Alors que la Fondation Gulbenkian fête ses 50 ans et engage une nouvelle orientation stratégique en France, son directeur Miguel Magalhaes a choisi de soutenir l’exposition Diogo Pimentão au Frac Normandie Rouen. Actuellement à Paris la Fondation soutient également la remarquable exposition « Sculptures infinies-des collections de moulage à l’ère digitale » au musée des Beaux Arts. Véronique Souben, directrice du Frac Rouen, Miguel Magalhaes et Diogo Pimentão nous livrent en avant-première ce projet qui sera l’un des temps forts du calendrier de l’art en 2020 !
1. Invitation à Diogo Pimentao : genèse et enjeux
VS Chaque année le Frac présente, dans son espace, une exposition monographique dédiée à un artiste n’ayant pas forcément encore bénéficié d’une exposition personnelle en France. Ces expositions, à caractère rétrospectif, sont des moments importants pour faire le point sur un travail. Après avoir consacré une série de monographies à des artistes photographes, le travail de Diogo -dont certaines oeuvres ont été récemment acquises pour notre Fonds, s’est imposé naturellement dans la mesure où le dessin est un des médiums de prédilection de la collection. La démarche de Diogo nous intéressait d’autant plus qu’il engage une réflexion très originale, à la fois transversale et élargie autour de ce médium et en renouvelle l’approche.
2. Quelle est la place du dessin dans la collection du Frac Normandie Rouen ?
VS Le dessin ou, plus exactement, les oeuvres sur papier sont, aux côtés de la photographie et du livre d’artiste, un des médium privilégiés de la collection. Elles représentent aujourd’hui 544 oeuvres réalisées par 135 artistes. Ce médium s’est notamment imposé à partir des années 2000 avec l’entrée régulière d’ensemble importants autour de la question du corps avec des artistes comme B. Toguo, Anne-Maris Schneider, F. Hyber, A. Séchas, Saverio Lucariello, Günther Bruce … Le Frac a par ailleurs consacré plusieurs grandes expositions à des artistes phares pour ce médium tels Silvia Bächli (2002), Helmut Dorner (2005) ou Nancy Spero (2007).
3. Quels sont les choix de la scénographie et du parcours de l’exposition et pourquoi ?
VS Pour l’exposition au Frac, nous avons privilégié une approche rétrospective permettant de confronter des oeuvres issues des diverses périodes, des plus anciennes aux très récentes, voire à de nouvelles productions pensées pour le lieu. Nous avons regroupé ces travaux par accointances formelles afin d’appuyer plus fortement encore l’importance paradoxale de la forme dans la démarche de l’artiste et l’incroyable matérialité qui en ressort. L’exposition, guidée par la couleur noire, sera rythmée par des contrastes visuels marquants entre les pleins et les vides, les structures et les surface, les transparences et les effets de reflets.
4. Quelle est la place de la performance dans le processus créatif ?
DP La performance (cf. Festival PHARENHEIT et SPRING) m’aide à atteindre un dessin interne, en action. J’ai toujours pensé que le dessin avait une forme d’existence avant la trace. Pour moi, la performance incarne ce mouvement vers le dessin. Avant ou après le processus créatif, la performance et le dessin s’accomplissent dans l’action car ils ne représentent pas la réalité, ils la produisent. La performance est, ainsi, complémentaire au dessin. Il n’y a pas de dessin sans mouvement. Qu’il s’agisse d’un mouvement abstrait, mental ou physique, d’un mouvement vers l’autre, vers l’altérité, la différence, l’inconnu, le ressenti. Mais, inversement, il ne peut y avoir de mouvement sans dessin. Alors, si on veut, on peut appeler « performance » le premier moment d’interaction avec le monde : dans une forme intime (dès que l’on se lève, dans l’atelier) ou dans une forme d’action (dans la confrontation ou le partage avec un public).
5. Quelle sont la nature et le enjeux du partenariat avec la fondation Gulbenkian ?
MM L’exposition de Diogo Pimentão au FRAC Normandie Rouen signale le début du nouveau positionnement stratégique de la Délégation en France de la Fondation Gulbenkian. A partir de 2020 la fondation Gulbenkian veut s’approcher des institutions culturelles et artistiques françaises dans le souhait de soutenir des projets d’expositions de ou avec artistes portugais. Ce projet avec le FRAC Normandie-Rouen, une institution de référence, et Diogo Pimentão, jeune artiste avec une visibilité importante dans le paysage artistique français et européen émerge comme le mariage parfait pour lancer notre projet.
Relire mes interviews précédents avec : Véronique Souben (octobre 2019) et Miguel Magalhaes (mai 2019).
Infos pratiques :
Diogo Pimentão
Frac Rouen
3 Place des Martyrs de la Résistance, 76300 Sotteville-lès-Rouen
du 25 janvier au 5 avril