KIKUJI KAWADA, A Partial Eclipse Tokyo, 1987 Gelatin silver print, printed 1997 courtesy the artist, L. Parker Stephenson Photographs
Rendez-vous incontournable du calendrier des collectionneurs et amateurs, dont le leadership ne cesse de se renforcer au fil des années, la 25ème édition de Paris Photo rassemble 181 exposants (galeries et éditeurs) venus de 31 pays, du 10 au 13 novembre au Grand Palais Éphémère. En plus d’une large programmation proposant notamment 24 solo show et 14 duo shows, des conversations, signatures d’artistes…Le secteur Curiosa se concentre cette année sur l’interdisciplinarité avec la curatrice Holly Roussell (Centre d’art contemporain UCCA de Pékin). Le programme « Elles x Paris Photo » (Kering/Women in Motion) autour de la visibilité des femmes photographes est confié à l’écrivaine et éditrice Federica Chiocchetti. Florence Bourgeois qui se félicite d’un retour à la normal sur le secteur après la période de la pandémie, revient sur les enjeux de la visibilité des femmes photographes, les femmes créatrices qui l’inspirent et les rencontres décisives de son parcours. Elle a répondu à mes questions.
Avec quel état d’esprit envisagez-vous la 25ème édition de Paris Photo ?
Enthousiaste et sereine pour la 25ème édition de Paris Photo ! La foire a une position de leader dans son domaine qui se conforte au fil des années et fait partie des rendez-vous incontournables de l’automne sur le médium. Nous sommes très heureux d’accueillir cette année une invitée d’honneur en la personne de Rossy de Palma qui nous offre sa sensibilité et son regard au travers de 25 photographies choisies parmi les projets des exposants. Nous avons également, en dehors du panorama de la photographie sur près de 2 siècles, le plaisir de partager une programmation de qualité avec des expositions, des conversations, des signatures d’artistes dans le secteur des éditeurs…
Quelles thématiques se dégagent de cette édition ?
En dehors de la photographie historique et de la représentation des scènes nationales (Ecole d’Helsinski, photographie japonaise ou avant-garde d’Europe centrale), on peut dégager quelques thématiques autour du corps et de l’identité, une photographie engagée documentaire et politique, ou traitant des mutations écologiques, ou encore de l’image transformée qui nous séduit par son unicité.
La visibilité des femmes photographes est au coeur de vos préoccupations, comment cela se traduit-il ?
Lorsque nous avons créé Elles x Paris Photo il y a 5 ans en partenariat avec le Ministère de la Culture, la représentativité des artistes femmes était de 20% sur la foire. Elle est aujourd’hui d’un tiers, grâce à l’engagement de tous, des galeries en premier lieu, qui ont bénéficié d’une visibilité particulière sur un parcours dédié, mais aussi d’un.e commissaire qui a transmis un regard et une sensibilité particulière. Kering/Women in Motion soutient ce programme avec vigueur, et en cohérence avec ses autres engagements, à Arles comme à Cannes. Elles x Paris Photo est largement relayé par un ensemble d’acteurs engagés sur le long terme.
Au niveau des galeries participantes quelle est la répartition entre galeries françaises et internationales ?
Nous avons cette année 134 galeries dans le secteur principal, dont 41 galeries françaises, 24 américaines, 16 allemandes, 8 anglaises, ce qui représente une couverture internationale de 70%, en progression par rapport à l’année dernière où selon le contexte post-pandémie. Sur Curiosa, 81% des galeries présentant un solo show sont internationales, et quant aux éditeurs 13 d’entre eux sont français, ce qui laisse 2/3 des stands aux éditeurs internationaux.
Holly Roussell est la commissaire invitée du secteur Curiosa : en quoi son regard vous inspire-t-il ?
Holly Roussell est commissaire au Centre d’art contemporain UCCA de Pékin. Elle a beaucoup travaillé en Asie et apporte un regard différent autour de la mise en lumière de l’interdisciplinarité des pratiques artistiques basées sur l’image ainsi que les explorations photographiques dans et au-delà des genres traditionnels du médium. Sa section est basée autour de trois axes : les approches expérimentales et conceptuelles de la construction de l’image, les nouveaux (auto)portraits interrogeant l’histoire personnelle et l’intersectionnalité et les pratiques actuelles de la photographie de paysage. A noter que 13 des 16 projets présentés le sont par des galeries internationales.
Federica Chiocchetti préside cette année aux choix de Elles x Paris Photo, quelle est la genèse de cette invitation ?
Nous avions commencé à travailler avec Federica en 2020 avant que l’édition ne soit annulée pour cause de pandémie. Federica est écrivaine, commissaire d’expositions, éditrice et conférencière spécialisée en photographie et littérature, historique et contemporaine, elle a travaillé avec des musées internationaux, des collections privées et ses recherches sur les femmes dans la photographie ont été présentées sous de multiples formes. C’est une personnalité internationale qui apporte son regard, complémentaire de nos précédentes commissaires sur Elles x Paris Photo, et enrichissant pour la foire, tout associant les éditeurs à son parcours pour la première fois cette année.
Peut-on parler d’un retour à la normale – période pré-Covid pour le secteur ?
Absolument et cela se traduit notamment par le retour des galeries américaines. La situation reste toutefois encore tendue pour l’Asie, et l’augmentation drastique des coûts de transport est un frein pour certains exposants. Paris bénéficie de surcroît d’une énergie considérable grâce à la présence des institutions muséales, fondations, et des galeries internationales qui continuent à venir s’y implanter. Ce phénomène bénéficie à l’ensemble de l’écosystème, et permet à nos visiteurs venant de l’étranger d’optimiser leur séjour grâce à des propositions complémentaires en ville, recensées via notre programme « A Paris pendant Paris Photo » qui attire toujours plus les passionnés et curieux.
Quelles femmes créatrices vous inspirent ?
D’une façon générale, toutes les femmes engagées et qui ont dû se battre pour des avancées sociétales, pour faire entendre leur voix, en dépit des risques qu’elles prenaient ou d’un environnement précaire. Quel courage que ces combats menés par Simone Veil, Aretha Franklin, Simone de Beauvoir, Gisèle Halimi et tant d’autres.
Dans le domaine des arts visuels, je suis très admirative des artistes dont le travail est engagé, déterminé à faire bouger les lignes, à faire prendre conscience, à donner une voix. Camille Claudel, Dorothea Lange, Niki de St Phalle, Louise Bourgeois, Agnès Varda, Marina Abramovic ont poussé les limites, parfois jusqu’à l’extrême, elles ont montré un courage et une détermination absolue pour leur œuvre.
Quels ont été les accélérateurs de votre parcours ?
La chance de pouvoir reprendre des études « sur le tard » pour mieux m’accomplir dans un environnement qui me passionnait depuis toujours, et alors que j’œuvrais chez LVMH depuis 7 ans. Une fois ma licence en Histoire de l’art à la Sorbonne et mon diplôme de l’Ecole du Louvre en poche, la possibilité de faire un an de stage dans le département contemporain chez Artcurial m’a permis d’être au plus près des œuvres et de nouer de solides amitiés. Enfin, la direction du PAD à Paris et à Londres m’a familiarisé au monde des salons. C’est en prospectant pour créer un salon à Los Angeles que j’ai eu la chance de me rendre à la 1ère édition de Paris Photo Los Angeles, d’y rencontrer les équipes et d’en mesurer le potentiel.
Infos pratiques :
Paris Photo
du 10 au 13 novembre
Grand Palais Ephémère
Place Joffre, 75007 Paris France
Tarifs
30/15 €