Les 30 ans de Xippas : interview de Tristan van der Stegen 🎧

30 ans déjà #1 Xippas Paris photo avec Pablo Reinoso et Marco Maggi

C’est le 19 octobre 1990 que Renos Xippas inaugure sa galerie dans le Marais sur les trois niveaux du bĂątiment de la Rue Vielle du Temple, ce qui Ă©tait trĂšs novateur Ă  l’Ă©poque dans le quartier pas encore devenu the place to be de l’art. Takis scelle le destin de la galerie qui devient rapidement incontournable dans le paysage de la crĂ©ation française et internationale autour d’artistes confirmĂ©s ou plus Ă©mergents tels que : Vik Muniz, Robert Irwin, Vera Lutter, Peter Halley, ValĂ©rie Jouve, Pablo Reinoso, Philippe Ramette, Bettina Rheims, Yves BĂ©lorgey, Yvan Salomone, Dominique Blais… La galerie dispose Ă  prĂ©sent de plusieurs antennes rĂ©parties dans quatre pays : France (Paris), Suisse (GenĂšve), Belgique (Bruxelles et Knokke) et Uruguay (Montevideo et Punta del Este). L’une des derniĂšres en date, la nouvelle galerie Baronian Xippas inaugurĂ©e en 2019 Ă  Bruxelles est le fruit d’une longue coopĂ©ration entre Albert Baronian et Renos Xippas.

Vera Lutter Radio Telescope, Effelsberg IV, September 2, 2013

Son directeur Ă  Paris Tristan van der Stegen nous retrace cette fascinante aventure et nous prĂ©sente l’exposition rĂ©trospective conçue en trois volets. Une vraie gageure qui ouvre la rĂ©flexion sur les fondamentaux dĂ©fendus par la galerie et les dĂ©fis Ă  venir en cette pĂ©riode si particuliĂšre de pandĂ©mie.

Peter Halley Another

L’exposition rĂ©trospective des 30 ans, une vraie gageure
quels choix et prioritĂ©s ?

C’est une bonne question car elle nous a beaucoup interpellĂ©e, en effet comment devions nous organiser une exposition sur notre histoire maintenant longue de 30 ans et riche en actualitĂ©s avec un spectre d’artistes allant de l’émergence aux plus Ă©tablis. La seule maniĂšre de l’imaginer Ă©tait de la concevoir en trois volets, le premier commençant cette semaine jusqu’au 3 avril, le second autour de mai-juin et le dernier en juin-juillet. Ce qui va dĂ©finir chacun des volets est le groupe d’artistes participants et la rĂ©sonnance entre leur travail. Pour ce premier chapitre nous avons 13 artistes et une cinquantaine d’Ɠuvres dĂ©ployĂ©es sur 2 Ă©tages allant de Takis, artiste le plus historique à Matthew Porter, jeune photographe amĂ©ricain new-yorkais.

Quel est l’ADN de la galerie ?

Il est toujours difficile de répondre mais en prenant de la hauteur nous avons constaté que la galerie avait une vraie valeur ajoutée et des affinités autour de 3 dominantes.

La premiĂšre est un goĂ»t prononcĂ© pour la photographie et ses explorations, ce qui a valu Ă  Renos Xippas d’ĂȘtre membre du comitĂ© de sĂ©lection de Paris Photo depuis plusieurs annĂ©es. Cela correspond Ă  un intĂ©rĂȘt de Renos Xippas qui a Ă©tĂ© prĂ©curseur sur le marchĂ© de la photographie et lui-mĂȘme collectionneur, ce qui lui a permis de rĂ©unir des artistes de renom parmi lesquels Vera Lutter, Joel Sternfeld, Bettina Rheims, Vik Muniz, ValĂ©rie Jouve, Matthew Porter dĂ©jĂ  citĂ©, parmi d’autres. La 2Ăšme constante renvoie Ă  l’attachement de Renos pour l’Uruguay oĂč il passe une grande partie de l’annĂ©e et oĂč nous avons deux galeries. Cette situation gĂ©ographique et appartenance culturelle nous a permis de rĂ©unir une part importante d’artistes sud-amĂ©ricains dont Marco Maggi, uruguayen, Pablo Reinoso, franco-argentin, Vik Muniz, brĂ©silien, qui font aussi partie de cette exposition et ils sont nombreux chez nous. Enfin la 3Ăšme caractĂ©ristique qui nous identifie est notre conviction et notre promotion autour des artistes abstraits amĂ©ricains qui ont poursuivi l’abstraction Ă  partir des annĂ©es 1980 et qui aujourd’hui, ĂągĂ©s de 60 et 70 ans sont entrĂ©s dans les musĂ©es. Une aventure longue et persĂ©vĂ©rante pour eux qui ont Ă©tĂ© peu reconnus Ă  leurs dĂ©buts Ă  une Ă©poque oĂč ce n’était pas la tendance dominante. La figure de proue sur le marchĂ© est Peter Halley mais autour on identifie des artistes importants tels que James Siena, Dan Walsh, Michael Scott ou des plus jeunes comme John Philip Abbott dont on a parlĂ© rĂ©cemment lors d’un panel sur Martin BarrĂ© au Centre Pompidou. Enfin, n’oublions pas notre engagement de la scĂšne française du fait de notre prĂ©sence ici depuis 1990, avec des artistes comme CĂ©leste Boursier-Mougenot, Philippe Ramette, Yves BĂ©lorgey, Yvan Salomone, Dominique Blais ou encore Bertille Bak.

Comment la galerie a-t-elle réagi face aux défis de la crise ?

Comme tout le monde nous avons Ă©tĂ© trĂšs bousculĂ©s au dĂ©part par des changements d’organisation et de mode opĂ©ratoires importants dans une pĂ©riode oĂč les confinements se sont multipliĂ©s mais aprĂšs la turbulence initiale on s’est aperçus que plusieurs stratĂ©gies Ă©taient possibles et qu’il valait mieux poursuivre celle qui correspondait plus Ă  notre identitĂ©. Cela ne passait pas nĂ©cessairement par une course avec nos confrĂšres sur l’autoroute du digital, mĂȘme si les outils digitaux sont importants et nous nous en saisissons souvent (plateformes de ventes classiques comme Artsy, Artnet..). Nous avons tenu pendant cette pĂ©riode qui risque de durer, Ă  rĂ©inviter nos collectionneurs Ă  la galerie pour qu’ils y passent plus de temps dans un esprit de convivialitĂ©. Nous sommes dans le « real life » ! Cette rĂ©flexion nous a amenĂ© Ă  faire des travaux importants Ă  l’étage pour pouvoir accueillir les personnes diffĂ©remment et avoir des accrochages qui changent. L’idĂ©e Ă©tant de dire que la galerie Xippas est un espace de dĂ©couverte Ă©volutif. Nous aurons d’une part en bas un espace white cube qui fonctionne de maniĂšre classique et au premier un espace changeant oĂč les gens pourront Ă  terme aussi consulter nos publications qui sont importantes et prendre le temps avec nous de dĂ©couvrir les artistes que l’on dĂ©fend. C’est cette stratĂ©gie que l’on va poursuivre.

Votre stratĂ©gie vis-Ă -vis des foires ? la FIAC en digital


Nos participations dans les foires auparavant étaient relativement nombreuses dont Paris Photo bien sûr, la Fiac, Drawing Now, Art GenÚve, Art Brussels mais aussi la foire de Punta del Este : Este Arte, mais elle ne sont pas excessives. Nous attendons que les foires se repositionnent et puissent accueillir du public de nouveau mais nous ne comptons pas dessus. Notre volonté est de pouvoir assurer une autonomie financiÚre de la galerie par le développement du lien avec les collectionneurs. Nos choix seront désormais trÚs ciblés.

Comment ont réagi vos artistes pendant cette période ? Quelles initiatives ont-elles émergées ?

Il faut voir aussi le cĂŽtĂ© positif de cette pĂ©riode qui a gĂ©nĂ©rĂ© des initiatives trĂšs probantes pour nous. On a pu constater l’implication et le soutien de nos artistes sur nos rĂ©seaux sociaux et dans notre nouveau projet de vidĂ©os en ligne (« cinema room »). Ils ont aussi acceptĂ© de participer Ă  des visites d’ateliers proposĂ©es sur zoom, Ă©tant pour beaucoup d’entre eux Ă  l’étranger. Cette expĂ©rience a portĂ© ses fruits, les collectionneurs ont Ă©tĂ© trĂšs nombreux et rĂ©ceptifs. Ces enregistrements ont pu ĂȘtre utilisĂ©s ensuite par les artistes.Ils ont donnĂ© lieu Ă  de vraies rencontres et nous leur en sommes redevables d’avoir jouer le jeu.

En Ă©coute : FOMO Podcast 🎧

Tristan van der Stegen photo Say Who/ Jean Picon

Infos pratiques :

30 ans déjà #1

avec : Céleste Boursier-Mougenot, Peter Halley, Valérie Jouve, Vera Lutter, Marco Maggi, Vik Muniz, Matthew Porter, Philippe Ramette, Bettina Rheims, Pablo Reinoso, Lucas Samaras, James Siena et Takis

du 16 janvier au 13 mars 2021

XIPPAS PARIS
108 rue Vieille du Temple 75003 Paris