Pavillon Luxembourg, EXPO 2020 DUBAÏ @METAFORM Architects
Circonstances exceptionnelles, c’est depuis Dubaï que notre entretien avec Kevin Muhlen s’est organisé. Co-commissaire du Pavillon du Luxembourg pour l’EXPO 2020 DUBAÏ le directeur du Casino Luxembourg nous dévoile le projet innovant proposé en regard de la thématique générale «Connecting Minds, Creating the Future» autour d’une sélection de 8 artistes aux profils variés (danse, musique, théâtre..).
Le Casino qui expose actuellement le duo d’artiste Karolina Markiewicz et Pascal Piron rencontrés précédemment (relire interview), consacrera son exposition du printemps à Fabien Giraud et Raphaël Siboni, (avril-septembre 2022) puis donnera carte blanche à Adrien Vescovi (octobre 2022 – janvier 2023).
De plus le Casino a repris un nouveau lieu baptisé Casino Display qui a pour vocation la promotion de la très jeune création régionale en lien avec 4 écoles supérieures d’art (ÉSAL – École supérieure d’art de Lorraine, Metz/Épinal ; ENSAD – École nationale supérieure d’art et de design, Nancy ; HEAR –Haute École des arts du Rhin, Strasbourg/Mulhouse ; HBKsaar – Hochschule der Bildenden Künste Saar, Saarbrücken). L’ambitieux projet Woven In Vegetal Fabric: On Plant Becomings de Charles Rouleau prend la forme d’un forum ouvert à différentes personnalités autour du devenir végétal. Casino Display accueillera son 2ème artiste en résidence de mars à septembre 2022 : Lynn Klemmer. Enfin le Casino est partenaire du projet Ecole Offshore mené par l’ENSAD Nancy dans le cadre de Esch2022, Capitale Culturelle Européenne.
Une feuille de route pour 2022 particulièrement ambitieuse et prospective que nous détaille Kevin Muhlen qui a répondu à mes questions.
Quel bilan faites-vous de l’année 2021 ?
2021 n’a certainement pas été une année facile. La première partie de l’année a été très impactée par les renforcements des mesures sanitaires et la complexité de tenir une programmation dans un contexte qui change de mois en mois.
Nous avons dû nous adapter, réorganiser notre programme et nos événements en fonction tout en espérant que le public continue à nous suivre malgré ces difficultés.
Dans le cas de l’exposition L’homme gris, sous le commissariat de Benjamin Bianciotto, nous avons réussi à profiter d’une situation qui s’avérait difficile au premier abord. En effet, l’exposition a été prolongée à deux reprises : une première fois suite à une fermeture du Casino entre décembre 2020 et janvier 2021, et une seconde fois suite à l’impossibilité de prévoir un montage et un vernissage d’une autre exposition au mois de mars 2021.
Cette prolongation jusqu’en juin 2021 nous aura au final permis de développer tout un programme de performances, de projections et de conférences autour de l’exposition. De par sa richesse conceptuelle et la réactivité de Benjamin Bianciotto, l’exposition s’est poursuivie en déployant tout son potentiel et en permettant ainsi au public de découvrir de nouveaux angles de lecture et d’interprétation.
En 2021, la Triennale Jeune Création – BraveNewWorldOrder a aussi fait partie des points forts en termes des projets artistiques. Initialement prévue en 2020 mais reportée à 2021 suite à la crise sanitaire, elle s’est finalement tenue en été 2021. Le travail avec une quarantaine d’artistes ainsi qu’une exposition répartie sur deux lieux (le Casino et les Rotondes) a permis de donner un véritable effet de relance au dynamisme artistique et culturel.
2021 fut finalement une année où l’on a senti un besoin de sortir de la léthargie provoquée par l’année 2020. Faire revivre le Casino en s’adaptant aux conditions tout en faisant preuve de créativité, de flexibilité et d’ouverture s’est avéré être un positionnement qui a motivé et séduit tant le public que les artistes et commissaires avec lesquels nous avons travaillé.
Casino Display : concept, programmation, résidences..
En février 2021 nous avons ouvert ce second lieu : le Casino Display, situé au cœur de la vieille ville non loin du Casino Luxembourg.
Cette ancienne galerie du ministère de la culture a d’abord été rénovée pour se transformer, sous l’égide du Casino, en lieu de recherche et d’expérimentation artistique.
L’idée derrière le Casino Display est de proposer un lieu qui se détache de tout impératif en termes d’ouverture au public, de fréquentation et de calendrier de programmation. Le Casino Display vient combler un manque d’espaces à disposition de la très jeune création au Luxembourg. Après une véritable inflation institutionnelle ces vingt dernières années, notre constat a été qu’il serait nécessaire de proposer un lieu qui vivrait au jour le jour avec les artistes et collectifs qui en prennent possession pour une certaine durée. Celle-ci peut varier de quelques jours à plusieurs mois en fonction du projet.
En 2021, nous avons donc accueilli un artiste en résidence de février à juillet 2021 : Andrea Mancini. Cette résidence était l’occasion pour lui d’approfondir ses recherches artistiques tout en investissant un lieu et en occupant les espaces ponctuellement avec ses recherches. L’artiste définit sa résidence et libre à lui de proposer une exposition ou pas au cours de celle-ci. Le Display a aussi accueilli une commissaire associée – Nadina Faljic – durant 9 mois.
Sur des périodes plus courtes, des workshops et groupes de travail de l’ESAL de Metz ont eu lieu au Casino Display.
Le développement des relations entre le Casino et les écoles d’art de la région fait partie intégrante du projet Casino Display. Actuellement, nous sommes en train de travailler à la mise en place d’un programme de collaboration dans lequel le Casino Display deviendrait un module à part entière dans le programme pédagogique des écoles partenaires. Sur le long terme nous souhaitons ainsi poser les bases d’une école d’art au Luxembourg.
Co-Commissaire du Pavillon Luxembourgeois pour Expo 2020 Dubaï quelles réflexions avez-vous développé autour de ce que vous définissez comme un certain ‘ Zeitgeist ’ de la création contemporaine ?
Les débuts de ce projet remontent à 2017 déjà. La participation du Luxembourg à l’EXPO 2020 étant confirmée, la question de la représentation de la culture s’est rapidement posée et j’ai été invité à faire partie du groupe de travail à ce sujet.
Pour les arts visuels je souhaitais encourager le travail collectif, la mise en relation d’artistes qui habituellement travaillent seuls et voir quel potentiel pourrait être déployé dans une situation collective.
Après quelques discussions, l’idée a été avancée d’appliquer ce concept au secteur culturel de manière plus vaste et de faire collaborer des plasticiens, designers, chorégraphes, auteurs, acteurs, réalisateurs et musiciens en vue d’un projet pour Dubaï.
Ce n’est pas un projet facile. Les artistes ont leur agenda, leurs engagements respectifs et il aura fallu beaucoup de temps pour permettre la rencontre et ensuite la collaboration. Mais les artistes impliqués ont développé un vrai sens du groupe, du collectif. Même s’ils ne cosignent pas toutes les œuvres, ils sont impliqués – de près ou de loin.
Là l’exposition va ouvrir à Dubaï la semaine prochaine. Ce sera le point culminant de cette aventure certes, mais aussi le début de nouvelles réflexions autour de la présentation des créations au Luxembourg. Il s’agit de faire vivre les œuvres et le collectif après Dubaï car le but n’était pas de simplement faire collaborer des artistes sur une durée déterminée. L’idée était réellement de provoquer la collaboration et faire naître des associations qui pourraient se prolonger dans le temps – avec ces artistes ou en ouvrant le ‘collectif’ à de nouveaux intervenants.
Fabien Giraud et Raphaël Siboni : le nouveau projet pour le Casino, entre prolongation et disruption
Cela fait près de 10 ans que je suis ces artistes. Le Casino les a accompagnés dans leur projet The Unmanned dès le début. Ils ont fait le pari de laisser derrière eux toutes leurs œuvres et créations passées pour se consacrer entièrement à The Unmanned. Nous avons produit les premières œuvres et organisé une exposition qui lançait en quelque sorte The Unmanned en 2014. Quatre ans plus tard, et de nombreuses co-productions plus tard également, nous avons fait une seconde exposition avec les artistes au Casino. The Unmanned avait évolué, s’était développé dans son corpus et son propos et c’était passionnant de voir et de partager cette évolution avec le public. Là où en 2014 tout cela semblait encore très abstrait et nouveau, en 2018 les choses devenaient plus claires tout en se complexifiant de manière passionnante.
Mais je ne voulais pas m’arrêter à mi-chemin. Cette collaboration démarrée en 2012 était destinée à être sur le long terme. L’engagement pris par les artistes sur The Unmanned, le Casino l’a pris sur l’accompagnement et le soutien du projet.
C’est donc tout naturellement que nous abordons maintenant cette troisième en 2022 qui représente la fin d’un premier cycle. Une fois de plus les formes ont évolué, les concepts se sont diversifiés pour créer un ensemble cohérent. Certes il se clôt, mais cette fin implique un nouveau départ et on ne sait pas où cela va nous mener. C’est là toute la force qui anime cette collaboration.
Adrien Vescovi : origine de cette carte blanche et comment va-t-elle se traduire ?
C’est ma collègue Stilbé Schroeder qui a invité Adrien Vescovi. Elle le suit et échange avec lui depuis quelques années maintenant et le moment était juste pour l’inviter à développer un projet pour le Casino.
Au Casino nous cherchons constamment à renouveler les propos, à présenter des approches inédites qui viennent se mesurer à l’architecture du bâtiment mais aussi compléter, voire contredire des projets présentés dans le passé.
C’est une continuité que nous composons au fur et à mesure de nos réflexions, rencontres et échanges. Souvent c’est guidé par notre intuition ; mais celle-ci s’accompagne de discussions qui définissent le bon moment pour présenter tel·le ou tel·le artiste. Ce fil rouge de notre programmation n’est peut-être pas flagrant mais il est bel et bien présent si on revient sur nos expositions et que l’on met en parallèle les programmations des années passées. Des liens apparaissent et c’est à chaque fois un plaisir de refaire le parcours pour trouver des correspondances qui n’étaient pas évidentes dès le départ. Chaque exposition et projet vient redéfinir ce tracé.
Quant à Adrien Vescovi, il travaille actuellement sur sa proposition. Il est encore un peu tôt pour en parler.
L’Ecole Offshore en partenariat avec l’ENSAD Nancy : enjeux et perspectives
Comme je le disais plus haut, cette collaboration s’inscrit dans le projet Casino Display et notre volonté de développer nos liens et notre implication avec les écoles d’art de la région. L’ENSAD de Nancy respectivement l’Ecole Offshore avaient un projet pour ESCH2022, capitale européenne de la culture, et ils cherchaient un partenaire institutionnel qui pourrait leur offrir tant un cadre auquel se rattacher mais aussi avoir des espaces dans lesquels ils pourraient se rassembler, expérimenter avec les formes en vue de leur projet final qui sera présenté en 2022.
C’est pour le Casino une belle occasion de découvrir activement les enjeux de l’Ecole Offshore et de rencontrer les jeunes artistes qui font partie de cette édition 2022 tout en entrant en dialogue avec l’ENSAD et les professeurs et intervenants qui encadrent ce projet.
Nous espérons que cela permettra de penser la suite ensemble en faisant converger nos objectifs et perspectives respectives.
En savoir plus :
Le Luxembourg à EXPO DUBAÏ :
Le thème du pavillon luxembourgeois, créé par METAFORM Architects, est « Resourceful Luxembourg ». Le design est basé sur l’idée du ruban de Möbius, forme infinie symbolisant l’ouverture et le dynamisme du pays.
Le Luxembourg à l’EXPO 2020 DUBAI – Luxembourg @ EXPO 2020 DUBAI (luxembourgexpo2020dubai.lu)
Le concept et les artistes :
Les actualités du Casino Luxembourg :
En cours :
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KAROLINA MARKIEWICZ & PASCAL PIRON
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