Les galeries restent en cette période de fermeture des musées, le poumon indispensable au partage de la culture et le nombre de visiteurs va croissant dans ces espaces gratuits où chacun est le bienvenu qu’il soit connaisseur ou néophyte. Ce dimanche elles sont nombreuses à ouvrir (marais.guide à télécharger). Petit tour des incontournables.
Le Marais :
New Galerie : Charles Hascoët/ Superzoom
Charles Hascoët pour la petite histoire, offre à Marion Dana responsable de la galerie une petite chatte blanche nommé Yuki il y a 3 ans. Comme beaucoup de personnes pendant le confinement Marion créé un profil instagram pour sa compagne : yuki_snow_in_july, les chats ayant été au centre de toutes les attentions des internautes. Charles Hascoët rejoue cette iconographie à partir des légendes du compte et autres hashtags : #Chez moi Paris #Comme un lundi, darling #At home enjoying this beautiful evening, épinglant un quotidien devenu très focalisé sur les détails.
Ciaccia Levi : Amber Andrews
J’avais interviewé Antoine Levi à l’occasion de l’ouverture du nouvel espace de la galerie dans le marais (relire). L’artiste belge Amber Andrews diplômée de l’Académie Royale des Beaux Arts d’Anvers nous entraine dans une plongée dans la peinture italienne et ses mythes comme le Décaméron de Boccace, un classique qui a trouvé ses adeptes pendant le confinement ! Ces cent nouvelles dont certaines ont été interprétées au cinéma, célèbrent l’otium d’un groupe de jeunes réfugié sur une colline pendant la peste noire à Florence. Dans cette mise à l’épreuve, un certain nombre de vertus apparaissent comme essentielles comme le courage face à la peur, l’amitié et son pendant érotique, l’espérance… Rehaussés d’emprunts à Gauguin, Matisse pour les couleurs, Giorgio de Chirico pour l’architecture, Maurice Denis pour les symboles, ces tableaux ont quelque chose de réjouissant !
Semiose : Laurent Le Deunff
Dans la clairière de Laurent Le Deunff on croise des dents de requins grandeur nature, des crottes de dinosaures fossilisées, un phallus double (premier godmiché de l’histoire ?)… le tout sous l’oeil amusé de Grelot, le chat de l’artiste. Paléontologue d’un nouveau genre, Laurent Le Deunff entremêle contes et légendes populaires, art & craft et obsessions personnelles.
Dohyanglee : les 10 ans !
Cette petite galerie a un oeil incroyable et le don de repérer des talents tels que Marcos Avila Forero, (Prix Fondation Ricard entré dans les collections du Centre Pompidou), Romain Vicari (exposé au Palais de Tokyo), Laetitia Badaut Haussmann (Prix Aware en 2017), Louis-Cyprien Rials (prix SAM 20217), Claire Adelfang (à présent chez Taddaeus Ropac) ou Violaine Lochu (prix Aware 2018)… A l’occasion de ses 10 ans la galerie réussit la gageure de réunir 44 artistes sous l’angle poétique du collage et des correspondances avec Or, Encens & Myrrhe. Un véritable cadeau !
Anne-Sarah Bénichou : 5 ans !
Autre anniversaire celui d’Anne Sarah Bénichou qui a su trouver sa place dans le cercle fermé des galeries qui comptent entre figures établies et jeunes pousses en devenir. Je l’avais interviewée à l’occasion de l’exposition Restons Unis par la galerie Perrotin (en écoute Podcast). Avec ce Ballon géant peint par Mireille Blanc qui renvoie à des goûters d’anniversaire de l’enfance à partir d’une photo de la galeriste on est dans une certaine nostalgie tandis que Julien Discrit s’inscrit dans une autre géologie et expérience temporelle. Je l’avais rencontré à l’IAC de Villeurbanne à l’occasion de la dernière Biennale de Lyon. Marion Baruch la doyenne de la galerie fait partie du nouvel accrochage du MRAC Occitanie sur lequel je vais revenir.
Paris-Beijing : Zhuo Qi et Dorian Cohen
Même si les peintures de Dorian Cohen ont une tonalité naturaliste très juste en ces temps d’enfermement, mon coup de coeur va plutôt en faveur du travail du sculpteur Zhuo Qi (né en Chine, diplômé HEAD Genève, ENSA Limoges). En résidence à la Fondation Martell à Cognac il nous livre sa dernière série « Bubble-Game » réalisée sur place dans un atelier de souffleur de verre. Une occasion unique qu’il saisit pour poursuivre ses expérimentations autour non plus de la céramique mais du verre à partir de fragments collectés de sculptures chinoises antiques (reproductions). Des greffes colorés et subtiles pour redire le cycle du renouveau bouddhiste.
David Zwirner : Thomas Ruff
Les Tableaux Chinois de Thomas Ruff entre propagande et iconographie Pop warholienne sèment le trouble par leur pixellisation anarchique. Entre estompage et idéalisation faussement vintage. Autant d’indices de réécriture de l’histoire à partir d’un processus de son invention à partir d’images scannées du Président Mao et de grands rassemblements issues du magazine La Chine, dont il retire plusieurs couches pour en altérer la lecture en demi-teintes décalées. Une démarche entre art minimal et fascination technologique qui rejoint l’enquête menée par l’artiste sur la « grammaire de la photographie » et sa capacité mimétique.
Baudoin-Lebon : Maya Mercer et Juliette-Andrea Elie
Installée à présent rue de Montmorency (à l’adresse de la galerie Bertrand Grimont) la galerie propose un dialogue entre deux artistes femmes la franco américaine Maya Mercer, autodidacte du medium et la française d’origine égyptienne, Juliette-Andrea Elie, diplômée des Beaux Arts de Nantes, repérée au Festival Circulations en 2015 et Lauréate Mentorat des Filles de la photo. Cette dernière propose ses expérimentations entre gravure et photographies. Des « Fading Landscapes » tatoués au revers du papier Pergomamo comme autant de souvenirs diaphanes et étérés d’une mémoire enfouie.
Komunuma/Romainville
Sur le campus arty du Grand Paris, je remarque :
In Situ : Renaud Auguste-Dormeuil avec ces incantations fantômes au milieu de ces images, points de bascule, espaces temps en suspension. « Jusqu’ici tout va bien » nous dit le drone »Le ciel attendra »… »Lorsque viendra le printemps », titre de l’exposition qu’il emprunte à Fernando Pessoa sonne comme un leitmotiv de cette machine à remonter le temps.
Sator : Gabriel Léger « Deep Time » à partir d’une relecture d’artefacts de son invention, l’artiste nous plonge dans l’Egypte ancienne entre ready made et vestiges archéologiques. Il relance une production d’amulettes et une bière antique, capte les morsures du soleil sur des photographies de vestiges ou créé une lampe à huile dans des gestes fétichistes qui interrogent l’aura.
Jocelyn Wolff : Santiago de Paoli « A leaf in the wind » Le galeriste m’a accordé un interview général sur cette crise. (relire)
Mode d’emploi :
Comité Professionnel des Galeries d’Art (comitedesgaleriesdart.com)