Dans le cadre de nos rencontres spéciales autour de l’impact du Covid-19 sur l’art, place à une aventure patrimoniale hors du commun en Val de Loire. Historienne de l’art et botaniste Patricia Laigneau collectionneuse, tombe amoureuse du Château du Rivau et décide avec son mari de se lancer dans l’aventure de sa restauration. Une lourde tâche à laquelle s’ajoutent le parc et les jardins. Très vite elle décide de faire entrer l’art contemporain dans ce lieu enchanté à la fois en extérieur et dans le château le temps d’expositions temporaires. Après « Léonard de Vinci et la Renaissance », Patricia Laigneau s’apprêtait à accueillir « le Goût de l’art » avec une quarantaine d’artistes pour célébrer les 20 ans d’ouverture au public ! Partie remise pour cette inconditionnelle du beau et de la nature. Elle nous donne sa vision du contexte.
1. Quelles conséquences cette crise a sur votre exposition « Le Goût de l’art », étape choisie du parcours d’art contemporain ACTE(S) et la gestion du parc et des Jardins du Rivau et les personnels qui vous accompagnent ?
Nous avons obligation d’attendre la possibilité d’accueillir le public pour pouvoir décider d’une date d’ouverture. Nous sommes de ce fait, dans l’inconnu et j’ai été obligée de reporter le transport des prêts, l’accrochage etc. Le transporteur, les artistes et les divers intervenants sont tous confinés sans le droit d’échanger ou de rencontrer d’autres personnes. Les œuvres ont dû être stockées dans un local sécurisé…
Conclusion : beaucoup de frais engagés : production, catalogue… mais pas de chiffre d’affaire à moyen terme et peut être long terme ?
Le jardin du Rivau est magnifique au printemps avec ses collections de jonquilles, de tulipes et de fleurs printanières. Je poste tous les jours des vues des tapis de fleurs pour les partager avec ceux qui nous suivent sur compte Instagram ou Facebook, afin de montrer la beauté du monde et de la Nature.
2. Quel sera l’impact selon vous sur le monde de l’art en général et les artistes en particulier ?
Les artistes vont commenter et réagir à ces nouveaux comportements : le confinement, la remise en question d’une société de loisirs, du repli communautaire : ne sommes-nous pas tous égaux devant l’épidémie. D’autre problématiques que celles traitées jusque lors par les artistes vont émerger. Les artistes en tant que vecteurs libres vont faire le constat et poser des questions sur les évolutions de société nécessaires dans le cas de pandémie mondiale. Un Monde plus solidaire entre nation est-il nécessaire ? La solidarité intergénérationnelle est-elle bien traitée dans notre pays ?
Changement dans les comportements des regardants des expositions peut-être : les grandes expositions à très gros budget vont elles pouvoir continuer si les gens doivent se tenir à distance ?
Conclusion : baisse de visibilité : il est à craindre que l’Art, vu quelquefois comme un divertissement, soit abandonné par certains au profit des secteurs plus humanitaires. L’art doit rester une porte vers le monde de la Pensée.
3. Le tourisme est un secteur très pénalisé, pensez-vous que les mesures de soutien annoncées sont-elles suffisantes et adaptées à votre région ?
Nous ne les connaissons pas encore toutes. On ne peut rattraper un mois ou plus de fermeture. C’est l’un des secteurs les plus impactés. Beaucoup de petits et moyens sites risquent de disparaître. Le Patrimoine sera ainsi affecté avec moins de moyens pour sa conservation. La préservation du patrimoine est cruciale pour rappeler notre Histoire et l’identité de la France. On peut espérer que ce secteur soit soutenu aussi par les visites de nos compatriotes puisqu’il est évident que les gens auront plus de crainte à voyager loin de chez eux. Merci à tous de votre soutien.
4. Les stratégies virtuelles (OnLine Viewing Rooms, musées..) sont-elles une solution intéressante pendant cette période selon vous ?
Pourquoi pas, nous sommes déjà sur Google mais nous n’avons jamais de retour des « viewers » éventuels. Il est à craindre que ces dispositifs favorisent les grandes structures qui ont les moyens de mettre en place des stratégies virtuelles. D’un autre côté, l’Art peut rester un recours dans une période de confinement : une évasion par les livres et peut-être certains réseaux sociaux.
5. Pensez-vous qu’en matière de conscience écologique cette crise soit une alerte et entraine des changements durables dans nos habitudes ?
« D’un mal sort toujours un bien »
Oui, c’est une alerte qui je l’espère contribuera à resserrer les liens entre les personnes. Les faire réfléchir à quoi ils tiennent le plus devant la crainte de disparaître. Faire aussi penser aux autres avec moins d’individualisme à partir du moment où on a vécu enfermé et seul.
La conscience écologique peut-être et à espérer mais cela ne dérive pas de cette pandémie qui affecte les humains plutôt que la planète.
Au Rivau, nous défendons bien sûr le concept de la conscience écologique.
La passion pour la nature et le jardin en est une des réponses, ce moment de pause peut être une opportunité pour réfléchir, développer la conscience collective vis à vis de la nature toute entière.
En ce qui concerne les leçons de la crise du coronavirus, je pense aussi à un changement de comportement à envisager : un destin commun sur des valeurs et un glissement vers une idéologie plus humanitaire.
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