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PhotoSaintGermain, 13ème édition : Interview Aurélia Marcadier, Directrice artistique 

Catherine DeLattre Shoppers Broadway Upper West Side NYC-1979-80 courtesy the artist, Abraham & Wolff

Nouveaux lieux (École Penninghen, Galerie Gallimard…), temps forts (Nuit du photojournalisme…), émergence (Beaux-Arts de Paris x École nationale supérieure de la photographie Arles), nouvelles expositions (Cnap x galerie du Crous, Saison de la Lituanie en France…), lancement du réseau LUX regroupant 21 festivals et foires de photographie en France, nombreuses productions, la 13ème édition de PhotoSaintGermain ouvre le champ des possibles ! Interview avec Aurélia Marcadier, directrice artistique et membre fondatrice du Réseau LUX qui nous dévoile les géographies et forces en présence. 

Galerie Eric Mouchet Christine Crozat & Bertrand Hugues

Marie de la Fresnaye. Avec quel état d’esprit envisagez-vous cette 13ème édition de PhotoSaintGermain ?

Aurélia Marcadier. Avec enthousiasme, nous avons hâte de vous dévoiler cette nouvelle édition ! Chaque édition est un nouveau challenge pour proposer au public, de plus en plus fidèle, une programmation autour de projets inédits. 

Quai de Solférino, Clara Prioux, sans titre fournil de la boulangerie Archibald 75005 Paris 2023

MdF. Quelles sont les nouveautés 2024 ?

AM. Nous avons 5 nouveaux lieux qui rejoignent le festival (8lithèque, l’école Penninghen, la Galerie Gallimard, la Librairie Alain Brieux, les Salons du Doyen de la Faculté de Pharmacie (Université Paris Cité) et 8 co-productions pour lesquelles nous nous sommes beaucoup investies ! 

Cette année, le festival s’enrichit aussi de nouveaux partenaires : la Fondation Louis Roederer, l’Académie des beaux‑arts, dont le soutien porte sur la production du projet Room Service à l’hôtel La Louisiane ; OGF, premier opérateur de services funéraires en France autour de la production de l’exposition Les Immortels à la Librairie Alain Brieux autour d’images de photographie post-mortem jamais encore dévoilées. 

A noter que le Journal SIMONE disponible gratuitement dans les lieux du quartier, revient cette année !

Centre Tchèque de Paris, Roman Franc, Ping Pong

MdF. Le nombre de coproductions augmente pour arriver à 8 cette année : quelles sont vos logiques de financement ? 

AM. Le financement intervient au cas par cas : soit je pars d’un projet que je propose à un lieu, soit le lieu nous contacte avec un projet. Nous construisons au fur et à mesure de vrais liens de confiance. 

Si l’on prend le Musée d’histoire de la médecine, le financement et le commissariat se font en interne à partir de leur fonds photographique. L’exposition se penche sur la figure engagée du Dr Bourneville autour de ses actions en faveur des enfants considérés comme aliénés et en marge de la société. Nous gérons toute la coordination et la production. 

Pour les Salons du Doyen de la Faculté de Pharmacie de Paris, nouveau lieu du festival, nous finançons la totalité du projet. L’exposition «  Années 1930 et modernité : l’âge d’or des revues médicales » a comme ambition de mettre en avant trois revues médicales emblématiques qui ne se focalisent pas sur la médecine mais abordent des sujets autour de l’art de vivre et de la culture en mettant en avant des grands noms de la photographie.

MdF. L’exposition « Situation de l’image » regroupe des oeuvres des étudiant.e.s-artistes des Beaux-Arts de Paris et de l’Ecole nationale supérieure de la photographies à Arles et met en avant le rôle de tremplin du festival

AM. Nous collaborons avec les Beaux-arts depuis plusieurs années et c’est la première fois que nous nouons un partenariat avec l’École nationale supérieure de la photographie. C’est Véronique Souben, la directrice de l’ENSP qui m’avait sollicitée l’année dernière pour imaginer un évènement pendant Paris Photo.

Nous avons proposé aux Beaux-arts une exposition que nous pourrions faire ensemble pour montrer les différentes spécificités de chaque école. Le public a une curiosité réelle pour la jeune création et de découvrir les lieux où se forment les artistes de demain, de plus nous évoluons dans un tissu très riche d’écoles. 

Dans ce sens de tremplin, l’école Penninghen fera aussi des portes ouvertes les premiers jours du festival. 

Il est important pour les jeunes artistes d’être repérés dans ces nombreux circuits. 

Hotel La Louisiane Salle Simone ©Antanas Sutkus Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir en Lituanie-1965

MdF. Le Cnap et la galerie du Crous 


AM. Il s’agit de la 2e collaboration avec le Cnap et nous nous réjouissons de la reconduction de ce partenariat.

Cette année avec Pascal Beausse avec qui j’assure le co-commissariat, nous avons choisi 3 photographes rassemblés autour du thème de la mémoire : Laura Ben Hayoun Stepanian, Michel Slomka et Lotfi Benyelles. Tous les trois sont d’anciens lauréats de la Bourse de photographie documentaire du Centre national des Arts plastiques.

En établissant un parallèle entre l’historiographie et la photographie, ces artistes enquêtent sur des moments et des lieux importants de l’histoire mondiale : le génocide arménien et ses traces aujourd’hui avec Laura Ben Hayoun Stepanian, les camps de concentration et leur mémoire encore ensevelie et réexaminée avec Michel Slomka, l’histoire des vies et formes d’une ville marquée par les processus de colonisation et de décolonisation avec Lotfi Benyelles.

MdF. La Saison de la Lituanie en France : les expositions 

AM. Nous avons deux projets dans le cadre de la Saison de la Lituanie en France. 

D’une part, une exposition visible à l’hôtel La Louisiane avec le photographe Antanas Sutkus dont le commissariat est assuré par Sonia Voss. Cette remarquable série revient sur l’été 1965, quand Jean-Paul Sartre et Simone de Beauvoir firent le voyage jusqu’en Lituanie et dont les emblématiques photos ont été prises dans les dunes de Nida. L’occasion de remettre en lumière la présence de Simone de Beauvoir jusqu’ici mis à l’écart dans l’imaginaire collectif.

Il est amusant de préciser que Jean-Paul Sartre s’installe à la Louisiane en 1943, hôtel connu pour sa tradition d’accueil des artistes depuis les années 1930.

La deuxième exposition présente Marilia Destot à la galerie Ségolène Brossette autour d’un voyage poétique et mémoriel vers ses origines juives lituaniennes.

MdF. Sonia Delaunay est mise à l’honneur par deux galeries 

C’est tout l’esprit de PhotoSaintGermain de faire dialoguer deux galeries : la peinture de Sonia Delaunay à la galerie Zlotowski et les archives photographiques  Roger Viollet qui dévoilent l’univers plus intime de la peintre à travers les artistes et les lieux qu’elle a côtoyés.

Hôtel La Louisiane Room 40 Shuwei Liu Tides, yes, breathing Collaboration curatoriale : Victoria Jonathan

MdF. Vous êtes curatrice de Room Service#3 à La Louisiane : pouvez-vous nous dévoiler les contours de l’exposition ?

Les chambres de l’hôtel appellent à explorer l’univers de l’intime.

C’est la 3e édition et cette année j’ai voulu orienter mon choix d’artistes autour des représentations du corps. Les 10 artistes sont répartis dans 9 chambres et la cafetéria. Le corps est abordé sous différents aspects. Citons Gil Lesage qui a documenté sa famille et son enfant Castiel qui à 16 ans a commencé une transition de genre. Un témoignage lumineux et fragile. 

Citons également la démarche Hélène Giannecchini & Félixe Kazi-Taniun artiste et une autrice qui se sont questionnés sur l’absence d’images de femme en train de manger dans une installation qui mêle photo et littérature. 

Le collectif Lusted Men revient au festival à l’occasion de la sortie du livre réunissant 5 années de collectionarchive vivante de photographies érotiques d’homme.

L’artiste Shuwei Liu aborde le corps comme paysage dans la tradition chinoise. 

Le corps comme territoire politique est convoqué par Marianne Marić à la suite d’une résidence à Sarajevo et l’histoire tragique de sa sœur Yéléna, mannequin à Paris. 

Librairie Alain Brieux Les Immortels A Bonnesoeur Sans titre vers-1890 Credits Hervé Bohnert

MdF. Vous êtes membre fondatrice du réseau LUX qui fédère foires et festivals de photographie en France et donne à voir à Paris les meilleures expositions : quels sont les enjeux du réseau et de l’exposition parisienne ?

AM. Il s’agit de mutualiser pratiques et expérience de coopération, d’entraide et d’éco-responsabilité et de donner de la visibilité à des artistes dans des logiques de coproduction. 

L’exposition « LUX #1 » regroupe pour la première fois des propositions (expositions, projections, …) de 21 festivals/foires dans un ancien tri postal du 9e arrondissement.  L’ensemble des organisateur·ices de foires et festivals français unissent leurs forces pour créer un évènement qui illustre leurs actions sur le territoire, preuve de la puissance du maillage de ces organisations en France. PhotoSaintGermain y expose le travail de l’artiste Pascal Amoyel. 

Infos pratiques :

PhotoSaintGermain 

13ème édition 

30 octobre-23 novembre 2024 

Agenda des lieux :

http://www.photosaintgermain.com

&

Réseau LUX #1

Ouverture au public

Du 6 novembre au 8 décembre 2024

Vernissage Jeudi 7 novembre 

Journée professionnelle vendredi 8 novembre

ANCIEN TRI POSTAL

30-32, rue Louise-Emilie de la Tour d’Auvergne

75009 Paris

https://reseau-lux.com