Julie Monot, See Double 2020 courtesy l’artiste
Nathalie Guiot, curatrice et éditrice, à l’origine de la Fondation Thalie, au cours d’un long et passionnant entretien réalisé lors du confinement (relire) avait exprimé son engagement auprès des artistes femmes pendant cette période et sa volonté de se concentrer sur la poésie lors de soirées retransmises en direct sur une plateforme en ligne dédiée. La Fondation Thalie poursuit à présent cette dimension fertile et imaginaire avec Les Semeurs, The Sowers, exposition collective autour de la valeur du geste, de la matière, des rites et croyances, d’une pensée écologique et incarnée de l’art d’un continent à l’autre. Le tissage, la terre, la trame deviennent les réceptacles d’actions performatives ou de processus de métamorphoses entre Orient et Occident dans les espaces intimes et domestiques de cette maison d’inspiration moderniste. Un véritable cheminement est proposé au visiteur qui traverse différents seuils dans une polysémie d’ensemble.
Les fibres sont à l’œuvre dans le début du parcours avec Julie Monot (Suisse) et Desire Moheb-Zandi (Allemagne) dans une pratique d’activation et de performance, tandis que Niyaz Azadikhah (Iran) se saisit de la broderie pour donner à voir une lecture ironique de son quotidien. Alexander Marinus (Belgique) investit le grand escalier avec de grandes toiles de jute dans le prolongement de sa résidence de création au MAD autour des potentialités du lin et du chanvre. Le tissage est envisagé par la jeune artiste belge déjà très remarquée Elise Peroi comme un jeu de déconstruction, de vide et de plein.
L’installation de Sol Calero (Vénézuela) pour l’espace bibliothèque de la Fondation est un temps fort du parcours. A la suite de sa résidence et solo show à La Villa Arson elle a choisi une peinture murale à partir de laquelle tout un processus de réactivation est enclenché autour des notions d’exotisme et d’influences latino-américaines au sein d’architectures vernaculaires. Entrent en dialogue une céramique anthropomorphique de Kristin Mc Kirdy (Etats-Unis) et les théières émaillées marquées au plomb d’imprimerie de Raphaël Tiberghein (France).
La dernière partie de l’exposition, véritablement méditative à mon sens est consacrée à la terre avec l’installation magistrale de Jasmine Little (Etats-Unis), ces grands vases d’inspiration flamande qu’elle recouvre d’émaux de sa fabrication, la vidéo d’Hector Zamora réalisée à partir d’une performance rassemblant de nombreuses femmes piétinant des vases en guise de protestation de la domination masculine ou les sculptures en peaux de cuir marouflées d’Angèle Guerre très aériennes. Au sol surgissent les restes de la performance de l’artiste sud-africaine Belinda Blignaut, une argile brute dont elle recouvre son corps, tandis qu’une bande son de bruits captés en Afrique du sud diffuse un parfum enveloppant. Phénomène étonnant, des résurgences de vie apparaissent parmi ces mottes de terre, comme pour signaler ce cycle infini de renaissances suggéré par le titre de l’exposition.
De plus en partenariat avec la Brussels Drawing Week, la Fondation a passé commande au duo d’artistes Florentine et Alexandre Lamarche-Ovize (Galeries Laurent Godin, et Aeroplastics), d’une création murale pour la salle à manger du lieu. Ils ont voulu mettre à l’honneur des figures oubliées de l’histoire de l’art : Mary Blair, Frida Kahlo et Élisabeth Vigée Le Brun dans un wall drawing fidèle à leur syntaxe expérimentale d’inspiration art & craft.
Infos pratiques :
Les Semeurs/ The Sowers
Jusqu’au 21 novembre
Programmation associée :
Parole de créateurs face à l’urgence écologique : Claudia Comte le 30 septembre à 19h
Masterclass de Véronique Caye & Paul Ardenne : Écologie des images le 7 octobre à 19h
Fondation Thalie
15 rue Buchholtz, Bruxelles
https://www.fondationthalie.org
Agenda de la Brussels Drawing Week :
Brussels Drawing Week – Explore the plurality of contemporary drawing
Relire en complément mon interview de Gilles Parmentier, Art-on-paper, Brussels Drawing Week.
Organiser votre venue :
