Charles HascoĂ«t, Studio Quarantine & other Stories…🎧

Charles Hascoët Autoportrait au masque photo Diane Arques

Je dĂ©couvre l’artiste Charles HascoĂ«t Ă  l’occasion des portes ouvertes de l’incubateur artistique Poush-Manifesto Ă  Clichy, puis entre pleinement dans sa dĂ©marche avec son exposition par Superzoom Ă  la galerie Joseph « Je longe mon souffle Â» en juillet 2020. Je prends une vraie claque ! Ces visages ancrĂ©s dans le rĂ©el oscillent entre attente et sidĂ©ration et cachent sous l’abattement une dĂ©flagration puissante. Effroi et cristallisation se conjuguent parmi les cocktails ou les vestiges d’une nuit d’errance. Qu’est ce qui anime ce coureur de fond qui a choisi la peinture comme viatique aux Beaux Arts de Paris ? Son nouveau projet Ă  la New Galerie saisit le motif de l’animal de compagnie pour rejouer les codes du portrait de commande Ă  partir du profil Instagram de l’adorable chaton. Ce que disent nos obsessions contemporaines…Charles HascoĂ«t revient sur cette pĂ©riode de confinement pendant laquelle il a fait partie des Studio Quarantine de la galerie new yorkaise JosĂ©e Bienvenu et a Ă©tĂ© exposĂ© Ă  la foire West Bund de Shanghai par la galerie Dumonteil avec qui il ouvre un nouveau chapitre.

Charles Hascoet est un artiste qui vit et travaille entre New-York et Paris. Il a Ă©tudiĂ© Ă  l’École des Beaux-Arts de Paris, et a obtenu son diplĂ´me en 2014. De ses annĂ©es d’Ă©tudes, et avec ses professeurs (J.Rielly ou J.Michel Alberola entre autres), il a eu l’occasion de poursuivre et d’approfondir son mĂ©dium favori, la peinture. Depuis, ses crĂ©ations picturales ont Ă©tĂ© exposĂ©es dans de nombreux pays. Naviguant entre les lieux institutionnels et alternatifs, il a participĂ© Ă  plusieurs expositions collectives, Ă  Bruxelles (BE), Ă  Miami (US) ou dans la campagne française. (…)

Charles Hascoët New Gallery Yuki at Home

L’exposition chez New Galerie : genèse et point de dĂ©part

J’ai eu le bonheur de rencontrer Marion Dana il y a quelques années maintenant et nous avons noué une belle amitié. Quand à la suite d’un drame personnel elle a perdu son chat j’ai eu l’opportunité de lui en offrir un autre, en la personne de Yuki, adorable chaton blanc avec qui elle entretient depuis des liens très forts, traduits par la création d’ un profil instagram très suivi, pendant le confinement Yuki_SNOW_IN_JULY.

A partir d’un premier tableau réalisé, nous avons évoqué la possibilité d’une exposition de peintures dédiée à Yuki à partir uniquement de son profil instagram. Yuki est un animal très farouche qu’il est difficile d’approcher, c’est pourquoi Instagram est une bonne entrée en matière pour le connaitre. Nous avons alors beaucoup travaillé elle et moi pendant la durée du premier confinement totalisant une trentaine de peintures et eu la chance d’ouvrir l’exposition début janvier, reprenant cette série de toiles dans un esprit linéaire très intimiste. Nous avons créé également un calendrier dans un esprit postal et vintage assez décalé. Malgré le fait que Marion ait passé tout le confinement en compagnie étroite avec Yuki et moi seul à l’atelier, nous avons pu maintenir une sorte de fil tendu à partir de ces images virtuelles devenues quasiment virales, tout en captant en profondeur notre propre solitude et désœuvrement plein de tendresse.

Charles Hascoët

Le projet Superzoom

J’ai commencé à travailler avec Ferdinand Gros, fondateur de Superzoom dès 2019 à l’occasion d’une exposition collective pendant la FIAC. Son ambition était de proposer une galerie itinérante internationale en écho à la dynamique de programmation des foires comme à Art Basel Miami en décembre et poursuivre lors de Frieze Londres, l’Armory New York…etc Le contexte, comme vous le savez, ayant évolué nous avons alors décidé de faire des propositions de proximité localisées à Paris comme à la galerie Joseph rue de Turenne à la sortie du premier confinement. C’est pourquoi quand Marion Daval m’a invité pour cette exposition à la New Galerie elle a accepté d’accueillir Superzoom pour que je puisse accepter sa proposition. Nous allons poursuivre notre collaboration en 2021 en espérant la réouverture des frontières à New York.

Charles Hascoët

Votre collaboration avec Josée Bienvenu Gallery (New York)

Nous avons commencĂ© Ă  travailler ensemble en 2019, annĂ©e assez intense pour moi avec de nombreux allers et retours Paris- New York. J’ai produit beaucoup de peintures qui ont attirĂ© l’attention de JosĂ©e qui m’a alors intĂ©grĂ© Ă  son programme de peintures et d’artistes confinĂ©s pendant toute cette pĂ©riode : « Studio Quarantine Â». Je vais d’ailleurs participer prochainement Ă  une exposition collective Ă  la galerie autour de cet angle avec essentiellement des natures mortes et des autoportraits rĂ©trospectifs rĂ©alisĂ©s depuis la rĂ©clusion de mon atelier.

Charles Hascoët

Egalement à l’international vous êtes représenté par la galerie Dumonteil en ce qui concerne Chine

C’est une toute nouvelle perspective dans le prolongement de ma rencontre avec Dorian et son père, fondateurs de la galerie qui sont venus me voir Ă  l’atelier en octobre dernier et ont Ă©voquĂ© cette possibilitĂ©. Cela m’a permis d’exposer alors Ă  l’occasion de la foire de West Bund pendant la Shanghai Art Week, devenue la seule foire internationale qui s’est tenue en 2020. La rĂ©ception ayant Ă©tĂ© positive, nous avons dĂ©cidĂ© d’entamer une collaboration Ă  plus long terme qui dĂ©marrera en novembre prochain par un solo show dans leur galerie de Shanghai. Une excellente nouvelle !

Retour aux origines avec les Beaux Arts de Paris, quel bilan faĂ®tes-vous de ces annĂ©es de formation ?

Cette expĂ©rience remonte maintenant Ă  6 ans et demie ayant Ă©tĂ© diplĂ´mĂ© en 2014. Cela a Ă©tĂ© une pĂ©riode assez magique et l’occasion d’affirmer pleinement un dĂ©sir de carrière artistique et des choix qui m’habitaient depuis de nombreuses annĂ©es ayant en rĂ©alitĂ© commencĂ© Ă  peindre depuis l’âge de 7 ou 8 ans. Je me suis d’abord lancĂ© dans le modelage, le pastel et la peinture Ă  l’huile. Les Beaux Arts m’ont permis de donner une vĂ©ritable autoritĂ© Ă  ce dĂ©sir et ces 5 ans de parcours ont Ă©tĂ© des occasions formidables de rencontres avec des compagnons aux mĂŞmes centres d’intĂ©rĂŞt qui m’ont fait dĂ©couvrir de nombreuses techniques, artistes, poĂ©sies et intuitions. Des professeurs assez exceptionnels aussi.  Cependant, mĂŞme si cette pĂ©riode reste très agrĂ©able il est nĂ©cessaire de savoir en sortir car il faut au bout d’un moment se mĂ©fier du confort que nous apporte en quelque sorte les Beaux Arts dans cet entre soi rassurant. La rĂ©alitĂ© est très dure et l’on se retrouve assez brutalement dans un contexte moins favorable et très concurrentiel Ă©tant très isolĂ©s et livrĂ©s Ă  nous-mĂŞmes. Il devient alors plus difficile de se raccrocher Ă  ce qui nous fait vibrer et ce pourquoi on a dĂ©cidĂ© de faire de la peinture tous les jours et pendant le reste de sa vie. Cette sortie des Beaux Arts est d’autant plus douloureuse qu’elle est assez longue puisqu’il m’a fallu plusieurs annĂ©es avant de trouver une activitĂ© stable et d’arriver Ă  susciter de l’intĂ©rĂŞt autour de mes peintures et faire venir des gens Ă  l’atelier.

Charles Hascoët

Je rĂ©alise rĂ©trospectivement que le dĂ©sir qu’avait Ă  l’époque Nicolas Bourriaud de professionnaliser l’école et d’amener plus les Ă©tudiants vers une rĂ©alitĂ© du marchĂ© Ă©tait louable mĂŞme si malheureusement il n’a pas pu aller jusqu’au bout de ses ambitions.  Je remarque qu’à prĂ©sent Jean de Loisy est très en phase avec le nĂ©cessitĂ© des Ă©tudiants Ă  savoir se rendre visibles et s’inscrire dans une vĂ©ritable stratĂ©gie.

La question de la peinture et ses enjeux Ă  partir de la toile « Dirty Martini Â» Ă  valeur d’autoportrait

Dirty Martini comme la plupart de mes peintures est venue d’elle-mĂŞme en quelque sorte n’ayant pas Ă  dessein de reprĂ©senter une image. J’ai en revanche le dĂ©sir de reprĂ©senter une peinture la plus proche et fidèle possible de ce qui me traverse. Dirty Martini est devenue la cristallisation de plusieurs Ă©motions vĂ©cues et dès ses dĂ©buts entre janvier et fĂ©vrier 2020. Elle me prĂ©occupait en rĂ©alitĂ© depuis New York et Ă  mon retour en dĂ©cembre 2019, cette image Ă©tait dĂ©jĂ  sous-jacente. Elle raconte beaucoup de choses qui ne m’étaient pas familières et je pense qu’il m’a fallu plusieurs mois pour l’apprĂ©hender globalement Ă  la fois dans mon travail et aussi dans ma vie d’alors. Il rĂ©vèle un dandysme d’une flamboyance crĂ©pusculaire, avec cette forme d’incendie qui se dĂ©gage derrière ma silhouette dans des volutes de fumĂ©e très menaçantes. Comme un fantĂ´me de cocktail, le Dirty Martini Ă©tant ce cocktail extraordinaire que l’on boit Ă  l’incontournable Bemelmans Bar de New York et qui tape franchement sur le système ! En peignant cette peinture je devais traverser un certain nombre de choses assez limites entre 2019 et 2020.  C’est un autoportrait qui dĂ©passe ma simple figure puisque je m’attache Ă  reprĂ©senter ce Ă  quoi je vibre. L’ensemble de ma dĂ©marche fonctionne ainsi entre une nĂ©cessaire distance et Ă©coute de moi-mĂŞme, entre un Ă©tat de veille, d’intuition et de rĂ©vĂ©lation.

Charles Hascoët Dirty Martini

Cette peinture a aussi une valeur générationnelle et assez nostalgique en quelque sorte de ces moments de convivialité, de partages où l’ivresse rejoignait d’autres formes d’imaginaires.

Il y a en effet une nostalgie de cet ordre, étant de plus touché par un drame personnel et familial à ce moment là ce qui transparait sans doute dans ce désœuvrement face à la perte d’une innocence incarnée par ce portrait.

Comment avez-vous vĂ©cu cette pĂ©riode du confinement ?

Il y a eu en réalité plusieurs étapes de confinement en 2020. J’ai eu l’opportunité de venir à Poush dès février 2020 étant je crois l’un des premiers à m’installer dans l’immeuble, ce qui s’est révélé une très bonne impulsion même si assez vite coupée net dès lors de la fermeture imposée du bâtiment. Résultat des courses j’ai dû passer toute cette période chez moi dans un petit atelier que j’ai réussi à aménager. Mais cette abondance de temps n’a pas été productive pour moi. En réalité, il faut bien faire une différence entre le temps disponible et le temps effectif. Je peux ainsi par exemple être beaucoup plus efficace disposant de 2 heures dans une journée chargée que dans une semaine sans engagements.

J’ai investi le premier confinement dans d’autres préoccupations et n’ai réalisé que 8 peintures en tout et pour tout, ayant mis à profit autrement cette période de calme, de deuil, de réflexion, assez saine au final.

Le second confinement s’est révélé finalement beaucoup plus positif ayant pu me déplacer tous les jours à l’atelier, à l’aide des dérogations fournies par Poush ne pouvant pas télétravailler. J’ai pu beaucoup produire, peindre, rencontrer d’autres artistes dans un climat très stimulant. Je me suis alors rendu compte en comparant ces deux périodes de confinement que le premier avait été beaucoup plus pénible et moins productif face à cette profonde solitude.

Charles Hascoët photo Diane Arques

Les modalités et principes de fonctionnement de Poush

J’ai entendu parler la première fois de Poush par son directeur artistique YvannoĂ© Kruger qui m’a encouragĂ© Ă  venir voir sur place. J’ai alors laissĂ© de cĂ´tĂ© un autre atelier, YvaonnĂ© ayant Ă©tĂ© très convaincant et prĂ©cis sur les principes de fonctionnement du lieu, Ă  savoir un contrat d’occupation. Nous ne sommes ni squatteurs ni amenĂ©s Ă  rester toute notre vie ici ! Nous devons nous montrer aptes et agiles Ă  partir du moment oĂą le repreneur investira les lieux. Initialement nous devions rester jusqu’en juillet 2021-date de fin de mon contrat- mĂŞme si entre temps cette crise mondiale du Covid va sans doute prolonger cette pĂ©riode, jusqu’en 2022 nous espĂ©rons, sinon plus.

Ce projet voit aussi l’émergence des promoteurs immobiliers qui investissent de plus en plus le champ de l’art, que pensez-vous de cette tendance ?

C’est à mon avis une bonne chose car cela permet aux artistes d’avoir des ateliers confortables et abordables, les promoteurs y trouvant aussi de leur côté leur intérêt. Il y a toujours eu une synergie entre l’immobilier et le monde de l’art si l’on pense notamment avec la rue Louise Weiss il y a une vingtaine d’années, ce qui se poursuit aujourd’hui avec Komunuma à Romainville avec Fiminco. Les promoteurs font souvent appel à des acteurs du monde artistique pour valoriser en quelque sorte leurs projets, comme cela a été le cas avec Poush Manifesto tout d’abord à l’Orfèvrerie à Saint Denis puis à présent à Clichy.

En écoute : FOMO_Podcast 🎧

Site de Charles HascoĂ«t :

CHARLES HASCOET

L’artiste est représenté par la galerie Dumonteil (Chine)

HASCOËT Charles – Galerie Dumonteil

Superzoom art :

New Galerie Yuki Snow In July

(2) Superzoom | Facebook

Relire mon interview avec YvannoĂ© Kruger le 2 juillet Ă  Poush-Manifesto, Clichy :

YvannoĂ© Kruger, conseiller artistique chez Manifesto : accĂ©lĂ©rer la mutation du patrimoine bâti dĂ©laissĂ© et donner un coup de poush aux artistes ! – FOMO VOX (fomo-vox.com)

POUSH

6 Boulevard du GĂ©nĂ©ral Leclerc, 92110 Clichy 

manifesto.paris

Suivre Poush sur instagram (@poush.manifesto)