Solène Rigou, Autoportrait arlequin courtesy the artist, Galerie C
Carine Tissot, directrice générale de Drawing Now Art Fair, lors d’un récent interview (relire) à l’occasion de l’annonce du partenariat avec le Salon du dessin confortant Paris comme capitale du dessin, nous dévoilait les points forts de cette 15ème édition.
Au-delà des 72 galeries internationales particpantes et des deux platesformes de découvertes, l’exposition Hyper Drawing conçue par la directrice artistique de la foire : Joana Neves en partenariat avec le Frac Picardie autour des notions de protocole et de performance, est l’un des temps forts de la visite.
Le Prix Drawing Now 2022 est décerné à Karine Rougier, représentée par la galerie Espace à vendre (Marseille). Pas moins de 5 artistes femmes étaient en compétition : Marion Charlet (Paris B), Alice Anderson (La Patinoire Royale – Valérie Bach), Claire Trotignon (galerie 8 + 4) et Kubra Khademi (galerie Eric Mouchet) – ma favorite !
Les dessins de Karine Rougier réinventent une nature où les formes humaines se mêlent aux formes animales, où corps et puissances invisibles s’unissent en une même et envoûtante étreinte. Elle a débuté ses études aux Arts Décoratifs de Genève, puis a continué à l’École supérieure d’art d’Aix-en-Provence, elle enseigne aux Beaux-Arts de Marseille depuis 2018. Elle a représenté Malte à la Biennale de Venise en 2017.
Pour ce 11e Prix Drawing Now, la formule évolue pour donner plus d’envergure et de visibilité à la pratique de l’artiste lauréat et implanter cette récompense comme une bourse d’aide à la création où la sphère Drawing – notamment Drawing Now Art Fair et le Drawing Lab – réunit ses forces pour proposer : 5000 euros de dotation, 10000 euros d’aide à la production, une exposition de 3 mois au Drawing Lab et l’édition d’un catalogue monographique. L’exposition de Karine Rougier sera à découvrir à partir de février 2023 et en même temps que la 16e édition de Drawing Now Art Fair.
Mes Coups de coeur :
Maxime Verdier – Galerie Anne-Sarah Bénichou
J’avais interviewé Maxime dans son atelier de la Drawing Factory (relire), projet impulsé par Carine Tissot et Christine Phal et séduite par son univers fatasmagorique qui depuis a fait la couverture de Baux-arts magazine (dossier spécial dessin).
Mara Fortunatović – Archiraar Gallery (Bruxelles)
Diplômée des Beaux-Arts de Paris je la rencontre autour de l’exposition des Félicités, puis retrouve à l’occasion de la 71ème édition de Jeune Création à Romainville et chez Jacques Deret qui la collectionne. Son rapport au dessin toujours blanc est un rapport au corps et à la sculpture. Elle réalise de nombreuses performances très minimalistes qui défient les apparences du medium, les feuilles de dessin étant en aluminium.
Odonchimeg Davaadori – Backslash (Paris)
D’origine mongole, Odonchimeg Davaadorj s’est confrontée à une nouvelle culture occidentale en partant à l’âge de 17 ans pour la République Tchèque puis la France. C’est certainement cette identité multiple qui lui permet d’exprimer sa perception du monde à travers différents médiums. Elle pratique le dessin, la peinture et la sculpture mais également la vidéo, la performance, la danse, la poésie et plus étonnamment le travail sur le vêtement . Elle explique : « Je pense qu’au bout d’un moment, on sent qu’une œuvre doit sortir. Si c’est un poème, il faut que je l’écrive. Si je n’arrive pas à écrire, il faut que je bouge, que je danse ou que je dessine. » La palette de l’artiste est volontairement restreinte car elle souhaite se concentrer sur le trait. La nudité des corps canalise le regard sur la vérité. De l’essence même de l’être vivant, rien n’est dissimulé. Le trait peut se focaliser sur la représentation des thèmes universels existentiels, l’essence des choses, que chacun partage avec l’autre tout en le vivant à travers ses singularités.
Odonchimeg Davaadorj va bénéficier d’une expositoin personnelle au Domaine départemental de Chamarande.
Hélène Muheim –Galerie Valérie Delaunay (Paris)
Hélène Muheim est une artiste qui s’est d’abord concentrée sur la technique de la peinture. Aujourd’hui elle travaille le graphite, en poudre ou en crayon et les ombres à paupières pour se consacrer à l’art du dessin. Ces ombres colorées interviennent de manière estompée, jouant sur la transparene, la superposition tout en invitant la lumière à parcourtir le papier.
Solène Rigou – Galerie C (Neuchâtel – Paris)
Solène Rigou n’invente rien. C’est elle qui le dit. Cette ancienne élève des Beaux-Arts de Paris qui a fait ses gammes dans les ateliers de Jean-Michel Alberola puis de Stéphane Calais jusqu’en 2020 scrute tout, ausculte les moindres détails et les enferme discrètement dans l’appareil photo de son téléphone. Ces clichés, elle en a des centaines : on y trouve quelques objets et des mains, des mains partout. Des mains au repos après avoir coupé une pomme, d’autres qui tiennent un verre de vin rouge, jouent de la trompette ou sont posées nonchalamment sur un jean fleuri. Un brin obsessionnelle, l’artiste travaille ce sujet depuis plus de quatre ans. « Dessiner les mains c’est dépeindre profondément l’humain », explique la lauréate du 2ème prix du dessin Pierre David-Weill 2022. Pour elle, passer par les mains est une sorte de détour : c’est plus anonyme qu’un portrait classique qui représente un visage, moins intrusif et n’impose pas une expérience ou une présence à celui ou celle qui les regarde. Chacun peut y voir son propre vécu, peut les rattacher à un souvenir, un moment qui lui appartient.
Léo Dorfner – Galerie Claire Gastaud (Clermont-Ferrand Paris)
Figure incontournable de la nouvelle scène de l’art contemporain français, Léo Dorfner a su inventer un nouveau vocabulaire pictural immédiatement identifiable, notamment dans sa façon unique d’appréhender l’aquarelle : il met sa technique classique et virtuose au service d‘une iconographie contemporaine.
« Parce qu’à force de prolifération, les images ont aujourd’hui perdu de leur aspérité, devenues aussi lisses que l’espace virtuel de leur diffusion, Léo Dorfner en propose une lecture punk qui dérange les interprétations trop chastes. Sa réappropriation des représentations médiatiques, des icônes publicitaires, des bribes du quotidien et des mèmes visuels dessine une mythologie rock du contemporain aussi incrédule qu’indiscipliné ». Florent Gaité, Léo Dorfner : Stories from the city
Nathalie Talec – Galerie Maubert (Paris)
Attirée par les pôles et bercée par les récits anciens et modernes des explorateurs tel Paul-Emile Victor, Nathalie Talec crée dès les années 1980 un univers scientifico-fictionnel poétiquement glacé. En quête de pureté originelle et fascinée par l’action du froid, elle expérimente à travers lui, les questions de perception, étudie l’action des phénomènes chimiques ou atmosphériques sur les éléments et laisse se tramer des récits à travers ses dessins, photographies, sculptures, installations, performances ou œuvres sonores.
En plus de ce focus, je remarque Isabelle Ferreira qui bénéficie d’une exposition à la galerie sous le commissariat de Sonia Recasens.
Erick Dietman – Galerie Papillon (Paris)
Artiste touche à tout, l’emblématique série de dessins, collages et objets du quotidien Opus Oh Puce Aux Puces a fait l’objet d’une exposition au Musée des Beaux-arts de Lyon en 2018. Ces 70 feuillets recto verso consitués de mine de plomb, crayon de couleur, encre, pastel, fusain, etc. etc. sont incontournables.
Ruth Marten – Van der Grinten Galerie (Cologne)
Entre surréalisme et fantastique, l’américaine à partir d’emprunts à des estampes anciennes donne à ces portraits des allures ornithologiques dans un herbier dont elle a le secret !
Idris Habib – 193 Gallery (Paris – Venise)
Idris a appris son métier en parcourant le monde. Autoproclamé citoyen du monde, il voyage depuis son enfance et trouve son inspiration dans le street art africain, européen et américain, les galeries et les musées.
« L’inspiration est une force ; les autres sont la source de l’artiste en moi. Je me trouve particulièrement attiré par des musiciens comme Sun Ra, Jimi Hendrix et des légendes du jazz comme Miles Davis, Louis Armstrong, John Coltrane et Nina Simone. La musique en général fait partie intégrante de ma vie et de mon travail. Je crois que l’art est fondé sur l’idée que le partage de la créativité des autres suscite en vous les plus grandes formes de créativité qu’il incite à regarder ce qui constitue son environnement et sa communauté et que ce partage initie des visions créatives, nourrissant l’espoir de soi et inspirant les autres.
Mon travail questionne le rôle que nous jouons dans ce monde en tant qu’humains mais aussi en tant qu’identité propre, à savoir noire, blanche, jaune, juive, chrétienne, musulmane, bouddhiste, hindoue ou tout ce en quoi nous choisissons de croire (…) » IH
Catalogue anniversaire avec des témoignanges d’artistes primés.
Poursuite des explorationns graphiques autour du Printemps du dessin autour d’une quarantaine de structures mobilisées sur l’ensemble du territoire français telles que la Conciergerie, le macLyon, le Frac Provence-Alpes-Côte d’Azur…
Infos pratiques :
Drawing Now Art Fair, 15ème édition
19-22 mai
Carreau du Temple