Palais de Tokyo : Miriam Cahn, la polémique et Exposé.es

Miriam Cahn, Fuck Abstraction

C’est le journaliste Karl Zéro qui a mis le feu aux poudres sur Twitter soulignant le caractère pédocriminel de l’oeuvre Fuck Abstraction de l’artiste suisse de 71 ans Miriam Cahn, soit une silhouette poings liés qui se livre à une fellation forcée sur un homme tandis qu’une autre forme est également maintenue sous la domination. Soulignant le mode de finacement en partie public du Palais de Tokyo et le nombre de visiteurs scolaires pouvant être choqués, ainsi que des victimes de viols, l’ex animateur de Canal + a fait le buzz en générant un très grand nombre de réactions suivies d’une pétition à destination de la Mairie de Paris et du Palais de Tokyo, signée par plus de 5000 personnes, demandant le retrait des toiles de cette série que l’artiste rattache aux crimes de guerre. « Ce ne sont pas des enfants. Ce tableau traite de la façon dont la sexualité est utilisée comme arme de guerre ». déclare t-elle. Le contraste entre les deux corps figure la puissance corporelle de l’oppresseur et la fragilité de l’opprimé agenouillé et amaigri par la guerre ». 

Le Palais de Tokyo a rapidement publié un communiqué – (13) Palais de Tokyo sur Twitter : « Exposition de Miriam Cahn : le tableau « fuck abstraction ! » qui représente des adultes est une dénonciation des crimes de guerre. Communiqué de presse du 7 mars 2023 ⤵️ https://t.co/OgjOWld5fp » / Twitter expliquant qu’un dispositif de médiation spécial a été mis en place pour remettre l’oeuvre dans son contexte : la guerre en Ukraine à travers un panneau planté à l’entrée du parcours. Non pas transgresser mais dénoncer telle est la démarche de l’artistes qui depuis 50 ans se penche sur le sort des réfugiés et victimes de conflits, développe l’institution parisienne. Une réalité brute et crue dans un flux ininterrompu d’images aux couleurs fluorescentes, comme dans une performance souligne l’artiste. En attendant, le Palais de Tokyo n’a pas souhaité fermer l’exposition sour la pression des censeurs : « la représentation artistique de la violence peut générer [des] malentendus ».

Opportuniste ou sincère Karl Zéro ? Cela renvoie à d’autres polemiques comme celle du plug anal géant de Paul McCarthy place Vendôme, Anish Kapoor et le Vagin de la Reine à Versailles. L’histoire se répète et gare à celui qui ne sait pas y prêter l’oreille…

Une mauvaise publicité en tous cas pour le Palais de Tokyo dont la gestion est pointée du doigt par la Cour des Comptes.

Les Ami·e·s du Patchwork des noms, Patchwork n°21, 2017, courtesy of association des Ami·e·s du Patchwork des noms © François Doury

Exposé.es : ce que l’épidémie de sida fait aux artistes 

Avec Exposé.es il s’agit de traduire en exposition le combat héroïque des artistes face à l’épidémie du VIH/sida à partir du livre d’Elisabeth Lebovichi Ce que le sida m’a fait. Art et activisme à la fin du XXsiècle, depuis la génération Act Up jusqu’à aujourd’hui. La question de la non visibilité des femmes touchées par le virus, de la mémoire, de l’archive, de l’urgence à créer, de la pulsation de vie et de désir, du genre, de classe, sont parmi les notions abordées dans une approche à la fois militante et artistique, la frontière entre les deux étant souvent porreuse.

Lili Reynaud-Dewar, My Epidemic (Teaching Bjarne Melgaard’s Class), 2015, courtesy of ADAGP © Blaine Campbell

Des pratiques de résilience, de catharcis, de rituels ayant pour vecteur la survie et la beauté, entre Hervé Guibert, Deek Jarman -l’on se souvient de la remarquable exposition de Claire Le Restif au Crédac-, Michel Journiac, Felix Gonzalez Torres ou Nan Goldin mais aussi les Body Maps des femmes séropositives de Cap Town, le collectif lesbien new yorkais fierce pussy et l’architecture queer de Philippe Thomas.

Sans jamais tomber dans le pathos,une exposition à fleur de peau et d’émotion entre le doute, la souffrance, la perte.

Infos pratiques :

Exposé.es

Miriam Cahn Ma pensée sérielle

Jusqu’au 14 mai

https://palaisdetokyo.com/