En galeries : France Bizot @Backslash, Léa Belooussovitch @Paris Beijing

-France Bizot, Backslash galerie (4ème exposition)

“Let not take for granted that life exists more fully in what is commonly thought big than in what is commonly thought small.” Virginia Woolf

Cette phrase de l’écrivain.e et poétesse anglaise résume ces petits riens qui inspirent à France Bizot sa série de 27 dessins inspirés du quotidien. « Small Things »comme cette petite balle de tennis troublant le bleu canard d’un fauteuil design scandinave, ce selfie en mode préraphaélite de Claire Tabouret, les touches de ce téléphone noir bachélite, une lentille et le doigt qui la pose, un joli cul gainé de collants chamarrés..

Exposés au même titre que d’autres séries emblématiques par la galerie Backslash ce 4ème opus de l’artiste intitulé « Shift and shuffle » réserve la surprise des dessins d’humeur sur couvertures de livres, publiés sur ses comptes Instagram,Tumblr et Facebook et révélés pour la première fois dans leur totalité. Ainsi d’une jeune femme de dos sur Emma Bovary, David Bowie sur Lord Byron, une cote de bœuf sur la nouvelle pornographie de Marie Nimier, un cachet de somnifères.. autant de variations et vagabondages littéraires pour lutter contre la standardisation de nos désirs et nos écrans et l’obsolescence programmée.

Le statut de l’image, les iCônes (exposition précédente), les réseaux sociaux et le tribunal des « likes », la schizophrénie entre soi et les autres, sont quelques uns des axes de recherche de cette ancienne directrice artistique qui connait tous les rouages du monde de la publicité pour mieux en traquer les duplicités.

-Léa Belooussovitch, Galerie Paris Beijing

« Eidôlon » titre de l’exposition renvoie également à la notion d’ idoles. Cette fois il s’agit à partir d’images d’actualité particulièrement violentes et crues de les vider de leur pouvoir, de leur aura, en les recadrant sur un détail choisi, les changeant de support pour du feutre, textile enveloppant, et les rehaussant de crayons de couleur. Léa Belooussovitch se concentre souvent sur des victimes de scènes de guerre ou de conflits comme pour exercer sur elles une possible distance et guérison à partir des filtres mis en place. Un flou qui isole et qui protège.

Avec « Executed Offenders », nouvelle série, elle se penche sur les dernières paroles de condamnés à mort dans l’état du Texas implorant le pardon de leurs proches ou clamant leur innocence. Elle recopie manuellement ces mots sur de grandes feuilles à l’aide de pochoirs cherchant un effet poétique et sobre pour rehausser en la dignité et l’humanité. Comme des images mentales sous jacentes, des apparitions fantomatiques.

« Facepalm » décrit ce geste de protection d’un condamné qui tente d’échapper à la presse à la sortie d’un tribunal ou lors d’une arrestation, le fameux « Perp walk ». L’artiste à partir des images du Chicago Tribune de femmes de gangsters de la Prohibition prises à leur insu, n’en garde que le regard en gros plan et noir et blanc. Une alternative au voyeurisme planétaire ambiant par une touche très cinématographique.

La compilation de vidéos d’amateurs en voiture qui se filment en train de percuter un animal, largement plébicitées est tout aussi troublante dans les mécanismes qu’elle suggère. Dans la mesure où l’artiste retire la séquence de l’impact, elle pose de nouveau la question de ce qui est regardable et supportable.

La matérialité de la douleur, le rapport au réel, l’illusion de l’esthétique, la véracité de la mémoire, sont autant de dimensions passionnantes qu’elle continue à explorer dans le flux constant de nos images toujours plus incisives et intrusives.

Infos pratiques :

4ème exposition de France Bizot

Backslash galerie

jusqu’au 20 juillet

www.backslashgallery.com

Léa Belooussovitch

Eidôlon

jusqu’au 29 juin

www.galerieparisbeijing.com