Art Brussels Week : Hangar, Centrale, Fondation A

Alice Pallot, Plage stérile, de la série Algues maudites a sea of tears, 2022 courtesy the artist

En plus d’un bilan très positif pour Art Brussels de part la sélection élargie de galeries aux propositions très curatées, le dynamisme de la ville qui ne cesse d’attirer artistes, collectifs, galeries, collectionneurs, le tout générant sans cesse de nouvelles initiatives, a donné lieu à une semaine de l’art intense dont voici une sélection sous le prisme de l’image. Trois propositions incontournables : Echoes of Tomorrow à Hangar, Mehdi-Georges Lahlou et Candice Breitz à Centrale et Hans-Peter Feldmann à la Fondation A.

  • Hangar photo art center : Symphonies du vivant

Après s’être penché sur la tradition persistante de l’autoportrait, Hangar explore le vivant à l’heure du dérèglent climatique sous différentes perspectives. Le parcours se fait en deux temps même s’il se dégage une cohérence de l’ensemble que l’on ne perçoit pas immédiatement. D’une part Echoes of Tomorrow regroupe les démarches de : Alice Pallot autour des algues toxiques, le collectif De Anima et le mode de communication des champignons et Matthieu Gafsou dans un rapport intime au vivant, l’artiste utilisant du pétrole sur ses tirages pointant le revers de la beauté des paysages qui nous entourent.

Matthieu Gafsou, Pétrole I, de la série Vivants, 2022 courtesy the artist

La proposition qui se démarque est à mon sens celle d’Alice Pallot Algues maudites, a sea of tears, réalisée suite à la résidence 1+ 2 (Toulouse) visant à croiser photographie et sciences. Lauréate du Photo Brussels Festival 05, Alice a bénéficié d’une exposition à la Chapelle des Cordeliers de Toulouse dans le cadre de sa restitution de résidence. La résidence s’est déroulée en plusieurs étapes, l’une d’entre elles consistant à recréer un bassin articiel « malade » aux côtés de chercheurs dont les images quasi spectrales s’ajoutent aux images documentaires réalisées en Bretagne.

Face à la prolifération d’algues en Bretagne qui libèrent un gaz mortel en conséquence de l’agriculture intensive et génèrent des zones mortes, l’artiste explore différents mediums : photo et vidéo pour dénoncer l’une des grandes catastrophes de l’écosystème des côtes marines. Autant une alerte qu’une traduction sensible et poétique.

Oyseter Mushrooms Orchestra, 2022 ©De Anima and Adem Elahel

Le 2ème volet de l’exposition « Melting Islands » autour de l’insularité et ses imaginaires, pouvait d’ailleurs faire l’objet d’une exposition en tant que telle, les îles exerçant depuis toujours un réel pouvoir d’attraction et de fascination chez les artistes. D’autres écosystème également menacés par le réchauffement climatique.  Si certains artistes se sont passionnés par des territoires très excentrés : Clément Chapillon et l’île greque la moins peuplée, Amorgos, Richard Pak et l’île britannique Tristan de Cunha où des communautés utopiques réinventent le vivre ensemble, d’autres se penchent sur les transformations inexorables de l’environnement :  Matthieu Litt et le Groenland, dans sa série Terra Nullius aux accents très nostalgiques ou Mathias Depardon et la surconsommation du sable à travers le projet mené en collaboration avec le journal Le Monde dans 6 zones géographiques dont le Cap Vert en proie au phénomène d’extraction illégale laissé aux populations les plus démunies dont les femmes qui le récoltent directement sur les plages en conséquence du boom immobilier touristique dans cette région du monde. Des enjeux tout à fait passionnants.

Terra Nullius # 4, From the series Terra Nullius, 2022. © Matthieu Litt.

Est également exposé le dernier projet du photographe Paul D’Hasse, Replica Falsifica, sous la forme d’un Leporello certes abouti mais sans lien réel avec les autres propositions.

Ne pas manquer la belle sélection de la Book shop avec le livre d’Alice Pallot : Sullius Looking at the sun with closed eyelids.

  • Centrale for Contemporary Art : Mehdi-Georges Lahlou et Candice Breitz, extra

A La Centrale l’artiste franco-marocain établi à Bruxelles, Mehdi-Georges Lahlou invite l’artiste sud-africaine basée en Allemagne Candice Breitz à dialoguer avec ses œuvres autour des questions de l’identité, de genre entrant en résonance avec ses leitmoivs autour de  la mémoire intime, de la représentation de soi, de la violence au quotidien. Les deux artistes partagent la pratique de la performance et de l’auto-représentation.

Vue de l’exposition Extra, Mehdhi-Georges Lahlou & Candice Breitz

Danseur de formation, la question du corps est omniprésente chez Mehdi-Georges Lahlou qui ouvre le parcours avec la video Spicy où les épices traversent et immergent son corps et son visage laissant planer un sentiment d’inconfort. Puis l’on se retrouve dans un espace en forme de bunker dont les parois sont tagguées d’injures homophobes et discriminatoires. Le rôle de l’archive est ensuite abordé autour de ce qui fait le cœur de l’exposition : l’utilisation historique du gaz moutarde sur des soldats d’Afrique du nord pendant la Première Guerre mondiale Of the Confused Memory, April 22, 1915.

Candice Breitz, Whiteface

La video Extra de Candice Breitz qui donne le titre de l’exposition, explore les privilèges liés à sa blanchité  en se mettant en scène dans des situations pleines d’auto dérision, de même avec WhiteFace où elle applique les techniques du found footage, munie d’une perruque et de lentilles de contact élavées, imitant les codes auto-ethnographiques. Dans la dernière salle elle va jusqu’à s’incruster littéralement dans le décor d’un feuilletons TV, seule femme blanche dans  un casting noir. Des échos polysémiques d’œuvres qui interrogent la postérité des images, leurs simulacres,  dans des espaces temps hydrides et vertigineux.

La série 100 Jahre est emblématique du travail du photographe allemand. Réalisée entre 1994 et 1997, selon un protocole très précis : uniquement le noir et blanc, des portraits de format identique, selon un principe chronologique chaque image montrant une personne plus âgée que la précédente. Ainsi se déroule devant la frise de la vie d’un nouveau né (huit semaines) à une centenaire.

Hans-Peter Feldmann affiche de l’exposition

Chacun. e des protagonistes sont des proches de l’artiste qui se sont prêtés au jeu dans des pose à la Sander au milieu de leur environnement quotidien. D’une grande neutralité, ces images sont laissées à la propre subjectivité du regardeur qui y pose ses grilles de lecture et ses codes de représentation du monde. Magistral !

Egalement exposées les séries : All the clothes of a woman, 1974 et Legs, 2008 autour de la fétichisation du désir, Feldmann étant un collectionneur fou d’images qui décide de quitter le marché de l’art en 1990.

Infos pratiques :

Echoes of Tomorrow

Jusqu’au 10 juin

Melting Islands

Jusqu’au 8 juillet

Replica Falsifica

Jusqu’au 8 juillet

Hangar

Mehdi Georges Lahlou

Candice Breitz

Jusqu’au 17 septembre

Centrale Box :

Angélique Aubrit & Ludovic Beillard

CENTRALE for contemporary art – Centre d’art contemporain – Bruxelles ( HP 2020) – CENTRALE for contemporary art – Bruxelles

Hans-Peter Feldmann, 100 Jahre

Jusqu’au 2 juillet

Hans-Peter Feldmann / 100 Jahre – Fondation A Stichting

Organiser votre venue :

https://www.visit.brussels/fr/

https://www.thalys.com/fr