Affiche de l’exposition Faîtes vos jeux, Les Franciscaines d’après Raymond Cauchetier, La Baie des Anges Jacques Demy 1962 Cinémathèque Française
Si le destin de Deauville est intimement lié à son casino, qu’en est-il à l’heure des jeux en ligne sur smarphone de ces bâtiments au charme Belle Epoque suranné dont l’imaginaire puissant continue à agir ? Le joueur et ses addictions, ses typologies, ses rituels, incarné avec brio par les artistes, les écrivains, les cinéastes…
C’est tout l’enjeu de la captivante exposition proposée par les Franciscaines, « Faîtes vos jeux », portée par le visage lumineux de Jeanne Moreau dans le film La Baie des Anges de Jacques Demy, le casino devenant objet de luxure et de perdition. Comme une promesse inassouvie. De même avec un autre monument l’Année dernière à Marienbad d’Alain Resnais où l’hôtel casino d’une élégante ville des eaux devient une sorte de huis clos où l’hypothétique liaison se décide sur une partie de jeu.
Il faut dire que le hasard a toujours fasciné les artistes, à commencer par les surréalistes à l’origine du cadavre exquis. Marcel Duchamp et « l’Obligation de la roulette de Monte-Carlo » mise en vente à 500 francs, Man Ray et son film « Un coup de dés » d’après la citation de Mallarmé, Robert Filliou et sa combinaison absurde et aléatoire de 5000 dés, les happenings des Nouveaux-Réalistes jusqu’à la lecture plus contemporaine d’Evariste Richer « Avalanche II » où les lois du hasard ordonnées aux 6 nuances de gris d’une photo de ce phénomène naturel. Chez d’autres artistes comme Alighiero Boetti, François Morellet ou Aurélie Nemours, il s’agit de jouer avec des codes formés par les lettres ou les mots, des protocoles aléatoires ou géométriques ou des effets chromatiques.
Quant à l’esthétique même du casino elle est explorée par de nombreux photographes, la photographie n’étant pas admise dans ces cercles, tels que Martin Parr qui devient censeur du mauvais goût, Marie Laure de Decker série Las Vegas, Robert Frank.. L’artiste américain Robert Indiana y voit un effet miroir de la société.
Autre passionnante découverte : les cartes, roulettes, machines à sous, tables tric trac.. remontant à l’Egypte ancienne, la mode des jeux étant arrivée en Europe par Venise au XVIIème siècle. On se souvient de la passion de Marie-Antoinette pour les jeux et les sommes englouties par la noblesse.
Toute une partie de l’exposition est dédiée au joueur à partir d’une sélection de tableaux des grands maîtres du Nord entre Vanités et scènes d’auberges où dupeur et dupé se font face annonçant le caravagisme européen.
L’exposition qui rassemble plus de 200 œuvres a comme commissaire Sébastien Gökalp, historien de l’art. Sa scénographie a été confiée à l’incontournable Nathalie Crinière.
Catalogue Edition Imogene, prix 25 €
Préface de Philippe Augier, maire de Deauville Texte général de Sébastien Gokalp, commissaire de l’exposition Sur le cinéma, Thierry Grillet, ancien directeur des expositions et éditions de la Bnf Sur l’histoire des casinos, à Deauville pour Philippe Normand, directeur des affaires culturelles de Deauville et depuis Venise pour Thierry Depaulis, historien des jeux Sur l’art, approche philosophique par Sarah Troche, historienne de l’art, docteure, spécialiste du hasard dans l’art et sur Duchamp et le gain pour Didier Semin, historien de l’art Sur les jeux dans l’art contemporain par Michel Gautier, conservateur au Centre Pompidou.
Infos pratiques :
Faîtes vos jeux !
Jusqu’au 17 septembre
Tarifs : 11/8 € (abonnés)
Prochainement aux Franciscaines : Pierre Soulages
Les Franciscaines, centre culturel