Man Ray, Le Maharajah et la Maharani d’Indore vers 1927-1930 Man Ray 2015 Trust/Adagp Paris 2019 photo :Centre Pompidou MNAM-CCI.Dist RMN Grand Palais/Guy Corrard
C’est un peu comme l’histoire du Tajah Mahal, une histoire d’amour qui a inspiré une œuvre unique et singulière. Celle ci concerne Shri Yeshwant Rao Holkar II (1908-1961), le Maharajah d’Indore et son épouse la Maharani Sanyigita Raje, sublime d’élégance et de beauté qui l’accompagne dans ce projet un peu fou du premier palais moderniste de l’Inde, le palais Manik Bagh (« jardin des rubis ») devenant l’épicentre de l’audace de l’avant-garde européenne. La mort brutale de cette dernière en 1937 sonnera le glas de l’aventure.
« Si le titre de l’exposition se focalise sur le prince indien, le parcours met en évidence la présence prépondérante de la très belle Maharani Sanyogita Raje » déclare le Dr Amin Jaffer, conservateur en chef de la collection Al Thani, partenaire et prêteur principal de l’exposition. Et Man Ray prend des clichés intimes du couple lors de leurs vacances à Paris ou dans le sud de la France, soulignant le côté très informel de leurs pauses, loin des carcans de la célèbre dynastie des Holkar. Cette œuvre d’art totale du duo est le fil rouge de la captivante exposition du MAD/ Musée des Arts décoratifs Paris qui réunit plus de 500 pièces dans une scénographie exceptionnelle signée studio BGC, dans toute la nef du musée.
Formé à la prestigieuse université d’Oxford, le jeune prince y rencontre celui qui va devenir son mentor, le précepteur francophone, Dr Marcel Hardy qui l’introduit à l’architecte allemand Eckart Muthesius et au marchand et écrivain Henri-Pierre Roché. Il complète ces rencontres décisives par de nombreux voyages en Europe (France notamment). C’est en 1929 à l’âge 21 ans qu’il décide suite à la visite du studio de Jacques Doucet, de bâtir dans son pays un palais d’une grande innovation et luxe synthétisant l’Orient et l’Occident et mobilisant le meilleur des créateurs du moment par l’entremise de Henri-Pierre Roché et sous la direction d’ Eckart Muthesisus.
Jacques-Emile Ruhlmann, Brancusi, Eileen Gray, Charlotte Perriand, Pierre Jeanneret, Louis Sognot et Charlotte Alix, que l’emblématique commanditaire repère lors des salons artistiques parisiens (1931/1932), proposent un décor où les matériaux sont très novateurs pour l’époque. Comme on le voit dans le cabinet de travail du maharajah (galerie latérale), dans la lignée du « Studio pour un prince héritier des Indes » signé Ruhlmann et dévoilé au Salon des artistes décorateurs de 1929, le grand bureau Tardieu en ébène de Macassar et suite de 5 chaises tripodes et bibliothèque, sont accompagnés de luminaires d’Eckart Muthesius, un tapis d’Ivan Da Silva Bruhns et de cartes murales de l’Inde et de l’Etat d’Indore. Le maharajah passe également commande auprès de Puiforcat qui réalise son monogramme.
Précurseur et méconnu, ce mécène amoureux de l’Europe est enfin révélé et son parcours offre une lecture nouvelle sur l’histoire des avant-gardes. Un voyage esthétique et immobile d’une puissante évocation.
Commissaires : Raphaëlle Billé et Louise Curtis
Profitez également de votre visite pour découvrir l’autre exposition remarquable du MAD : Marche et démarche, une histoire de la chaussure, 3ème volet de l’exploration du lien entre le corps et la mode. Immanquable !
Infos pratiques :
Moderne Maharajah, un mécène des années 30
MAD
Musée des Arts Décoratifs
Jusqu’au 12 janvier 2020
Catalogue édition MAD, 224 pages, 49€ en vente à la librairie.
Réservez vos billets :
Un « Paris indien » également célébré au musée Guimet avec : l’Inde, au miroir des photographes.