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Rencontre Sophie Zénon, réouverture Château d’Eau Toulouse, « L’humus du monde »

Sophie Zénon. MARIA, 2010. Photographie. Tirage fine art couleur sur papier Canson Platine. Format 70 x 55 cm. Affiche de l’exposition courtesy de l’artiste

A l’occasion de la réouverture très attendue de l’emblématique institution photographique toulousaine, le Château d’Eau, Magali Blénet, directrice, donne carte blanche à l’artiste Sophie Zénon pour investir de manière inédite l’ensemble des espaces. Avec « L’humus du monde » la plasticienne nous tend un miroir et une large vanité, sous une forme concentrique en réponse à l’architecture même du lieu dans une théâtralisation à la fois intime et universelle. Les différents corpus et paysages traversés dessinent une topographie de l’invisible autour de la perte, de la douleur, de l’exil, de la mémoire. Les cycles « Rémanences », « In Case We Die » et « Arborescences » juxtaposent géographies et temporalités différentes dans une même narration envoutante questionnant notre condition mortelle et ses multiples connotations. De manière exceptionnelle, l’artiste ouvre son récit à d’autres regards à partir d’un dialogue transhistorique avec des œuvres d’autres musées de Toulouse. Des échos formels et conceptuels se dégagent de cette vaste chorégraphie, l’artiste jouant de son propre corps dans des reflets démultipliés. Sophie Zénon revient sur la genèse de cette aventure autant botanique, scientifique qu’humaine, les partis pris qui l’ont guidé et le livre d’artiste spécialement conçu à l’occasion. Autre actualité de taille, l’artiste s’inscrit dans l’exposition de réouverture du musée des Augustins avec une œuvre en lien avec le chamanisme, tissant une même cohérence et d’autres perspectives. Parmi les personnes qui ont été décisives, Sophie outre Magali Blénet et Laure Dalon, directrice des Augustins, cite volontiers David Madec, directeur des monuments et musées de Toulouse, qui a tout de suite cru et adhéré au projet. Elle a répondu à mes questions. 

Vue de l’exposition Sophie Zénon, L’humus du monde Château d’Eau courtesy de l’artiste

Marie de la Fresnaye. Vous avez choisi les termes de beauté et d’effroi au cours de la visite : les mots clés pour résumer l’exposition ? 

Sophie Zénon. Avec ce projet, nous sommes au fondement même de l’être humain. Cette exposition nous parle de notre condition d’humain, tout simplement.

MdF. Ce projet rejoint vos recherches anthropologiques autour du thème de la mort 

SZ. Je suis diplômée en histoire contemporaine et en anthropologie avec une spécialisation sur notre rapport aux morts et, par voie de conséquence, à la Mort. Un domaine de recherche que j’ai appliqué d’abord en Occident, de manière beaucoup plus ciblée en Normandie, puis en Mongolie et en Sibérie en travaillant sous la direction de Roberte Hamayon, anthropologue spécialiste du chamanisme sibérien, décédée il y a quelques mois, en mars 2025. Elle a été pour moi un modèle de pensée et une figure tutélaire. J’ai fait des études avec elle en 1998 et depuis on ne s’est jamais quittées. Une personne extraordinaire qui a toujours suivi et encouragé mes recherches.  

Sophie Zénon. ÉPERVIÈRE DE BAUHIN, 2024. Photographie 20 x 25 cm tirée sur papier japon Shin Inbe 110gr. marouflée sur BFK Rives 40 x 30 cm. Lavis. Réhauts au crayon blanc. Cire. Plante introduite en Lorraine par les Allemands pendant la Première Guerre mondiale.

MdF. Autre source dinspiration : Vinciane Despret

SZ. Si elle est souvent citée pour ses ouvrages sur les oiseaux ou les poulpes, on connaît moins son livre « Au bonheur des morts : récit de ceux qui restent » (Les Empêcheurs de penser en rond/La Découverte, 2012). Cet ouvrage représente pour moi une petite révolution dans la mesure où l’auteur montre la capacité des vivants et des morts à instaurer de nouveaux récits entre eux. Une pensée qui a souvent rencontré la mienne. Lorsque l’on aborde le chamanisme, un système de pensée global avant d’être une religion, la dissociation morts-vivants n’existe pas. Les morts font partie du quotidien. En Mongolie, quand vous entrez dans une yourte, vous vous installez auprès des morts, une place leur est réservée au fond de la yourte. Le dialogue entre vivants et morts y est continu. Le paysage – montagnes, rivières, forêts – est habité d’esprits de la nature avec lesquels les humains tissent des liens particuliers. La pensée de Despret vient aussi d’une forme d’écologie de la nature et on peut aller puiser chez les peuples premiers énormément de choses sur cette idée de cycle de vie et de mort. Je me sens très en phase avec cette philosophe et psychologue belge. 

Vue de l’exposition Sophie Zénon, L’humus du monde Château d’Eau courtesy de l’artiste

MdF. Quelle est lorigine du titre « Lhumus du monde » 

SZ. Je tiens à préciser que c’est un titre que j’ai emprunté à une amie poétesse, Paola Pigani, avec qui j’ai réalisé un livre d’artiste en 2022 « Les dormeurs de la forêt » (éditions FMA). Paola s’est inspirée de mes photographies pour écrire un texte intitulé « L’humus du monde », en réelle symbiose avec ma démarche. Je l’ai sollicitée pour lui demander si elle m’autoriserait à emprunter ce titre, ce qu’elle a accepté tout de suite. Si je réfléchis à pourquoi il me parle tant, je dirais qu’il se lit autant qu’il se respire. Laissez-vous remplir par cette image : vous êtes en forêt, un jour d’été très chaud, un orage éclate et l’eau, en pénétrant le sol, fait remonter à la surface des odeurs de feuilles, de terre, de champignons, bref, d’humus. Dans le mot « humus », vous avez à la fois cette idée d’accumulation des couches de terre, de stratification de l’histoire, mais aussi de décomposition et surtout de recomposition, de ferment nourricier, de ferment vital. Une idée qui est transversale dans tout mon travail. Certes, la mort, mais la mort qui donne la vie et la transforme. 

Je vais vous raconter une autre histoire. Chez les peuples sibériens, quand une personne âgée sent qu’elle va mourir, elle part en traineau, seule avec ses chiens et à un moment, elle se laisse tomber du traineau, tout simplement. Parce qu’elle veut que son corps retourne à la nature, retourne en poussière et vienne nourrir à la fois les animaux et le végétal. La finitude est bien la seule chose de notre existence dont nous soyons assurés. Au sous-sol du château d’Eau, j’ai poussé ce cycle de vie et de mort très loin en mettant en scène ma propre mort : 4 crânes en porcelaine réalisés à Limoges aux ateliers Arquié à partir de l’IRM de mon propre crâne, brodés ensuite par mon amie l’artiste textile Aurélie Lanoiselée autour d’une interprétation des 4 éléments Air, Eau, Terre et Feu. La boucle est bouclée pourrait-on dire ! De même en galerie 2, avec la vidéo « Dans le miroir des rizières » autour de l’histoire de Maria, ma grand-mère maternelle. A la fin de la vidéo, je m’échappe du cadre pour laisser place au végétal, à l’eau, au ciel. Les chamans m’ont appris cela : l’homme est un petit élément à l’échelle du cosmos, faisant partie d’un univers. Quand je suis en Mongolie, je suis à cheval en permanence, au milieu de ces immensités et de la nature, j’ai vraiment la sensation d’appartenir à un univers global.

MdF. Pour revenir à l’invitation de Magali : quel en est le point de départ ? 

SZ. Les premiers contacts avec Toulouse sont venus d’Ingrid Coumes-Marquet, directrice du centre culturel Saint-Cyprien. Elle m’avait contactée en 2019, avant le premier confinement, pour un projet de workshop qui s’est trouvé annulé étant donné la période. Nous nous sommes revues bien des mois plus tard, je venais de commencer avec François Vernier mon travail sur les plantes obsidionales qui l’a tout de suite passionnée, et je lui ai suggéré l’idée d’une résidence en Occitanie pour alimenter ce projet. C’est alors qu’elle m’a présentée à Magali Blénet, directrice du Château d’eau, lors d’un été arlésien, sur la possibilité d’une exposition. Au gré de nos échanges, avec elle mais aussi avec Christian Caujolle alors directeur artistique du Château d’Eau qui connaissait par ailleurs de longue date mon travail, nous avons abordé le projet d’une exposition ambitieuse en plusieurs chapitres qui plongerait dans l’ensemble de mon parcours. Mon œuvre protéiforme (photographie, livre d’artiste, installations, vidéos…) pouvait rejoindre les ambitions de Magali pour le Château d’Eau, un lieu qu’elle souhaite ouvert pour montrer la diversité de ce que recouvre le médium, tant dans ses techniques, approches et monstrations. Autant d’enjeux partagés. J’ai accueilli la proposition de Magali avec bonheur, tout en ressentant une pression vis-à-vis des attentes que cela suscitait. L’enjeu est important dans ce lieu historique à la physionomie si particulière, il fallait un projet à la hauteur de cet enjeu ! Je me suis d’abord inspirée de la forme circulaire du lieu, filant la métaphore du cycle de vie et de mort ; mais j’ai aussi pris en compte l’inscription du lieu dans son territoire, des liens qui l’attache aux autres musées de la ville en empruntant des peintures, objets, vidéos à quatre musées toulousains, dessinant un portrait en creux de ce qui m’anime et me constitue. 

Vue de l’exposition Sophie Zénon, L’humus du monde Château d’Eau courtesy de l’artiste

MdF. Comment avez-vous obtenu ces différents prêts d’œuvres 

SZ. Il a fallu d’abord convaincre les directeurs et conservateurs des quatre musées toulousains pressentis. C’est à ce moment qu’est intervenu un personnage clé, David Madec, directeur des monuments et musées de Toulouse, auparavant administrateur du Panthéon. Il a tout de suite adhéré à mon projet, tout comme Magali, ce projet arrivant à point nommé avec les propres désirs de Magali de tisser des liens et de construire des échanges avec les acteurs du territoire. Tout un faisceau de liens et une conjonction d’énergie commune. Cette exposition est pour moi une exposition rêvée. J’ai toujours eu en tête les expositions de Jean-Hubert Martin aux si stimulantes scénographies, notamment « Carambolage » au Grand Palais. Un modèle d’intelligence et de sensibilité pour moi. J’ai appris qu’il était toulousain !

Du fait de ma formation d’historienne et d’ethnologue, j’avais à coeur de faire se rencontrer différentes époques, différentes temporalités, différentes géographies. Essayer de sortir d’un schéma de monstration classique pour aller vers une pensée plus globale et féconde où les oeuvres entreraient en résonance/dissonance entre-elles. Ce que j’aime fondamentalement, c’est entraîner le visiteur dans mon univers et créer la surprise. Emailler l’exposition d’objets qui ne m’appartiennent pas, qui ne sont ni des anecdotes, ni des illustrations, mais qui dessinent en creux le portrait de qui je suis et de ce qui m’anime. Mes compagnons de route, mes affinités électives. Nous sommes tous pétris de rencontres, d’influences, l’artiste n’y échappe pas. J’ai eu un bonheur immense à travailler avec toute l’équipe à ce projet, Magali bien sûr mais aussi Ingrid Coumes-Marquet, Mickael Zermati et Estelle Lacanal notamment, avec lesquels j’ai eu de constants échanges pendant de très nombreux mois.

MdF. Au rez-de-chaussée, le parcours ouvre sur Zoran Music, pour finir avec Dieter Appelt : comme un grand écart ? 

SZ. Sans oublier les collages anatomiques de Dado. Les artistes présentés ici sont tous des artistes qui ont connu la guerre et en ont été très marqués, dans des régions différentes. Au départ, je voulais inclure Antoni Tapiès, j’avais choisi un tableau intitulé « Tourbillon de sable » avec beaucoup de matière qui faisait écho à mes gravures au carborendum de « Verdun ses ruines glorieuses ».  Avec lui, j’abordais la guerre d’Espagne, ici, juste de l’autre côté de la frontière. Malheureusement, l’œuvre était trop fragile. L’œuvre vidéo « Cada respiro » de la jeune artiste cubaine Glenda Léon en provenance des Abattoirs, initialement destinée à l’autre partie de la cimaise, est venue prendre place au milieu de l’herbier. C’est une œuvre d’une grande simplicité aux limites de la perception et du visible, 3 minutes en boucle d’une terre qui se soulève au rythme de la respiration qui nous alerte sur ce que ne nous ne voyons plus ou que ne prenons plus la peine de voir.

Sophie Zénon. ROQUETTE D’ORIENT (IN L’HERBE AUX YEUX BLEUS), 2021. Pièce unique. Photogramme sur papier argentique Foma. Format 97 x 120 cm. Plante introduite en Lorraine par les Cosaques pendant les guerres napoléoniennes.

MdF. En ce qui concerne les photogrammes grand format, comment sont-ils réalisés ? 

SZ. Pour refaire la chronologie, les plantes ont d’abord été récoltées en Lorraine en différentes saisons en 2021 et 2022, en compagnie du botaniste François Vernier, récoltées avec leur racine, une symbolique est très importante dans ma démarche. Dans la foulée, je partais immédiatement en voiture pour Paris, la durée de vie d’une plante ayant été sortie de terre étant courte, de manière à les traiter le plus rapidement possible. Le lendemain à Bagnolet, mon tireur Diamantino Quintas avait préparé la cuve de développement au format du tirage. Je commençais par nettoyer les plantes à la brosse à dents, les laver, les sécher. Et ensuite, c’est une opération assez complexe que je ne vais pas développer ici mais c’est un défi physique, nous sommes à quatre personnes pour réaliser ces tirages. 

Ce projet « L’herbe aux yeux bleus » m’a occupée pendant quatre ans, c’est une aventure botanique, scientifique, mais avant tout une aventure humaine entre François Vernier, Diamantino et moi. Nous sommes devenus amis, liés par cette histoire merveilleuse. C’est ce qui m’anime avant tout et me fait vibrer dans chacun de mes projets. Au-delà de l’histoire, au-delà de la technique, c’est comment on peut construire le monde ensemble.

Sophie Zénon. CAPUCIN 2 (MOMIES DE PALERME), 2008. Photographie argentique couleur tirée sur papier Fuji Cristal Archive. Format 30 x 20 cm.

MdF. Vous avez parlé d’une descente aux enfers pour aborder le sous-sol. C’est une sorte de dramaturgie qui s’est imposée d’elle-même ?

SZ. Je ne nie pas chez moi un penchant vers le baroque, dans le sens de théâtre des émotions. L’émotion, je la revendique pleinement. Pour moi, et au-delà du discours qu’elle véhicule, une œuvre d’art doit d’abord provoquer une émotion. Je précise cela parce que pendant longtemps, la photographie n’était reconnue que dans une acceptation documentaire et objective, notamment dans les années 80, à une époque où il ne fallait surtout pas parler d’émotion. J’ai toujours été hors mode et me suis souvent sentie en décalage. Je crois au pouvoir de l’émotion dans la capacité à faire bouger les peuples, ce que le philosophe de Georges Didi- Huberman a magistralement développé dans son ouvrage « Peuples en larmes, peuples en armes » (Minuit, 2016). 

MdF. Autre temps fort du parcours : « La Danse », une série de jambes aux rayon X

SZ. Je vais devoir entrer dans des considérations plus techniques. Ce que révèle ces scanns de ces jambes dans leur cercueil, c’est la pratique d’habiller les corps de nos défunts, choisissant en hiver un manteau ou au contraire une petite robe d’été pendant les chaleurs. Nous ne le voyons plus tellement nous en avons pris l’habitude. Cette croyance dans un au-delà possible, au-delà de toute confession, nous échappe et perdure au-delà des époques. J’ai mis en dialogue ces photographies avec des statuettes égyptiennes que l’on disposaient dans les tombes pour passer dans l’autre monde. Toutes ces croyances populaires me touchent et me troublent parce qu’elles témoignent de notre fragilité et du sentiment d’impermanence. Je n’y vois rien rien de religieux…. mais comment le passé s’inscrit profondément en nous et se manifeste à notre insu.

Vue de l’exposition Sophie Zénon, L’humus du monde Château d’Eau courtesy de l’artiste

MdF. Pour aller vers la partie performative de votre démarche qui apparait notamment en galerie 2 : quelle place a-t-elle dans lensemble 

SZ. Si elle apparaît très visiblement dans cet ensemble de photographies dans lesquelles je me mets en scène sous forme d’autoportraits avec le portrait de ma grand-mère Maria, cette dimension performative est déjà présente, d’une certaine manière, avec les momies. Pour moi est aussi performatif le fait de photographier avec l’énergie de son propre corps en mouvement devant des objets inanimés. Parce qu’en fait, qu’est-ce que je mets en jeu ? Je pense fondamentalement que c’est moi-même que cherche à exposer, à rendre vulnérable, afin d’ausculter ma propre psychologie, mon propre rapport à la perte. Tout ce qui est donné à voir est finalement performatif, jusqu’à la mise en scène de mon propre crâne.

Et si j’avais trouvé aux Abattoirs une vidéo de Marina Abramovic, je l’aurais immédiatement choisie. Sa démarche, ses oeuvres, son histoire relatée dans son livre « Traverser les murs » (Fayard, 2017) ont une grande résonance pour moi. Cette femme me passionne !

MdF. Maintenant, pour aller vers la publication associée et unique dans l’histoire du Château d’Eau, quelle en est la genèse ? 

SZ. Chaque exposition du Château d’Eau s’accompagne d’un catalogue. Étant donné l’ampleur inédite de cette exposition, il était impossible d’en rendre compte dans le format habituel de 80 pages. Nous avons alors réfléchi avec Magali aux options qui s’offraient à nous et décidé de nous concentrer sur un corpus, en l’occurrence « L’herbe aux yeux bleus », mon plus récent travail sur les plantes obsidionales, mais non pas sous la forme d’un catalogue mais d’un livre d’artiste.

Pour moi, la différence entre un livre, un catalogue et un livre d’artiste, c’est que le livre d’artiste est une variation plastique d’un projet. Ce n’est pas une exposition qu’on traduirait en livre. Avec Lia Pradal, l’éditrice des éditions Païens que j’ai rencontrée à cette occasion, nous avons bâti un livre au plus proche de mes intentions, traduisant idée d’image fantôme par l’usage d’un papier fin et délicat laissant apparaître au revers l’image précédente. Les images sont placées librement comme des respirations, regroupées en un album au sein d’une structure délicate s’ouvrant comme un retable où les textes, notamment la magnifique introduction de l’historienne de la photo Damarice Amao, se déploient en regard des images. Je dois saluer le travail remarquable de Lia qui a tout de suite senti mon travail pour en offrir une adaptation la plus juste possible. La couverture au visuel imprimé avec une encre argentée reprend les sels d’argent du photogramme. Tout est pensé dans le moindre détail et, souhait ultime du Château d’Eau, ce livre réussit le tour de force de réunir différents acteurs du livre et de la photographie de la région Occitanie.

Sophie Zénon, Le Ciel de ma Mémoire, musée des Augustins, courtesy de l’artiste

MdF. En ce qui concerne votre participation à la réouverture du musée des Augustins : à quand remonte l’invitation de Laure Dalon ?

SZ. Lors de mes échanges préparatoires avec Magali en 2023, elle a suggéré que je rencontre Laure Dalon qui travaillait sur la réouverture du musée et préparait une exposition temporaire sur les Ciels. J’ai alors pensé à cette œuvre ancienne intitulée « Le Ciel de ma Mémoire » que Laure Dalon a immédiatement retenue. En 2014, au cours de l’un de mes nombreux voyages en Mongolie, j’ai photographié tous les jours au Polaroïd SX70, à différentes heures de la journée, les ciels extrêmement changeants puisque l’on est en altitude. Le polaroïd réagissant à la chaleur, j’ai obtenu des gammes de couleurs inouïes. Chez les Mongols, le ciel est l’équivalent d’un esprit divin qu’ils appellent Tengri, une entité supérieure qui régit toute vie sur terre. Dans « Ciel bleu, un enfance en haut Altaï » (Métailé, 1996), l’écrivain mongol et chaman Galsan Tschinag nous transporte dans dans les steppes de son enfance, autour de toute une mythologie qui se décline de Gengis Khan à aujourd’hui, mais aussi dans « Au pays de la steppe grise » préface qu’il a écrite pour mon livre « Mongolie l’esprit du vent » (Bleu de Chine, 2005) aujourd’hui épuisé.

Par un jeu de superposition de plaques de nuages, aux opacités et transparences différents, « Le Ciel de ma mémoire » est une calligraphie d’instants rejouant perpétuellement le cycle de la vie et de la mort.

Infos pratiques :

Sophie Zénon

L’humus du monde 

Jusqu’au 8 mars 2026

Château d’Eau, Toulouse

www.chateaudeau.toulouse.fr

à venir : Interview avec Magali Blénet, directrice du Château d’Eau

Réouverture 

Musée des Augustins 

Exposition le Ciel 

www.augustins.toulouse.fr

à venir : Interview avec Laure Dalon, directrice musée des Augustins

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