Fondée en 1991 par Magda Danysz la galerie implantée dans le Haut Marais à Paris, est également ancrée dans le quartier du Bund à Shanghaï et à Londres. Trois villes qui ont réagi différemment face à cette crise.
Partie prenante dans le lancement de l’application gratuite et solidaire marais.guide qui
recense 90 galeries, Magda Danysz très impliquée dans le Comité professionnel des
galeries d’art, revient sur l’étude de l’impact de cette crise auprès de la profession, dont
l’image est encore mal connue du public. Si certaines stratégies digitales ont porté leurs
fruits, Magda Danysz reste convaincue du rôle de proximité que peuvent jouer les galeries, face à une reprise qui ne sera pas immédiate.
Vous lancez l’application marais.guide, quelles en sont les spécificités et en quoi les réflexions du confinement vous ont-elles permis d’élaborer ce projet ?
Cette application, née en effet de nos réflexions de confinement qui n’a pas que des mauvais côtés, partait d’un projet préexistant de dimanches collectivement ouverts par un certain nombre de galeries, créant un moment privilégié de rencontre avec le galeriste à un autre rythme. Dans notre volonté post confinement de montrer le chemin du retour dans nos galeries, cette application permettra de référencer les professionnels qui sont ouverts ces dimanches et pourquoi pas les autres jours, les amateurs découvrant ainsi qu’à côté de son circuit habituel il y a d’autres galeries qu’il n’a pas encore identifiées. Ce qui nous a frappé dans notre réflexion, est de voir qu’il existe plus d’une certaine de galeries de soutien d’art contemporain dans le marais de contemporain de grande qualité de toute tailles et dans un périmètre très réduit. Plus besoin d’aller à New York, Bâle ou New York pour un salon quand on a une telle concentration d’expositions si proche de nous !
Concrètement, l’application est gratuite pour tout le monde côté galeristes et côté visiteurs collectionneurs, suivant une démarche que nous voulions solidaire. Nous avons coupé les chaines Apple store et Google store, ce qui nous permet de rester gratuits.
L’application se télécharge en 1 clic sur votre écran d’accueil. C’est donc très simple
d’utilisation et d’actualisation selon d’autres évènements qui peuvent surgir au cours de
l’année. A terme, nous aimerions que le collectionneur puisse, plutôt que d’être en
permanence sollicité par des mails, se rendre directement sur l’application.
Comment avez-vous réagi face à cette crise, quelle a été votre stratégie, la galerie étant implantée à la fois à Paris, Shanghaï et Londres ?
Nous avons surtout cherché à la fois pendant le confinement et cette période de sortie de
crise, à pallier à la situation par une stratégie de l’agilité, comme pour beaucoup de gens
n’ayant que peu d’informations et de projections sur le futur d’un point de vue légal mais
aussi psychologique. Est-ce que les gens vont avoir envie de retourner dans de grands
vernissages, même quand cela sera de nouveau possible ? Rien n’est moins sûr. Nous
avons envie dans nos 3 galeries, d’être agiles et réactifs au jour le jour comme pour
l’application marais.guide. Nous avons la chance si l’on peut dire d’être face à 3 pays qui
réagissent différemment face au COVID en particulier la Chine qui a ce mois d’avance et qui l’a géré autrement, très rapidement et avec des mesures de confinement beaucoup plus fortes que les nôtres. Nous avons appris aussi de ce qui a été mis en place en Chine avec l’obligation très tôt de rendez-vous privés, condition sine qua none de réouverture. Les gens doivent s’identifier sur un créneau horaire, on prend leur température à leur arrivée, ils sont masquées et doivent se laver les mains, ce n’est pas une option ou une recommandation. On doit avoir leurs coordonnées au cas où il se passe quelque chose pour pouvoir repérer les différents lieux où ils sont passés. Les lieux de possible interaction de public sont contraints d’adopter ces mesures. Psychologiquement et intellectuellement ces formats de rendez-vous sont très porteurs et intéressants pour nous en termes de reprise pour pouvoir privilégier du temps de qualité.
Quelle a été la place du digital pour vous pendant cette période ?
Il est intéressant de noter que le digital a été l’une des grandes questions de ce confinement. C’est à la fois un vecteur d’espoir pour l’art et de nombreuses industries et en même temps cela ne remplace pas le rapport à l’œuvre. Ceux qui ont lancé des viewing rooms, salons en ligne et autres solutions qui ont émergé, font un bilan assez mitigé avec quelques ventes, mais loin d’un large succès. On ne peut brandir le digital comme la solution ultime, c’est un complément sur un travail de fond effectué au long cours de sélection des œuvres, de promotion des artistes, .. et il faut bien se l’avouer ce n’est pas la raison d’être notre métier. Si nous sommes ouverts tous les jours, avec des horaires allant jusqu’à 8 heures par jours et gratuitement c’est bien pour autre chose que l’internet. Il faut donc garder quelques réserves et étudier comment la technologie peut aider à générer des dialogues plus qualitatifs, à faire en sorte que les gens reviennent dans les galeries et y prennent du plaisir. Le numérique est un outil qui n’en demeure pas moins très intéressant pour, paradoxalement en ces temps difficiles, toucher de nouveaux publics, désacraliser le rapport à l’art et rendre la Culture et les arts plastiques plus accessibles.
Marion Papillon présidente du Comité professionnel des galeries d’art déclare qu’1/3 des galeries va disparaitre à l’issue du confinement, partagez-vous son opinion ? et si oui, pour quelles raisons ?
Tout à fait et les raisons sont nombreuses. J’ai pu participer de près aux réflexions du
Comité avec aux côtés de notre présidente Marion Papillon à travers notamment une étude que nous avons lancée pour recueillir des arguments solides face à nos partenaires institutionnels (ministère entre autres) et donner aussi des éléments aux galeries pour
pouvoir se défendre et revaloriser, faire mieux connaître leur profession et leur passion.
Le premier constat est que notre profession est peu connue, les grandes success story
éclipsent la réalité de notre métier. Tout le monde n’est pas Gagosian et tout le monde ne
vend pas des œuvres à millions ! Cette étude l’a bien montré et on estime au vue des crises passées qu’1/3 des galeries sont plus que fragiles, ce sont des TPE avec des chiffres d’affaires modestes mais qui font un travail de soutien humble et très précieux pour les artistes qui sont très nombreux à en vivre. Nous sommes très effrayés de ce qui peut se passer avec au moins 1/3 des galeries en danger en ce moment et sans même évoquer l’hypothèse d’une 2 ème vague ou autre scénario. Nous sommes face à des galeries qui se demandent comment elles vont rouvrir et rattraper les loyers impayés. Les bailleurs sociaux de la ville de Paris ont essayé d’aider certaines galeries mais d’autres ont des bailleurs privés qui eux-mêmes ont des échéances difficilement négociables. Peu d’entre nous ont réussi à obtenir des faveurs, si ce n’est au mieux un report de loyer le mois suivant alors que la situation ne va pas reprendre. C’est une des particularités du marché de l’art, souvent l’un des premiers à être durement frappé et celui qui est le dernier à se remettre, comme on l’a constaté lors des précédentes crises. Pour qu’une galerie si les gens ne sont pas psychologiquement d’humeur à aller acheter, cela peut durer un moment. La grande crise qu’avait connue le secteur en 1991-92 a duré quasiment 2 ans, les galeries ayant eu du mal à récupérer un flux normal de visiteurs. C’est bien cela qui est en jeu aujourd’hui.
Le monde de l’art saura saura-t-il selon vous, tirer les leçons de cette alerte ?
Cela ne concerne pas que les galeries et nous avons tous rêvé pendant le confinement que cette crise allait sauver la planète, que plus personne ne reprendrait sa voiture,.. alors que les embouteillages risquent d’être sont vite de retour dans Paris. Néanmoins à la faveur des différents échanges que nous avons entre nous, nous souhaitons revenir à un modèle qui nous sorte de la grande essoreuse du marché de l’art car il ne faut pas oublier que le marché de l’art n’est pas l’art. Ce sont deux ensembles bien distincts et l’on ne peut pas définir tout l’art contemporain uniquement par le son marché. Parlons avant tout d’art, de la réflexion derrière, des émotions, … Si l’on fait ce métier c’est d’abord par passion et nous avons des idées à soutenir, des artistes à promouvoir et si l’on pouvait ne serait-ce que revenir à ces fondamentaux que ce trop-plein de salons et je le dis clairement, avait probablement noyé. Nous qui étions toujours par monts et par vaux, n’avons-nous pas envie de revenir à davantage de beaux projets à produire avec nos artistes et à partager avec nos visiteurs au sein de nos galeries. Oui il est temps que le visiteur revienne dans nos galeries !
Magda Danysz, Paris -ShanghaĂŻ-Londres
Infos pratiques :
Danysz gallery Ă Paris
ouverture le dimanche 14 juin 2020 dans le cadre du dimanche
des galeries du Marais
Treasures Ă partir du 30 mai
Danysz gallery Ă ShanghaĂŻ
Venit Occursum, group show
magdagallery.comdanyszgallery.com
En écoute : 🎧
FOMO Podcast Magda Danysz, Paris -ShanghaĂŻ-Londres
Découvrir et télécharger marais.guide
Infos pratiques :
Magda Gallery Ă Paris
Fences Faces, Icy and Sot
ouverture dimanche 24 mai
Magda Gallery Ă ShanghaĂŻ
Venit Occursum group show