Collection Pinault à Rennes : Le Noir et Blanc (Couvent des Jacobins) et La Couleur Crue (Musée des Beaux-Arts)

Au-delà de la couleur, le noir et blanc dans la collection Pinault courtesy collection Pinault photo: Marie de la Fresnaye, Rennes.

L’on connait l’attachement de François Pinault pour Rennes et la Bretagne et selon sa volonté, le Couvent des Jacobins rénové présentait en 2018 «  Debout !. »

Cet été l’exposition en deux volets : Au-delà de la couleur. Le noir et blanc dans la collection Pinault et La couleur crue au Musée des Beaux-Arts propose une plongée fascinante et complémentaire dans ces deux lieux facilement joignables à pied.

Au Couvent des Jacobins le vautour noir et blanc de Sun Yuan et Peng Yu ouvre le parcours convoquant  57 artistes français et internationaux et 3 créateurs de mode sous la houlette de Jean-Jacques Aillagon, commissaire de l’exposition. Inspirée du livre du médiéviste et spécialiste Michel Pastoureau « Noir histoire  couleur » cette démarche repense la symbolique et le statut de deux couleurs qui n’ont pas toujours été associées, le noir étant considéré longtemps comme un non couleur de par l’influence de Newton. C’est avec l’évènement de l’imprimerie à la fin du XVème que le noir et le blanc prennent leur revanche et deviennent une couleur à part entière comme le retrace l’un des chapitres de l’exposition. Comme le souligne le commissaire le noir et blanc constituent les armoiries de l’ordre des Jacobins et sous leur appellation héraldique d’argent et de sable,  la bannière de la Bretagne. Il est intéressant de remarquer combien les couleurs sont sujettes selon les époques, à de grandes variations.  Le noir souvent attaché aux forces maléfiques – les mouches noires de Damien Hirst – le blanc au linceul et à la mort -Maurizo Cattelan-ce qui selon les cultures également n’a pas la même perception. Volontiers associés à l’ascèse de la vie monastique, le blanc et le noir sont synonymes d’une radicalité chez de nombreux artistes comme en témoigne la très belle salle intitulée : Less is more, selon la formule du fondateur du Bauhaus. S’y succède des représentants du groupe BMPT ou de l’Arte povera. Puis nous basculons dans le domaine de la photographie où le noir et blanc est privilégié pour ses qualités esthétiques comme avec Anne Leibovitz ou frontales comme avec Richard Avedon qui témoigne de la guerre du Vietnam ou Jennifer Allora et Guillermo Calzadilla autour de ces soldats américains en Irak déguisés pour Halloween.

Annie Leibovitz, Akke Alma, Las Vegas, Nevada, 1995, 1995
© Annie Leibovitz © Pinault Collection

Après le rappel des combats de la Black Pride, petit intermède Haute Couture avec la Petite Robe noire de Chanel ou le tuxedo Yves Saint-Laurent place au chamboule tout final quand les couleurs se mélangent et les frontières binaires s’estompent. Sturtevant avec sa Marilyn colorisée nous invite à aller au-delà du miroir.  Ultime réminiscence avec le Coup de tête grandeur nature d’Adel Abdessemed longtemps exposé devant le Centre Pompidou.

Ann Veronica Janssens Galleria Alfonso Artiaco Naples – Italy

La couleur crue, proposition de Jean-Roch Bouiller, directeur du Musée des Beaux-arts, Sophie Kaplan, directrice de La Criée et Anne Langlois, directrice de 40mcube propose un voyage multi sensoriel aux confins de la matière-couleur, du brut à sa dispersion la plus immatérielle. Dès le patio du musée, les deux installations de Flora Moscovici et Katharina Grosse en réponse à l’in situ invitent à une véritable expérience. Puis nous traversons le paysage d’Ulla von Brandenburg toujours aussi magique pour aller côtoyer différentes expérimentations ayant recours à des savoirs faires tels que le bois, le tissage ou la laine comme avec Caroline Achaintre et son imposante tapisserie.  La dernière partie du parcours se penche sur le versant immatériel de la couleur avec les fascinantes propositions de Sarkis, Édith Dekyndt ou Florian et Michael Quistrebert.

Véronique Joumard, Orange, 2003/2008, 2021
© Courtesy de l’artiste, Gilles Drouault et galerie de multiples, Paris / Production Musée des beaux-arts de Rennes © Adagp, Paris 2021 / KinderBiennale, Staatliche Kunstsammlungen, Dresde.

Cette dématérialisation peut aller jusqu’au possible effacement des couleurs ce dont Michel Blazy s’est fait une véritable marque de fabrique comme ici avec l’agar-agar. Un accrochage spécial des collections prolonge cette magistrale traversée.

Au moins deux bonnes raisons d’aller à Rennes auxquelles j’ajoute volontiers la proposition de 40mcube : l’exposition de Laura Gozlan « Onanism Sorcery. »

EXPORAMA propose en résonnance une trentaine de propositions associant des acteurs locaux de l’art contemporain, notamment Les Champs Libres, le FRAC Bretagne et les deux centres d’art contemporain, La Criée et 40mcube.

Très bonnes vacances et rendez-vous à la rentrée pour de nouvelles aventures !

Infos pratiques :

Au-delà de la couleur, le noir et blanc dans le Collection Pinault 

Couvent des Jacobins 

Jusqu’au 29 août 

La couleur crue 

Musée des Beaux-arts 

Jusqu’au 29 août 

Billet groupé 

www.exposition-pinault-rennes.com

www.mba.rennes.fr