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Villa Arson : rencontre avec Sylvie Christophe, Responsable des relations internationales et des résidences

Tanin Torabi ©Jean-Christophe Lett

A l’occasion des 3 nouvelles résidences proposées par la Villa Arson, rencontre avec Sylvie Christophe, en charge des relations internationales et des résidences. 

L’artiste et chercheur brésilien Abiniel João Nascimento est accueilli dans le cadre d’un partenariat avec Pivô, lieu de résidence et centre d’expérimentation artistique à São Paulo, avec le soutien du Consulat général de France et d’Impactart. Le duo Charles Guerlain (jardinier-paysagiste) et Marion Saxod (designer) est lauréat de la Bourse Matière(s) 2024 du Fonds de dotation Verrecchia. 

De plus, face à la multiplication des crises internationales et des bouleversements géopolitiques, la Villa Arson a développé depuis plusieurs années une spécificité autour de l’accueil d’artistes en exil. C’est le cas de l’artiste iranienne Tanin Torabi, chorégraphe, danseuse et réalisatrice de films de danse, qui bénéficie d’un accompagnement sur une année, en lien avec le Collège de France. 

Sylvie Christophe revient sur les spécificités de ce poste et les missions qui l’animent au quotidien. Son profil tourné vers la coopération culturelle et l’international l’a conduit à des postes dans des ministères parisiens et sur plusieurs continents en tant qu’attachée culturelle dans le réseau diplomatique français. Des compétences multiples qu’elle met au service de la Villa Arson au sein d’un territoire riche de potentiels. 

Marie de la Fresnaye. Quelle place occupe les résidences au sein du projet de la Villa Arson ? 

Sylvie Christophe. La Villa Arson a été conçue dès l’origine comme un lieu favorisant les croisements entre enseignement, recherche production et expérimentation artistique. En effet, l’accueil en résidence d’artistes du monde entier fait partie intégrante du projet imaginé dans les années 1960 par André Malraux, dont la réalisation a été confiée à l’architecte Michel Marot. 

Depuis plusieurs années, nous favorisons une plus grande ouverture internationale en établissant des liens privilégiés avec les scènes artistiques particulièrement dynamiques dans différentes régions du monde (pays de l’espace méditerranéen – Italie, Maroc, Tunisie, Algérie, Liban -Moyen Orient, Brésil, Asie du Sud-Est…). 

Cette dynamique partenariale permet de cofinancer l’accueil en résidence d’artistes et de chercheurs sélectionnés sur un projet spécifique et de développer des collaborations multiples avec des lieux de création et de recherche à l’étranger (résidences croisées, voyages d’études). 
L’objectif est double : stimuler la mobilité et les échanges internationaux et multiplier les occasions de rencontre avec des artistes issus de contextes très divers. 
Les artistes en résidence ont ainsi la possibilité de développer durant plusieurs mois un projet de recherche ou de création, et de s’initier à d’autres pratiques dans les ateliers de l’école d’art, au contact des étudiants et de l’équipe enseignante. 

MdF. Sur quels critères les artistes ont-ils été choisis ?

SCh. Chaque programme de résidence est le fruit d’un partenariat sur mesure, qui prévoit un appel à candidature spécifique. Les artistes sont sélectionnés par un comité ad hoc associant les représentants de chaque institution partenaire, un enseignant de la Villa Arson et une personnalité extérieure, à partir de critères d’expérimentation, de diversité et d’originalité.
Nous accueillons 4 à 5 artistes en résidence par semestre durant l’année universitaire pour des périodes de 3 à 4 mois. 

Charles Guerlain et Marion Saxod © Jean-Christophe Lett

MdF. Pouvez-vous nous présenter le projet d’nysædition, de Charles Guerlain et Marion Saxod ? 

SCh. Cette première résidence dédiée à la taille de pierre a été mise en place en septembre grâce à une nouvelle collaboration avec le Fonds de dotation Verrecchia. 

Un appel à candidature a été publié conjointement et un comité de sélection composé de représentants du Fonds de dotation et de la Villa Arson (équipe administrative et enseignante), ainsi que d’un Compagnon du Devoir-tailleur de pierre, a été constitué afin d’étudier les dossiers. 

La proposition de nysaedition nous a particulièrement séduite car elle consiste à explorer les propriétés de porosité et d’absorption de la pierre sous la forme d’une installation olfactive conçue dans le contexte paysager de la Villa Arson. 

A l’occasion de cette résidence, les étudiants ont la possibilité de s’initier à l’utilisation de ce matériau. Bruno Combernoux, Compagnon du Devoir – tailleur de pierre et mentor de la résidence, a partagé son savoir-faire et animé un workshop dès le début du projet. 

MdF. Qu’est-ce qui vous a séduit dans leur profil ?

SCh. Ce qui a séduit le comité de sélection était l’originalité du projet, alliant les compétences d’un jardinier-paysagiste à celle d’une designer, leur souhait de travail sur la porosité de la pierre, sa dimension olfactive et sa vocation à s’inscrire dans les jardins de la Villa Arson. Nous avons pensé que ce projet pouvait susciter de belles synergies au sein des équipes de la Villa Arson, en lien avec les équipes techniques et le responsable des jardins, et porter un nouveau regard sur le travail de la pierre. 

Abiniel João Nascimento ©Jean-Christophe Lett

MdF. L’artiste brésilien Abiniel João Nascimento et la Biennale de São Paulo 

SCh. Nous avons inité de nombreux projets avec le Brésil à l’occasion de la 34e Biennale de São Paulo en 2021. Grâce à un partenariat avec la Fondation Biennale de São Paulo, nous avons pu organiser un voyage d’étude à São Paulo pour dix étudiants et diplômés de la Villa Arson, accompagnés par une enseignante. La découverte de la Biennale aux côtés d’autres étudiants Brésiliens et internationaux, mais aussi de la scène artistique particulièrement dense et dynamique de la mégalopole brésilienne a été une expérience très formatrice.

Nous avons également développé des liens avec deux écoles d’art à São Paulo et Rio de Janeiro et signé des accords de coopération avec ces institutions pour faciliter les échanges et la mobilité étudiante. 
Un partenariat a été mis en place avec Pivô, centre d’art situé au cœur de São Paulo dans un bâtiment iconique construit par Oscar Nimeyer (Edificio Copan), qui accueille des artistes Brésiliens et internationaux en résidence et propose un programme d’expositions et d’évènements publics. 

Afin d’amorcer cette nouvelle collaboration, nous avons privilégié une démarche croisée permettant à l’un de nos diplômés de partir en résidence à Pivô et à un artiste brésilien de poursuivre sa recherche artistique à la Villa Arson durant trois mois.

L’artiste Ibrahim Meïté Sikely, diplômé de la Villa Arson en 2022, qui poursuit actuellement son cursus aux Beaux-Arts de Paris, est le premier lauréat de cette résidence à Pivô. 

A la Villa Arson, l’artiste plasticien et chercheur brésilien Abiniel João Nasciemento, a développé sa recherche artistique et réalisé de nouvelles pièces en céramique qui ont été présentées lors d’un Open Studio. Les étudiants de la Villa Arson ont pu le rencontrer à plusieurs reprises dans son atelier et dialoguer sur sa pratique. 
Des visites d’institutions culturelles de la région ont aussi été organisées afin de permettre aux artistes en résidence de se familiariser avec notre contexte culturel et de développer leurs réseaux et contacts.

MdF. Tanin Torabi et l’accueil d’artistes en exil 

SCh. L’artiste iranienne Tanin Torabi, chorégraphe, danseuse et réalisatrice de films de danse, est accueillie à travers le programme PAUSE (programme d’accueil en urgence des artistes et des scientifiques en exil) porté par le Collège de France. Il s’agit d’un accompagnement sur une année, qui vise à faciliter le déploiement de son activité artistique et son insertion professionnelle en France. Le programme comprend notamment une initiation à la langue française au sein d’Université Côte d’Azur et un parcours de formation adapté aux besoins de l’artiste (sur les démarches administratives et juridiques liées à l’activité artistique, le développement de réseaux professionnels..).

Tanin Torabi participe activement aux activités pédagogiques de la Villa Arson. Depuis la rentrée universitaire, elle anime en anglais un atelier de recherche sur le mouvement intitulé « Movement in Focus : A Playground ». Elle collabore aussi avec une enseignante dans le cadre de son cours de « Dessin et architecture », en tant qu’artiste invitée. Tanin Torabi a également réalisé d’autres projets, notamment une performance collaborative dans l’atelier dessin de la Villa Arson et prépare des interventions auprès des étudiants de Siences Po Menton et du master en Danse de l’université Côte d’Azur. 

MdF. Depuis combien de temps êtes-vous à la Villa Arson ?

SCh. J’ai pris mes fonctions en septembre 2019.

MdF. Comment s’organisent les projets internationaux ?

SCh. La dimension internationale est inscrite dans le parcours de formation des étudiants à la Villa Arson et traverse l’ensemble de nos activités.

Nous incitons fortement les étudiants à s’engager dans un projet international au cours de leur cursus, en particulier en 1ère année de master, sous la forme d’un stage de trois mois à l’étranger ou un semestre d’étude dans un établissement partenaire. Une quarantaine d’accords interuniversitaires ont été signés à travers le monde dont 25 en Europe pour permettre de réaliser ces mobilités.

De nombreux projets pédagogiques internationaux ont été menés au cours des dernières années, notamment à travers le réseau ECART (European Ceramic Art and Research Team) sur la céramique, en partenariat quatre écoles d’art en France, en Belgique, en Suisse, à Monaco et un lieu de production aux Pays Bas. La mise en place des résidences internationales nécessite une exploration des scènes artistiques étrangères, une réflexion sur le choix des partenaires, des discussions sur le modèle de résidence adapté au contexte dans lequel elles se déroulent, celui d’un lieu de formation, de recherche, d’exposition et de résidences. Il s’agit également de négocier des cofinancements, d’organiser les appels à candidatures et la sélection des artistes sur un projet spécifique. L’accueil et l’accompagnement des artistes durant leur séjour sont essentiels afin de permettre la réalisation de leur projet de recherche ou de création dans les meilleures conditions possibles. 

Ces activités sont menées en amont, durant la résidence et après le départ des artistes et impliquent un dialogue constant avec les partenaires étrangers, mais aussi un travail d’équipe avec les différents services de la Villa Arson. 

MdF. Votre parcours résolument tourné vers l’international 

SCh. Mon parcours est entièrement tourné vers l’international et la coopération culturelle et éducative. Avant de rejoindre la Villa Arson, j’ai travaillé à la direction internationale des ministères de l’éducation nationale, de l’enseignement supérieur et de la recherche à Paris et dans le réseau culturel français à l’étranger, où j’ai occupé plusieurs postes d’attachée culturelle aux Etats-Unis, en Australie et à Singapour. 

MdF. L’emplacement géographique de la Villa Arson : synergies transfrontalières potentielles 

SCh. Le contexte géographique est très porteur et nous jouons sur cette proximité avec l’Italie et les opportunités de coopération transfrontalière. 

Nous avons participé durant deux ans à un projet de coopération transfrontalière Alcotra avec la fondation Sandretto Re Rebaudengo en Italie, qui a permis la réalisation d’un parcours artistique dans la vallée de la Roya. 

En 2022, l’exposition « Le Futur derrière nous, l’art italien depuis les années 1990 : le contemporain face au passé » a été présentée à la Villa Arson sous le commissariat de Marco Scotoni, accompagnée d’un catalogue bilingue.

Depuis deux ans, nous accueillons de jeunes artistes italiens dans le cadre du programme de résidence « Nouveau Grand Tour» porté par l’Institut Culturel Italien de Paris.

Les 3 nouvelles résidences à la Villa Arson :

Découvrir l’ensemble des résidences : 

https://villa-arson.fr/actualites/category/residence

Les expositions en cours à la Villa Arson :

« Sweet days of discipline » par octopus notes 

Lukas meier

« the anoning » 

Jusqu’au 2 février 2025 

https://villa-arson.fr/programmation/expositions/sweet-days-of-discipline

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