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La carte blanche de Marco Costantini, Mudac, PLATEFORME 10 : le photographe suisse Olivier Christinat @9Lives-magazine

Les fleurs du mal, 2018 © Olivier Christinat

Je rencontre Marco Costantini, Directeur ajoint du Mudac, Musée cantonal de design et d’arts appliqués contemporains de Lausanne et commissaire d’exposition à l’occasion de l’exposition d’ouverture de PLATEFORME 10 qui regroupe trois institutions majeures : le Mudac, Photo Elysée et le MCBA, Musée cantonal des Beaux-arts. Il accepte ma proposition de carte blanche rédactionnelle, take-over, pour 9 Lives magazine, formule très appréciée lancée par Ericka Weidmann. J’ai plaisir à diffuser celle d’aujourd’hui, la dernière, qui me parle particulièrement. A l’occasion de la sortie du drenier ouvrage du photographe suisse Olivier Christinat chez Actes Sud,intitulé « Pas un jour sans une nuit », Marco Costantini a souhaité apporter un focus particulier à cet artiste dont il suit la carrière depuis plus de 25 ans.

Eté 202, le jury du prix Alfred Latour, réuni à Paris dans les locaux des Éditions Actes Sud, a décidé après délibérations et à l’unanimité de retenir le projet du photographe suisse Olivier Christinat, Pas un jour sans une nuit. Un an après, c’est donc l’ouvrage du même nom qui sort en librairie, édité par Actes Sud et accompagné d’un texte tout en finesse de Julie Enckell.

En parcourant les pages de l’ouvrage, je constate rapidement qu’il ne s’agit pas uniquement de la présentation d’une nouvelle série d’images. Au contraire, c’est ici une construction toute autre. Plusieurs séries se retrouvent associées comme pour démontrer que le travail d’Olivier Christinat suit depuis dix ans une quête inlassable et précise même si les vues animées de villes japonaises, de plages italiennes ou celles plus vide de toute présence humaine des forêts suisses semblent distinctes.

Ce sont probablement les pages illustrées de ses dessins, nouvelle pratique pour l’artiste, et de celles présentant des écrans gris qui, à y regarder de plus près, offrent l’entièreté de textes tels que la Divine Comédie, l’Énéide, Alice au pays des merveilles ou encore Les Fleurs du mal.

Entre les pages d’images et celles des dessins et textes littéraires, c’est une relation à la distance qui s’instaure. En effet, voilà bientôt dix ans qu’Olivier Christinat s’éloigne suffisamment de son sujet pour en réduire au maximum toute perspective. Les espaces se retrouvent alors similaires à celui de la page qui désormais témoignent de cet être au monde, bidimensionnels. C’est cette transformation purement optique que permet le zoom en ramenant à nous ce qui est loin et créant ce que l’on nomme l’effet bokeh.

À l’inverse, les textes présents dans l’ouvrage sont considérablement éloignés de nous, rendant quasi impossible leur lecture. Réduits désormais à une page-image, ces textes, qui ont tous en commun de présenter une vue du monde transformée, sublimée ou poétisée, opère ce que Julie Enckel décrit avec justesse dans sa propre analyse comme une convocation de tous les sens pour « faire image ».

Berlin, 2019 © Olivier Christinat

L’ouvrage d’Olivier Christinat devient alors au final autant un livre photographique que la partition de sa vision du monde, secouée dans la durée par des événements musicaux. L’éloignement et le cadrage permettent alors paradoxalement une condensation du monde afin de le rendre encore plus visible. Olivier Chrisitnat le dit lui-même dans l’ouvrage, il « entend » le visible.

Autre des cartes blanches de Marco Costantini qui mérite la lecture: la Fondation arabe pour l’image (FAI) de Beyrouth, ville-capitale qu’il visite régulièrement depuis 2018.

Il y a 25 ans, cette institution unique s’est donnée pour missions de collecte, d’étudier, d’exposer, et de conserver les projets liés à la photographie dans le monde arabe, entendu comme dénomination géographique. Elle a survécu aux terribles explosions du port de la ville en août 2020. Constituée de plus de 500 000 photographies et documents de 250 photographes amateurs et 700 photographes et studios professionnels. elle couvre actuellement les années 1860 à nos jours sur 50 pays.

Carte blanche à Marco Costantini : Fondation arabe pour l’image (FAI) de Beyrouth – 9 Lives Magazine (9lives-magazine.com)

Marco COSTANTINI (1970) est historien de l’art, commissaire d’exposition, et directeur adjoint au mudac, Musée cantonal de design et d’arts appliqués contemporains de Lausanne. Il y a notamment organisé Face au mur (2010), Nirvana (2015), Miroir Miroir (2017) et prochainement Beyrouth. Les temps du design (2023). Il a été auparavant chargé de mission auprès du Musée cantonal des Beaux-Arts de Lausanne pour différentes études concernant son déménagement du musée à PLATEFORME 10 et y a co-organisé l’exposition Incongru. Quand l’art fait rire (2011). Costantini a à son actif plusieurs autres expositions réalisées de manière indépendantes pour des espaces d’arts contemporains en Suisse et à l’étranger. Il est directeur de la revue Raddar, revue annuelle de design, première publication scientifique suisse consacrée à la recherche en design. Il a été Maître d’enseignement à l’Ecole de design et Haute école d’art du Valais (édhéa) où il a enseigné la théorie et l’esthétique de l’art contemporain, après avoir été assistant puis chargé de cours au département d’histoire de l’art de l’Université de Lausanne (2002-2008), ainsi qu’à l’Ecole polytechnique fédérale de Lausanne (2003 à 2007). Il est l’auteur de nombreux articles publiés dans des catalogues d’expositions et des ouvrages scientifiques traitant du design et de l’art contemporain au sens large.

https://www.olivierchristinat.com/
https://www.actes-sud.fr/catalogue/arts/pas-un-jour-sans-une-nuit

Actuellement au Mudac :

A Chair and You est la première grande exposition du mudac, faisant suite aux expositions inaugurales et occupant la globalité de son nouvel espace d’exposition au cœur de Plateforme 10.
Le mudac a le privilège de révéler pour la première fois au public la collection de Thierry Barbier-Mueller, une des plus grandes collections privées au monde de chaises d’artistes, de designers et d’architectes, dans une scénographie immersive signée Robert Wilson.
Exposition présentée jusqu’au 26 février 2023.

Infos pratiques :

MUDAC – Musée cantonal de design et d’arts appliqués contemporains
Plateforme 10
Pl. de la Gare 17
1003 Lausanne, Suisse
https://muda

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