Delphine Dumont, PhotoBrussels Festival 06 : « On ne peut aborder la thématique de la forêt et de la biodiversité sans engager des pratiques plus vertueuses de la photographie »

Jaakko Kahilaniemi, Next Possible Victims de la série 100 Hectares of Understanding, 2018 © Jaakko Kahilaniemi

L’exposition phare et l’épicentre du 6ème PhotoBrussels Festival, In the Shadow of Trees (Hangar) offre un panorama fascinant sur les enjeux planétaires liés à nos forêts et le Festival comme à son habitude, essaime dans toute la ville de Bruxelles dans les galeries, centres d’art, lieux insolites (un garage cette année avec le collectif Ada Ventura !) …autour d’une quarantaine de propositions que nous détaille Delphine Dumont, directrice de Hangar qui compte de nouveaux partenaires. En lien avec cette thématique retenue, elle milite pour un Hangar plus éco-responsable. Plusieurs des 20 artistes retenus ont accepté de jouer le jeu aux côtés des fournisseurs.

La ruche du Hangar n’en finit par de fourmiller d’idées et le récent Parrathon belge de Martin Parr a été un énorme succès malgré les contraintes sanitaires et les jauges. Delphine Dumont revient sur l’Adn d’un lieu à taille humaine qui a su imposer une vision et compte de plus en plus d’adeptes. Elle a répondu à mes questions en exclusivité à quelques heures de l’ouverture de cette 6ème édition très attendue.

In the Shadow of Trees : genèse du projet

Pour revenir à l’historique : PhotoBrussels Festival créé il y a 6 ans, compte une exposition principale au Hangar et un parcours dans la ville.

In the Shadow of Trees est l’exposition curatée par l’équipe du Hangar pour cette édition 2022 à laquelle s’ajoute le Festival Tour réunissant une quarantaine d’expositions annexes pas forcément en lien avec notre thématique.

En ce qui concerne la genèse nous avons souhaité revenir à notre thème initial « Loving Earth » autour de la nature, un vaste sujet que nous souhaitions cerner davantage. Au mois de juin, a émergé assez vite la thématique de l’arbre, que nous souhaitions aborder sous un angle dynamique et non monotone. Au fil des mois nous nous sommes aperçu que les propositions étaient très riches et diversifiées.

Enrique Ramirez, visuel du film
Jardins migratoires, 2021© Enrique Ramirez

Parti pris scénographiques et parcours 

Nous avons mis en avant deux aspects, d’une part réaliser notre propre curation à partir d’artistes que nous avions déjà repérés et d’autre part, lancer un appel à projets. Notre sélection de 20 artistes comprend dès lors 17 artistes de notre sélection et 3 issus de l’appel à projets lancé en septembre.

Qu’est ce qui se dégage de ce panorama ?

De ce panorama se dégage différentes tendances même si l’arbre a toujours fasciné les artistes et ce, depuis la nuit des temps et l’invention même de la photographie comme nous l’illustrons à travers quelques tirages d’époque prêtés par le Musée de la photographie de Charleroi. Cette catégorie d’artistes photographes qualifiés de portraitistes de l’arbre s’intéressent au sujet arbre presque en tant qu’individu. Puis nous couvrons jusqu’à la photographie documentaire, cette thématique engageant nécessairement une réflexion autour de l’écologie et notamment de la déforestation dans le prolongement de la Cop26 qui a mis l’accent sur la survie de nos forêts.  Des projets qui nous permettent de voyager à travers toutes les forêts du monde et de mieux prendre conscience des défis majeurs d’aujourd’hui.

Edward Burtynsky, Natural Order
#22. Grey County. Ontario. Canada,
2020 © Edward Burtynsky, Courtesy of Flowers Gallery, London & Nicho-las Metivier Gallery, Toronto.

Engager des pratiques plus vertueuses de la photographie

En écho à la thématique du Festival, nous avons tenu à amorcer une réflexion avec l’ensemble de nos fournisseurs, qui je précise, sont tous basés à Bruxelles, sur des pratiques plus vertueuses de la photographie. L’ensemble des artistes a également accepté de prendre le risque et d’expérimenter des tirages sur papier 100% écologique avec un contre collage sur du bois et non sur dibond, très polluant. Cela participe d’une dynamique générale plus éco-responsable pour le Hangar.

Les lauréats du Prize, lancé en septembre 2021 : critères…

Le prix est destiné aux artistes résidant en Europe, selon la zone d’action de l’appel à projet. Les critères et pré-requis sont comme souvent un statement, un porfolio…examinés par un jury international constitué cette année de : Galila Barzilai Hollander, Christian Caujolle, Delphine Dumont, Gaelle Gouinguené, Nick Hannes et Rodolphe de Spoelberch.

Les trois projets sont très différents.

L’artiste hongroise Kíra Krász que nous avions repéré l’année dernière a postulé de nouveau avec un projet extraordinaire autour de l’analogie qu’elle dresse entre l’arbre de nos forêts et l’arbre de nos maisons, ces cabanes de notre enfance. Une approche naïve et très subtile.

Kíra Krász, série A Living Sense of Home, 2021 © Kíra Krász

L’artiste français Benjamin Deroche se penche sur le phénomène de la sylvothérapie, ce bien-être ressenti au contact des arbres et leur faculté de guérison.

L’artiste chinois Yutao Gao a symboliquement été se recueillir auprès d’un pêcher en fleurs après la mort de son grand-père. Il scanne cet arbre et ses branches roses dans une forme de ruban à l’occasion de cette cérémonie d’adieu.

Stijn Cole, Souvenirs, Irene Laub gallery

Le Festival Tour : les temps forts et partenaires

Même si nous avions des contraintes particulières en cette période, contrairement aux grandes institutions qui ont du revoir leur programmation, le Hangar plus petit, offrait d’avantage de souplesse.

Une quarantaine de lieux très divers exposent la photographie pendant le Festival à Bruxelles. En ce qui concerne les galeries nous avons un large panel de belles galeries comme Almine Rech qui nous rejoint cette année. Citons également la galerie Nathalie Obadia qui dévoile de manière inédite des photographies d’Agnès Varda sous le commissariat de sa fille Rosalie ou Irène Laub qui expose l’artiste belge Stijn Cole qui retranscrit les variations du temps et de la lumière sur des paysages naturels à l’aide d’expérimentations numériques. Les galeries belges ont également répondu présent comme l’Enfant Sauvage, jeune galerie très dynamique qui expose Quentin Yvelin, fasciné par la nature et le mysticisme.

La Fondation A Stichting, nouveau partenaire cette année, ouvre au même moment que le Festival une exposition dédiée à l’emblématique Helen Levitt. 

Martin Parr, retour et bilan de ce « Parrathon » belge hors normes

Nous n’avons pas eu à modifier le calendrier de l’exposition qui s’est déroulée entre septembre et décembre 2021. Cela a été un défilé permanent de visiteurs du début à la fin de l’exposition et les dernières semaines ont été très intenses. Malgré les demandes, nous ne pouvions pas prolonger l’exposition. Ce qui a été en revanche un peu frustrant était le respect de la jauge qui nous a conduit à refuser certains visiteurs. Je n’ai pas encore les chiffres définitifs mais nous devrions totaliser 18 000 visiteurs, ce qui pour Bruxelles est énorme.

Relire mon précédent entretien avec Delphine Dumont en septembre 2021 (lien vers)

Infos pratiques :

In the Shadow of Trees,

PhotoBrussels Festival 06

Festival Tour : plan, agenda..

Hangar

Pl. du Châtelain 18, 1050 Ixelles

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21 janvier- 26 mars

Covid Safe Ticket

PhotoBrussels Festival — Hangar

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