la FIAC ayant dû être annulée l’année dernière, contrairement à Art Paris. Guillaume Piens est le gagnant de cette rentrée et se voit récompensé de sa stratégie régionale et cosmopolite autour d’un contingent de 140 galeries de 23 pays.
La FIAC table sur le retour de la clientèle étrangère avec une incertitude cependant pour les américains. Test PCR ou certificat de vaccination seront les sésames pour découvrir les 160 galeries, provenant de 25 pays réunies dans le Grand Palais Ephémère doté d’une extension obtenue afin de pouvoir accueillir tous les participants. Jennifer Flay reste résolument optimiste et a maintenu une large programmation Hors les murs en résonnance, entre les Tuileries et la place Vendôme dont l’œuvre n’est pas encore dévoilée à ce stade ! Jean-Michel Othoniel investira le Petit Palais à cette occasion.
Le succès ou non de la FIAC donnera le ton pour Paris Photo qui en parallèle de cette 24ème édition lance sa toute première Online Viewing Room. Florence Bourgeois est désormais seule aux commandes, Christoph Wiesner ayant pris la succession de Sam Stourdzé à Arles.
Avec la 6ème édition d’AKAA, cap sur l’Afrique et ses diasporas par Victoria Mann. Nos horizons vont pouvoir s’élargir autour de 32 galeries internationales et 100 artistes pour l’instant annoncés, sous réserve de l’évolution de la situation.
Centre Pompidou : Nomination de Xavier Rey et exposition Georgia O’Keeffe
J’avais interviewé Xavier Rey, directeur des Musées de Marseille à l’occasion de Manifesta en juillet 2020 (relire). Animé d’une vision sociale et démocratique du musée, il a mis en place dans la cité phocéenne un programme de lutte contre les inégalités et d’ouverture et a su fédérer plusieurs institutions autour des projets communs tels que : Cinq de Sophie Calle, Man Ray et la Mode, ou Par Hasard. Il s’est engagé également pour la réhabilitation du musée d’art contemporain avec une réouverture d’ici la fin de l’année. Xavier Rey est à l’origine de la remarquable exposition Le surréalisme dans l’art américain, sous la direction d’Eric de Chassey et en co-production avec la Rmn Grand Palais, maintenue alors qu’elle rassemble un grand nombre de prêts internationaux.
Xavier Rey prendra la succession de Bernard Blistène le 1er octobre aux côtés de Laurent Le Bon, nouveau président de l’établissement avec comme feuille de route le pilotage des grands chantiers qui attendent l’institution parisienne.
Première en France, la rétrospective de Georgia O’Keeffe rassemble une centaine d’œuvres de cette icone, récemment célébrée dans la magnifique exposition collective Elles font l’abstraction de Christine Macel. Le musée de Grenoble avait ouvert la voie sur cette pionnière dès 2015. Si elle est connue pour son travail sur les fleurs, il ne faudrait pas cependant enfermer l’épouse de Stieglitz dans une approche trop réductrice. Il est question de réel et de mimesis et c’est tout l’enjeu de cette démarche.
La rétrospective Baselitz sera l’autre événement du Centre Pompidou, par Bernard Blistène qui signera son dernier trait de génie avant son départ à la retraite. Il m’avait accordé un passionnant interview (relire) au moment de l’ouverture des antennes du Centre Pompidou à Shangaï « West Bund Museum Project » et Bruxelles : plateforme KANAL.
Grand Palais Ephémère : Anselm Kiefer
Premier artiste invité à investir le Grand Palais Ephémère (date pas encore confirmée, décembre ?), Anselm Kiefer a souhaité donner une réponse à l’environnement du Champs de Mars et de l’UNESCO. Un avion en plomb à taille réelle dialoguera avec la vaste étendue du Champ-de-Mars, au Nord, utilisé comme terrain de manoeuvres militaires sous l’Ancien Régime et lieu de célébration pendant la Révolution.
Musée d’art moderne de Paris : Anni & Josef Albers
Première exposition en France du couple rassemblant plus de trois cent cinquante œuvres de manière chronologique suivant leur parcours. Anni et Josef Albers se rencontrent au Bahaus en 1922 et restent fortement imprégnés par les valeurs de cet enseignement. En 1933 ils partent aux Etats-Unis où s’ouvre la période du Black Mountain College. La manière dont sera mise en avant Anni sera on l’espère, l’occasion de lui rendre hommage, indépendamment de son époux. La céramique avec Les Flammes sera explorée à partir d’octobre à travers plus de 400 pièces allant de l’époque néolithique jusqu’à nos jours. Une approche trans-historique autour des usages, techniques et messages de ce medium, largement investi par les artistes.
Chefs d’œuvre du MoMA au Jeu de Paume : la collection Thomas Walther
C’est l’évènement de la rentrée photographique parisienne. Cet ensemble de plus de 350 œuvres acquis par le musée new-yorkais auprès du collectionneur Thomas Walther, dont 230 sont présentées pour la première fois en France retrace une histoire unique des avant-gardes européennes et américaines de l’Entre-deux guerres. De par sa radicalité et ses expérimentations, cette photographie est un laboratoire en puissance servi par les meilleurs interprètes au rang desquels Lázsló Moholy-Nagy, El Lissitzky, André Kertész mais aussi Berenice Abbott, Claude Cahun, Florence Henri, Walker Evans, Henri Cartier Bresson…Le commissariat est assuré par Sarah Meister, ex-conservatrice, département de la photographie, The Museum of Modern Art, New York et Quentin Bajac, directeur du Jeu de Paume.
Vivian Maier au musée du Luxembourg : Rmn Grand Palais en collaboration avec la Collection John Maloof, Chicago et la Howard Greenberg Gallery, NY.
On connait la saga de cette gouvernante pour enfants redécouverte par un jeune agent immobilier, John Maloof qui se lance dans une véritable enquête : Finding Vivian Maier, 2013, film documentaire. La galerie parisienne Les Douches avait révélé l’approche couleur de cette désormais icone de la street photography alors que le Jeu de Paume lui consacrait au Château de Tours une première rétrospective française. Au musée du Luxembourg seront réunis plus de 260 photographies mais aussi des films Super 8, vintage et enregistrements audio inédits par Anne Morin, commissaire de l’exposition et directrice de diChroma Photography.
Fondation Pernod Ricard, nouvelle vitrine de la création
Désormais installée juste au-dessus des voies de la Gare Saint-Lazare, la désormais Fondation Pernod Ricard a rejoint le nouveau siège du groupe dans un élégant bâtiment le Grand Central Saint Lazare, signé Ferrier Marchetti Studio. Ce rez-de-chaussée dont l’aménagement confié à l’agence NeM à été pensé à géométrie variable afin de pouvoir accueillir outre l’espace d’exposition, un auditorium, un foyer, une librairie-boutique et un café, accessible en extérieur. Une fresque colorée signée Mathieu Mercier accueille les visiteurs tandis que tout le mobilier a été confié à des artistes. La nouvelle identité visuelle de la Fondation plutôt réussie revient au studio Des Signes. Après Isabelle Cornaro, Colette Barbier, directrice, accueillera le 22ème Prix de la Fondation Pernod Ricard.
Martin Margiela à Lafayette Anticipations
Reportée pour cause de pandémie, l’exposition du créateur iconoclaste belge Martin Margiela est confirmée pour cet automne. L’idée de Rebecca Lamarche-Vadel, directrice de la Fondation et commissaire est une prise de possession globale de l’espace sous le signe de la transformation et du détournement. L’ensemble des œuvres, produit en grande partie sur place à cette occasion s’inscrit autour des grands leitmotivs de l’artiste comme la disparition notamment.
VOGUE Paris, Palais Galliera
Fondé par Condé Nast en 1920, 2020 marque les 100 ans d’un magazine, véritablement prescripteur. A partir de 400 œuvres issues principalement des archives du magazine, le parcours met en avant de grands illustrateurs et photographes (Klein, Newton, Lindbergh, Horst, Testino, Bourdin..) et des collaborations avec des couturiers de légende comme Yves Saint Laurent ou Karl Lagarfeld.
Thierry Mugler au MAD, « Couturissime »
Après le Musée des Beaux-Arts de Montréal, étape parisienne d’un show très attendu qui mêle de façon thématique costumes, projections animées, photographies et musique…dans une atmosphère glamour et extravagante. Une place de choix est donnée au medium photographique dont Mugler lui-même se saisit à partir de 1976. Des performances numériques de professionnels du monde du spectacle et de l’audiovisuel ponctuent le parcours.
Art Moderne : Botticelli, le génie de la Renaissance sera célébré par le Musée Jacquemart-André, tandis que la collection des frères Morozov arrive enfin à la Fondation Louis Vuitton.
En régions :
Le Printemps de Septembre à Toulouse : les 30 ans du festival
2021 marque le 30 ans du festival, créé par Marie-Thérèse Perrin à Cahors puis à Toulouse.
Au total une cinquantaine d’artistes investiront 28 lieux emblématiques de la ville et ses environs dans des lieux inédits pour certains comme : l’Hôpital La Grave, la Prairie des Filtres, le MATOU, La Chapelle des Cordeliers, le Centre Culturel Henri-Desbals et Trentotto.
François Pétrovitch au Fonds Hélène & Edouard Leclerc (Landerneau)
L’artiste nous avait accordé un entretien à l’occasion de sa fascinante exposition à la Villa Savoye. Elle bénéficie cette année de plusieurs actualités dont ce parcours chrono-thématique en écho à la richesse de l’œuvre de l’artiste et de ses techniques.
Arts de l’Islam, un passé pour un présent : 18 expositions, 18 villes engagées, une coproduction Réunion des musées nationaux – Grand Palais et musée du Louvre.
Pour chaque accrochage, 10 œuvres, à la fois historiques et contemporaines, issues du département des Arts de l’Islam du musée du Louvre et de collections nationales et régionales, incarneront la richesse des cultures de l’Islam et leur inscription dans l’histoire de France. Plus de 180 œuvres au total seront ainsi présentées au public.
Europe :
Martin Parr, Hangar Bruxelles
Cette exposition retrace quarante années de la carrière de l’artiste à travers 15 séries emblématiques et plus de 400 images. Ce « Parrathon » que certains ont pu voir au Frac Bretagne à Rennes, nous avait décrit par son directeur Etienne Bernard, entre satire sociale aigue et tendresse populaire. Un évènement donc qui arrive en Belgique et confirme la place, désormais acquise par Hangar au sein des institutions incontournables. Le PhotoBrussels Festival revient en janvier pour sa 6ème édition.
Le nouveau Musée de l’Elysée, Lausanne
Comme nous l’annonçait Tatiana Franck, directrice, l’ouverture du musée de l’Elysée de Lausanne se fera le 6 novembre dans le quartier connecté à la gare et intitulé PLATEFORME 10. Internationalement reconnu pour ses collections et expositions photographiques, il sera abrité dans un bâtiment spécialement conçu par les architectes portugais Francisco et Manuel Aires Mateus et partagé avec le Musée de design et d’arts appliqués contemporains (mudac). Un laboratoire d’expérimentation sur les nouveaux médias, inauguré en 2017, sera amplifié dans le futur bâtiment.
A préciser que l’ensemble de cette programmation, non exhaustive, peut être soumis à des évolutions de dernière minute selon le contexte sanitaire général.