Numa Hambursin, MO.CO. Montpellier Contemporain : « L’art contemporain est un sport de combat et Immortelle en est la vibrante illustration »

Vue de l’exposition Immortelle MO.CO. Montpellier Contemporain photo Marc Domage

Non la peinture n’est pas morte, elle est belle et bien vivante et n’a jamais cessé de produire des chefs d’œuvres comme le martèle Numa Hambursin, directeur MO.CO Montpellier-Contemporain, qui entend réécrire cette histoire de la peinture en France, entre la période de bannissement d’une première génération née dans les années 1970 sous la coupe Duchampienne et une nouvelle renaissance des années 1980 à nos jours. Répartie en deux volets aux contours volontairement fluides, avec pour ligne de crête les années 1980, ce sont au total plus de 400 œuvres de 122 artistes réunis, et de façon exceptionnelle sur les deux sites principaux du MO.CO. Une ambition qui s’explique par la puissance et la démesure d’un medium qui interroge la notion même de sublime à travers de multiples strates de temps et d’histoire dans un renouvellement constant. Immortel. Numa Hambursin a répondu à mes questions avec la passion qui l’anime pour un projet à l’épicentre de son parcours.

Cette exposition fait écho à l’un de nos premiers échanges autour de votre révélation pour l’art devant les chefs d’œuvres du Prado découverts à l’âge de 13 ans, est-elle bel et bien un manifeste que vous portiez depuis un long moment ?

Tout à fait et le mot manifeste est très juste. L’idée est de célébrer la vitalité ininterrompue de la peinture en France et sa capacité à  inscrire le présent dans la perspective du temps long et ralenti qui est le propre de l’art. Je m’étonne que d’autres institutions ne se soient pas attelées à la tâche avant nous.  Cela s’explique sans doute par cette histoire de rejet de la peinture française entre les années 1990 à 2010, qui concerne la génération née dans les années 1970. Une génération qui affirme un goût pour la peinture figurative et la place de la figure humaine avec des artistes comme Robert Combas, Hervé Di Rosa ou Marc Desgrandschamps  et Djamel Tatah. La génération suivante entre le début des années 1980 et 1990, jouit d’un moment de reconnaissance de par la résistance de ses ainés. Je me trouve par mon année de naissance – 1979- à la croisée de ces deux générations que j’expose. La première des années 1970 au début des années 1980 à qui je voulais rendre hommage est exposée au MO.CO et la suivante à partir de 1983 à nos jours, à la Panacée.

En quoi Immortelle s’inscrit-elle dans le prolongement direct de vos choix et parcours ?

Ce projet Immortelle s’inscrit pleinement dans mon histoire. A mon arrivée dans l’art contemporain alors âgé de 23 ans, on m’a sommé de choisir entre l’art contemporain et la peinture. J’ai affronté des quarantenaires bien installés et je me suis retrouvé paradoxalement  dans la position du vieux qui aimait la peinture ! Je me suis alors totalement identifié à cette génération que j’ai beaucoup présentée au fil des années avec l’idée de proposer un jour une exposition d’ensemble dans un lieu emblématique. Même s’il y a eu quelques expositions organisées, elles concernaient toujours des familles d’artistes selon certains goûts. Il n’y avait pas eu cet effort engagé sur la durée.

Nazanin Pouyandeh, Nu au mimosa, 2020 Huile sur toile courtesy the artist & Sator galerie

Et l’on se souvient de votre exposition de Jonathan Meese au Carré Sainte Anne en 2017

L’Allemagne, pays de l’artiste, apparaissait d’ailleurs pour nombre de ses artistes pionniers comme un idéal dans lequel la peinture avait droit de cité, ce qui n’était pas le cas en France. Beaucoup se sont d’ailleurs exilés à cette période. Il ne fait pas partie du panorama, mon focus étant principalement la scène française dans une lecture large du terme, c’est-à-dire d’artistes installés et travaillant en France comme Oda Jaune ou Nazanin Pouyandeh par exemple.

Vous vous êtes entouré de deux commissaires : Amélie Adamo commissaire invitée pour le MO.CO et avec Anya Harrison, curatrice au MOCO, pour la Panacée

Même si ce projet me tenait particulièrement à cœur, je ne voulais pas pour autant tomber dans une démarche totalement subjective, autour d’artistes qui me sont proches comme cela a pu être fait auparavant. Il me fallait être en capacité de me confronter à des regards extérieurs pour tendre vers une exigence d’exhaustivité ; même si l’expérience prouve qu’elle reste toujours imparfaite.  

Antoine Roegiers, La Traversée du ballon,  huile sur toile / oil on canvas croutesy the artist & Suzanne Tarasiève Paris

Comment avez-vous fait la sélection ?

Nous avons procédé à partir d’une liste commune puis par faisceaux d’indices à partir des propositions que nous ont faites les artistes eux-mêmes sur notre suggestion.

Qu’est ce qui ressort d’un tel panorama ?

Nous avons d’une part la génération résistante et la génération suivante, triomphante, selon les termes que j’ai choisis. Cela s’explique pour les premiers par le contexte très difficile auquel ils vont devoir faire face. Ils vont se retrouver exclus, marginalisés des réseaux en vigueur comme des mauvaises herbes qui poussent de manière assez chaotique pour employer une image parlante. Cela donne lieu à des propositions très singulières engageant beaucoup de matière, une vision assez romantique et spectaculaire de la peinture autour de sujets très empreints de l’histoire de l’art, sans aucune limite. La génération suivante est peu consciente de cette histoire, dont elle n’a pas eu à affronter les enjeux. Des artistes d’une efficacité décomplexée qui accèdent rapidement à une notoriété internationale par le bais de stratégies gagnantes.  

Vue de l’exposition Immortelle MO.CO. Montpellier Contemporain photo Marc Domage

Quelle est la représentation des femmes artistes ?

Le seul critère qui nous animait, avec les deux co-commissaires, était la qualité artistique, même si nous avons été par la suite attentifs à cette question de parité. Les femmes et les hommes étant talentueux à part égale, nous parvenons naturellement à un équilibre sans qu’il soit nécessaire de favoriser les uns ou les autres.

Une publication est-elle prévue à cette occasion ?

Le catalogue est publié pour l’occasion par Silvana Editoriale sous la forme d’une anthologie et présentation de chacun des 122 artistes. Y figure également un texte écrit par moi-même et la commissaire invitée.

Quelle programmation en résonance à MO.CO – Ecole des Beaux-arts ?

Nous prévoyons un arc sur la peinture tout au long de l’année avec de nombreuses rencontres et également dans le cadre des « Jeudis MO.CO ». Nous avons reçu Françoise Petrovitch et allons accueillir prochainement  Thomas Lévy-Lasne.

Quel est le bilan des dernières expositions Musées en exil  et Berlinde De Bruyckere ?

J’aime toujours partir des chiffres et ils sont très satisfaisants en ce qui concerne l’exposition de Berlinde De Bruyckere avec une augmentation de 25 % par rapport à l’année précédente. En ce qui concerne Musée en Exil nous observons une augmentation de 42%. La couverture media a été exceptionnelle avec un nombre d’articles supérieur à toute l’histoire du MO. CO. y compris lors de son ouverture.  La réception du public est également très bonne avec sans doute quelques pistes d’amélioration. Le bilan est donc largement positif.

Liste des artistes

MO.CO.

AGRINIER Thomas, AILLAUD Arthur, BARROT Ronan, BATAILLARD Marion, BAZIGNAN Pauline, BELGRAND Adrien, BELIN Murielle, BELYAT-GIUNTA Anya, BENCHAMMA Abdelkader, BENEYTON Julien, BERGER Céline, BERNINI Romain, BIZIEN Vincent, BOISADAN Mathieu, BOITARD Fabien, BOURDAREL Katia, BOUTLIS Alkis, BRESSON Guillaume, BRUNEAU Benjamin, CADIO Damien, CHARLET Marion, CHERKIT Mathieu, CIAVALDINI Sylvain, CLARKE Daniel, DALLÉAS-BOUZAR Dalila, DAVRINCHE Gaël, DESCOSSY Julien, DÉFOSSEZ Benjamin, DERENNE Grégory, DEROUBAIX Damien, DES MONSTIERS Julien, DRIEZ Raynald, DUBOIS Aurélie, FORSTNER Gregory, GOBART Yves, GROOM Orsten, GUINAMAND Cristine, GURRIERI Elsa, HAZELZET Thibault, De HEINZELIN Aurélie, HOFFMAN Karine, IC Hervé Georges, JAUNE Oda, JÉRÔME Sarah, KORICHI Youcef, LEGLISE Frédéric, LESOURD Élodie, LEVASSEUR Iris, LÉVY-LASNE Thomas, LIRON Jérémy, LOUTZ Frédérique, MASMONTEIL Olivier, MÉRELLE Fabien, MIN Jung-Yeon, MIRAZOVIĆ Filip, MIQUELIS Gilles, MOCQUET Marlène, MOLK Marc, MOSTYN-OWEN Orlando, NAVARRO Edgardo, NAVI Barbara, NERVI Audrey, NIELSEN Eva, OBRECHT Florence, PAHLAVI Axel, PASIEKA Simon, PENCREAC’H Stéphane, PICANDET Lucie, PINARD Guillaume, POUYANDEH Nazanin, PRADALIÉ Abel, PROUX Laurent, RABUS Leopold, RABUS Till, RENAUD Brann, REYMOND Florence, RICOL Raphaëlle, ROEGIERS Antoine, ROUGIER Karine, SABATTÉ Lionel, TABOURET Claire, TOUMANIAN Guillaume, TURSIC Ida et MILLE Wilfried, VELK Marko, VERNY Thomas, VIDOR Vuk, VRANKIĆ Davor, XIE Lei, ZONDER Jérôme.

MO.CO. Panacée

BAILLY-BORG Carlotta, BARBERAT Rose, BARCELÓ Marcella, BLANC Mireille, CAILLE David, CANESSON Corentin, CAPRON Hugo, CHÉN Xuteng, CLARACQ Jean, CZERMAK ICHTI Neïla, DAL-PRA Diane, DI FOLCO Inès, FLORA Alison, GARCIA-KARRAS Laura, HADDAD Miryam, HAMDAD Bilal, HASCOËT Charles, HERBELIN Nathanaëlle, LEFEBVRE Oscar, MARQUE BOUARET Mathilda, MARTIN Simon, MIRABEL Johanna, RICCIARDI Pacôme, RIVRAIN Cédric, SAFA Christine, SANCHEZ Milène, SARTOR Louise, SHATBERASHVILI Elené, SIVERTSEN Johannes, SOKOL Apolonia, VAGUELSY Gaétan, VENTURA Romain, YASMINEH Rayan.

Catalogue de l’exposition

Bilingue français-anglais par Silvana Editoriale

Disponible à la vente à la boutique-librairie du MO.CO.

Infos pratiques :

IMMORTELLE
Vitalité de la jeune peinture figurative française

Commissariat général : Numa Hambursin, directeur général MO.CO.


MO.CO.

co-commissaire invitée : Amélie Adamo

du 11 MARS au 4 JUIN

Adresse

13 rue de La République, Montpellier (à quelques pas de la gare Saint Roch)


MO.CO. Panacée

co-commissaire : Anya Harrison, curator MO.CO.

du 11 MARS au7 MAI 202

Adresse

14 rue de l’Ecole de Pharmacie, Montpellier

https://www.moco.art/fr