Vue d’exposition Apolline Ducrocq Les Ilots Bleus Frac Grand Large Photo Olivier Gaulon
Dans la Halle AP2 du Frac Grand Large, les silhouettes de l’artiste José Loureiro dessinent une fable colorée et instable, dont les protagonistes, aux corps grotesques et affublés d’œil-caméra instaurent une note dissonante. Une famille comme les autres, titre de la série qui renvoie à la satire de William Hogarth, introduit l’univers foisonnant de l’artiste qui flirte avec l’abstraction comme avec l’œuvre monumentale Boson de L, composée de 138 toiles horizontales dont la vibration colorée se fond avec l’architecture du Frac dans une histoire de la grille et de la répétition du geste. Keren Detton revient sur la découverte de l’artiste et les enjeux de cette ambitieuse invitation soutenue par la Fondation Gulbenkian. De plus, matali crasset est à l’honneur à travers La Cuisine en terrasse, espace de convivialité pour les associations et artistes du territoire et l’œuvre-exposition Be Aware, dispositif scénographique itinérant conçu avec l’association AWARE autour d’une meilleure visibilité des artistes femmes. Un nouvel accrochage des collections autour de l’Allemagne est proposé dans le cadre d’un partenariat avec les musées de Krefeld pour une présentation alternée des deux collections en France et en Allemagne selon l’axe international du Frac qui prévoit aussi un déploiement d’œuvres en Corée au Musée de Cheongju. Enfin, au niveau régional, l’artiste Apolline Ducrocq présente la restitution de sa résidence Archipel, avec Les îlots bleus autour d’une réflexion sur la mémoire de l’architecture balnéaire des années 1950 à Malo-les-Bains.
À quand remonte votre découverte de José Loureiro et l’envie de l’exposer au Frac ?
Keren Detton. Ma découverte du travail de José Loureiro s’est faite grâce à la galerie Maubert pendant la foire Drawing Now. Un vrai coup de cœur. Les dessins de la série « La vocation des acariens » ont été présentés au comité d’acquisition et deux d’entre eux sont entrés dans la collection. À partir de là j’ai commencé à tirer le fil et trouvé derrière ces dessins très enlevés, fantaisistes et pleins de couleurs, une grande ouverture et polysémie et une pratique très riche. José revisite l’histoire de l’abstraction et de la peinture au sens large, se référant aussi bien à Chardin, Mondrian qu’à Hogarth. Le spectre est très vaste et la peinture abordée sous toutes ses coutures. Une peinture à l’huile au départ sur châssis et sur papier. Il ne travaille pas in situ. Au début de sa carrière, la peinture engage beaucoup de matière et d’expressivité et peu à peu l’on se dirige vers des aplats, des jeux de motifs avec toujours l’importance du geste, de la main, du fait main. Des formes qui tirent vers des figures, plus ou moins abstraites avec une grande force d’évocation.
À l’occasion de l’exposition, une publication est prévue avec les designers In the Shade of a tree.
José LOUREIRO, Acarien, 2018, huile sur papier, 102 x 73 cm © José Loureiro, Adagp Paris 2024
Le nouvel accrochage de la collection autour de l’Allemagne (cycle « Extrême Collection »)
La collection est régulièrement accrochée ici. Il y avait déjà eu l’exposition « Americana » qui regardait du côté des artistes américains et états-uniens. Cette idée de présenter des artistes allemands est née d’un partenariat initié cette année avec les musées de Krefeld dans le cadre d’un projet croisé où au mois d’avril une centaine d’œuvres du Frac seront exposées dans les deux nouvelles villas Mies van der Rohe, Haus Lange et Haus Esters, tandis que l’année prochaine les musées de Krefeld révèleront leurs œuvres ici. À cette occasion nous sommes allés chercher dans nos réserves et il se trouve que la collection du Frac dispose de nombreux artistes allemands, le Nord de l’Europe y étant bien représenté (Belgique, Pays-Bas et Allemagne) avec des artistes très emblématiques des années 1960 à aujourd’hui, tous mediums confondus : Georg Baselitz, Joseph Beuys, Jörg Immendorff, Rosemarie Trockel, Annette Kelm…
Christiane BLATTMANN, EVR AFTR, 2019, poêle, jute teint, verre, bronze et acier inoxydable, 175 x 95 x 76 cm © Christiane Blattmann
Apolline Ducrocq et le programme Archipel
Archipel est un programme de résidence de recherche et création lancé avec la DRAC Hauts-de-France qui prévoit une restitution sous la forme d’une exposition. Pour Apolline Ducrocq nous lui offrons un espace assez majestueux du Frac, un vaste du cube de 10 m de hauteur. Son travail tient parfaitement l’espace. Sculptrice, elle s’intéresse à un contexte, une histoire, un chantier dunkerquois dont elle récupère les résidus pour les transfigurer en renversant les valeurs, les formes, l’endroit/ l’envers, le haut/ le bas, le lourd/ léger. Née à Boulogne-sur-Mer, elle a étudié ici à l’école d’art, et a connu le Frac en tant que régisseuse et monteuse d’exposition. De plus nous avons suivi son travail dans le cadre de l’association d’artistes Fructose qui mutualise ateliers et outils.
AWARE & matali crasset, Be AWARE, 2023, au Frac Grand Large © AWARE & matali crasset – Photo : Olivier Gaulon
BE AWARE et matali crasset
Il s’agit d’une donation de l’association AWARE qui a commandé le dispositif à matali crasset. Cette œuvre – exposition est une scénographie itinérante qui présente des artistes femmes mais également toutes celles qui ont aidé à les faire connaitre (critiques, mécènes, philosophes…). C’est aussi une accroche puisque la vocation de la collection du Frac est de circuler en régions, ce module sera ainsi invité à rayonner. Autoportant et constitué de 5 modules différents, il se prête très bien à une médiation accessible et ludique autour d’une meilleure reconnaissance et valorisation des artistes femmes.
Quel bilan de la Triennale Arts & Industrie « Chaleur humaine » ?
Très positif. Nous avons eu encore plus de visiteurs (45 900) que lors de la première édition, et tissé beaucoup de partenariats et de collaborations. Il est important pour nous de pouvoir présenter les œuvres au Frac, à la Halle AP2 et au LAAC mais aussi à l’échelle de toute la région. Une cinquantaine de résonances a pu être initiée et de toute nature : expositions, projections, projets dans une large typologie d’établissements : associations, maisons de l’enfance, établissements pénitentiaires, cinéma d’art et d’essai… Cela a créé un vrai dynamisme et un lien entre des acteurs de l’éducation, du champ social et de la culture.
Quels projets ?
Nous travaillons sur le déploiement XXL de la collection avec le programme « Extrême Collection » dont le premier volet s’ouvre avec l’Allemagne mais qui va aller plus loin pour associer différents publics et partenaires en région.
Infos pratiques :
José Loureiro « CROQUE-COULEUR »
Jusqu’au 1er septembre 2024
Apolline Ducrocq « Les Îlots bleus »
Jusqu’au 19 mai 2024
« Extrême collection : D’Allemagne »
Jusqu’au 31 décembre 2024
matali crasset, La Cuisine en terrasse
Jusqu’au 31 décembre 2024
AWARE & matali crasset, Be AWARE
Jusqu’au 31 décembre 2024
Relire mon interview avec la fondatrice et directrice d’AWARE : Camille Morineau (lien vers).