Jennifer Caubet, Below the sea level #1, 2017, encre sur papier, 102 x 72 cm courtesy the artist
A l’occasion de l’exposition de Jennifer Caubet, lauréate 2024 du Prix Art [ ] Collector -Entreprise Cornu1887, lancé par le couple de collectionneurs Evelyne et Jacques Deret, rencontre avec une artiste qui envisage la sculpture comme « un outil d’agencement, d’ancrage et de traçage ». Elle nous dévoile les contours de l’exposition « Desseins » présentée à cette occasion au Centre Wallonie Bruxelles, Paris et conçue avec la commissaire Annabela Tournon Zubieta. Presque une décennie de pratiques s’exprime entre dessin, installations, tissage, estampes, le tout participant à des partitions d’espaces (publics, ruraux, ou domestiques), ajustables et modulables, dans une projection sans cesse rejouée. Un arpentage où le corps à toute sa place. L’exposition est aussi l’occasion de découvrir le travail récent de l’artiste aux Ateliers des Arques, ainsi qu’une série de maquettes, pratique quotidienne de l’artiste, montrées ici pour la première fois. L’artiste revient sur l’opportunité offerte par ce prix dans le contexte singulier d’une démarche de collectionneurs. Elle a répondu à mes questions.
Artiste française née à Tonneins en 1982, Jennifer Caubet vit et travaille à Aubervilliers. Elle est diplômée de l’École Nationale Supérieure des Beaux-Arts de Paris en 2008. Jennifer Caubet a participé à de nombreuses expositions institutionnelles en France et en Europe (FRAC Nouvelle Aquitaine MÉCA., FRAC Occitanie – Montpellier, Laboratoires d’Aubervilliers, Kunsthalle de Bâle..) et a participé à de nombreux programmes de résidence. Ses œuvres font partie des collections de Lafayette Anticipations – Fonds de dotation Famille Moulin, du CNAP et du FRAC Occitanie – Montpellier, FRAC Provence-Alpes-Côte d’Azur, FRAC Nouvelle Aquitaine MÉCA.
Comment définiriez-vous votre pratique ?
Mon travail s’ancre dans une volonté de produire des espaces et des lieux.
La ligne reste l’élément fondateur du travail, qu’elle se projette dans l’espace, qu’elle le structure ou qu’elle le trace. Le dessin vient alors en toute logique s’inviter dans la réflexion. Mes sculptures et œuvres sur papier sont des moyens toujours renouvelés d’organiser, de dessiner et de dérober des espaces à l’existant. Trajectoires, lignes et plans sont chez moi intrinsèquement liés et négocient, sans cesse, des passages entre la deuxième et la troisième dimension. Il s’agit par ces outils de ne pas subir l’espace mais de le penser comme un élément à construire et déconstruire perpétuellement. Le corps devient arpenteur, médiateur entre la notion d’espace et de territoire ; la sculpture un outil d’agencement, d’ancrage et de traçage ; le dessin un moyen de projection et un outil d’annotation ; une carte.
Jennifer Caubet, Capsule 1.2, 2019, verre soufflé, 16 x 45 x 16 cm (socle : 120 x 50 x 30 cm), production CIRVA – Centre international de recherche sur le verre et les arts plastiques
Lauréate de la 19ème édition d’Art Collector x Entreprise Cornu 1887 : que vous a apporté cette opportunité ?
Cette expérience m’a permis de penser différemment mon rapport à l’exposition, de faire un lien entre les formes engageant la 2ème et la 3ème dimension à partir de pièces de périodes différentes. Les œuvres présentées couvrent une période allant de 2013 à 2024.
Cela m’a aussi donné l’occasion d’approfondir un travail déjà engagé avec la commissaire et historienne de l’art Annabela Tournon Zubieta.
Jennifer Caubet Maquette Où disperserons nous les cendres du vieux monde, courtesy the artist
Comment avez -vous et réagi au contexte singulier de l’initiative d’un couple de collectionneurs ?
D’une certaine manière j’ai pris très au sérieux ce contexte particulier de la collection et du collectionneur. Je trouvais intéressant de mettre en regard dans mon travail ce qui est de l’ordre de la collection privée, de l’ordre presque du « domestique » avec des pièces conçues pour l’espace publique.
Quels partis pris vous ont-ils guidé avec la commissaire ?
J’ai voulu aux côtés d’Annabela Tournon Zubieta, confronter différentes topologies du travail en montrant pour la première fois mes maquettes, en rejouant certaines pièces d’une autre manière, en les mettant en veille, en stock, en attente et en travaillant des nouvelles pièces qui arrivent comme inscrites dans une lignée, un héritage. Autant d’éléments qui, selon moi, ont un rapport avec la collection.
Il était aussi important de mettre en lumière la relation forte qui existe entre les œuvres dessinées et les sculptures.
Et enfin comme le signifie ce titre « Desseins », il s’agit de projection, d’associer l’acte de dessiner à une forme de construction du projet, entre la visée et un espace de projection.
Art Basel 2024 stand Jousse Enterprise photo Max Borderie
Vous faisiez partie de la dernière édition Basel Paris avec Jousse Entreprise : quel bilan pour vous ?
Ma sculpture sur le stand était un geste fort, une forme de radicalité qui permet d’assumer le travail dans les dimensions qu’il porte. J’ai été heureuse de cela. La foire a généré beaucoup de rencontres, beaucoup de retours et d’intérêt. Tout cela fait avancer le travail. C’est un moment international très stimulant pour l’art qui permet de voir des œuvres, des artistes et des galeries qu’on ne voit pas habituellement.
Quels projets vous animent ?
La question du réemploie en sculpture me taraude pas mal et j’aimerais expérimenter des matières textiles conjointes à mes structures métalliques.
De nouvelles pièces en verre sont en cours ainsi que de nouvelles sérigraphies.
Jennifer Caubet est représentée par la galerie Jousse Entreprise.
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Jennifer Caubet – « Desseins »
19ème édition du Prix Art [ ] Collector
Du 23/11 au 3/12/2025
Commissaire Annabela Tournon Zubieta
Centre Wallonie Bruxelles Paris
27-129 rue saint Martin 75004 Paris.
Art [ ] Collector « des collectionneurs invitent un artiste »