Florence Doléac et Maximum, Maxidodo, Cellier Pompadour Expérience Pommery # 16
Les rêveries, thème choisi par Nathalie Vranken et Fabrice Bousteau pour cette 16ème Expérience Pommery, l’un des grands motifs d’inspiration des artistes à travers les âges, trouvent dans un écho singulier dans le labyrinthe des crayères gallo-romaines et le Cellier Pompadour, nouvel espace d’exposition créé par Paul-François et Nathalie Vranken.
Une invitation à suspendre la course du temps, se laisser envahir par le flux de ses pensées, le fameux stream of consciousness de Virginia Wolf ou convoquer ses souvenirs. Un état de demi-sommeil où les repères se fondent et différentes créatures surgissent des profondeurs.
Il faudra pour cela revêtir les habits du conte comme nous y invite dès l’entrée du domaine, Lilian Bourgeat, artiste précédemment invitée par Fabrice Bousteau, qui aime jouer des échelles avec son banc public démesuré. Puis l’on retrouve l’éléphant qui danse sur sa trompe de Daniel Firman, Würsa à 18 000km de la terre et les messages intersidéraux de Véronique Béland. Ce préambule posé, la descente du Grand Escalier nous fait véritablement basculer dans un autre espace-temps. Le duo Tsai & Yoshikawa se présente comme des chorégraphes du vivant et plus particulièrement subaquatique : anémones de mer, méduses…N’oublions pas que ce dédale de 18kms de crayères est dû à une femme, Madame Pommery qui prend des décisions entrepreneuriales très avant-gardistes pour l’époque et invente le Brut. Elle passe commande au sculpteur Gustave Navlet de 4 bas-reliefs monumentaux jetant, sans le savoir, les prémisses de l’Expérience Pommery.
Le début de la traversée se fait avec Lionel Sabatté, Champs d’oiseaux, artiste de la métamorphose et du rebut avec ces stalagmites totémiques en bronze qui évoquent les strates de l’histoire. Puis deux vidéos de Ange Leccia autour du ressac filmé au ralenti de la mer méditerranée et de Stéphane Thidet autour du souffle du vent, tous les deux invités précédemment par Fabrice Bousteau, nous mettent en condition contemplative avant de traversée la forêt énigmatique de Christophe Berdaguer et Marie Péjus réalisée à partir de test psychologiques autour de dessins d’arbres. Belle surprise avec le défi auquel s’est confrontée Anne-Flore Cabanis dont l’impressionnante installation, Direction & Aplomb, part du sommet du cratère à 30m de hauteur. Une première qui rejoint les mathématiques et la poésie. Puis notre œil stimulé au loin par l’arbre aux fruits multicolore de Choi Jeong Hwa, qui avait été présenté à l’entrée du Domaine à l’occasion de l’Expérience Pommery 13. Un régal dont le kitsch assumé renvoie à un Pop ultra vitaminé. Les photographies de Philippe Ramette perdent un peu de la magie des expériences traversées par cet équilibriste de la gravité, tandis l’on se réveille en plein cauchemar avec Javier Pérez et son oreiller de marbre froissé d’une veine très minimale. Coup de cœur pour les 140 fils de verre et de cristal de Léa Barbazangues, que j’avais découverte à Chaumont sur Loire. Bouquet final avec l’installation de Luka Fineisen, Awakening, qui a fait le bonheur des spectateurs des Extatiques à La Défense (commissaire Fabrice Bousteau), un monde de plumes en apesanteur qui nous enveloppe comme 1000 caresses.
Cellier Pompadour – Poursuite des rêveries par Judicaël Lavrador
Critique d’art et commissaire indépendant, chroniqueur régulier à Beaux-arts et aux Inrokuptibles, Judicaël Lavrador auteur notamment de l’ouvrage Qu’est-ce-que la peinture aujourd’hui ? nous propose sous ce prisme, des rêveries lascives, gravitationnelles ou monstrueuses pour reprendre ses termes aux côtés de Catherine Delot, directrice du Musée des Beaux-arts de Reims dans le cadre d’un partenariat avec le Domaine Pommery. Un dialogue subtil se dessine entre des peintres d’époques différentes : Courbet ou Fantin-Latour pour les plus illustres avec les jeunes talents : Louise Sartor, Autumn Ramsey Vidya Gastaldon, Flora Moscovici…
Dans une volonté de recréer le labyrinthe des profondeurs, l’accrochage joue sur l’effet de déjà-vu et de miroir dans un esprit assez surréaliste. Le Maxidodo de Florence Doléac ouvre le parcours en écho iconoclaste avec le lit aux dahlias d’Emile Gallé. Sarah Tritz joue de cet étrange familier avec ces vestes réversibles multi fonction. La dérive se poursuit dans des notes atmosphériques avec les nuages de Pascale Rémita ou la voie lactée de Gerald Petit, les trompe-l’œil d’Amélie Bertrand, les multiples jeux autour de l’abstraction avec Hugo Pernet, Aneta Kajzer, jusqu’aux bégaiements de Clément Rodzielski. Nina Childress que je retrouve avec plaisir après son exposition monographique au Frac Nouvelle-Aquitaine Méca et ambitieuse publication, 1081 peintures, est un résumé à elle seule de tous ces faux semblants de la peinture qu’elle traque depuis le début de son parcours autodidacte. On ressort légèrement déphasés d’une telle traversée des apparences.
Les galeries sont partie prenantes de cette aventure et sont venues nombreuses à cette journée de vernissage : Sémiose, Galerie Papillon, art : concept, Crevecoeur, Valentin, Chantal Crousel, Michel Rein, Jousse Entreprise..
Infos pratiques :
Expérience Pommery # 16
Caves & Cellier Pompadour
Jusqu’au 8 novembre 2022
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