Vitalie Taittinger D.R
Présidente du Frac Champagne-Ardenne depuis novembre 2017, Vitalie Taittinger a été élue à la tête de l’association Platform en novembre 2018, succédant à Bernard de Montferrand que nous avions rencontré. Créée en 2005, l’association Platform réunit les 23 fonds régionaux d’art contemporain français autour de trois objectifs : favoriser une réflexion collective sur les missions et les enjeux des Frac, constituer un centre de ressources et d’informations pour ses membres et ses partenaires et développer les échanges et les coopérations interrégionales et internationales grâce à des invitations de commissaires étrangers.
De plus Vitalie Taittinger à tout juste 40 ans prendra la tête de la Maison Taittinger à partir du 1er janvier 2020 dans le sillage de son père après avoir été directrice marketing et communication depuis 2015.
Une nouvelle page où l’art a toute sa place.
Elle a répondu à nos questions à l’occasion dans le prolongement du week-end des Frac, WEFRAC placé cette année sous le signe de l’ouverture à de nouveaux publics, chaque Frac invitant une personnalité de son choix, le plus souvent extérieure au monde de l’art contemporain à porter un regard sur une œuvre.
- Présidente de Platform depuis un an à présent, comment vivez-vous ce défi et selon quelles priorités ?
J’ai d’abord commencé par apprendre pour favoriser les échanges au niveau du réseau des Frac en lien avec leur mission de service public.
J’ai aussi découvert les rouages décisionnels d’un rôle d’intermédiaire et de nécessaire cohésion entre le Ministère de la Culture, les Régions et nos autres partenaires. Une discussion très riche et au cœur des enjeux du territoire. Un an d’apprentissage durant lequel nous avons essayé aussi d’articuler avec l’équipe de Platform et notamment Julie Binet, la secrétaire générale, un plan d’action qui permette de donner plus de visibilité aux Frac, d’aller vers un public le plus large possible et de s’inscrire en cohérence avec les axes de réflexion de nos tutelles. Si l’idée au départ était de décentraliser l’art contemporain, qu’est-ce que cela implique aujourd’hui ? Quel rôle les Frac ont-ils dans la société actuelle ?
2. Quelle était votre vision des Frac avant de vous engager auprès du Frac Champagne-
Ardenne et comment a t-elle évolué depuis ?
J’ai pu constater beaucoup de talents dans chacune de ces structures. Avant de connaitre les Frac mon premier rapport d’étonnement avec le Frac Champagne-Ardenne a été de voir à quel point cette structure était remarquablement organisée, comme un outil de pointe où
chaque ressource était parfaitement identifiée et utilisée. De plus en Champagne Ardenne je suis arrivée à un moment clé, ce rapprochement inédit et projet commun entre les 3 Frac du Grand Est (Alsace, Champagne-Ardenne et Lorraine). Une problématique
qui s’inscrit dans le prolongement du nouveau découpage des régions où l’on assiste à une
réorganisation des Frac entre eux avec une grande faculté d’innover et un désir d’être en phase avec les attentes de la société.
3. WEFRAC 2019 était placé sous le signe de l’ouverture à travers l’invitation à des personnalité choisies, souvent extérieures au monde de l’art contemporain, en quoi leur regard est-il essentiel sur la création d’aujourd’hui et les missions des Frac ?
Tout d’abord, pourquoi des personnalités ? Parce qu’elles sont suivies et prescriptrices auprès d’une large communauté, leur regard compte. Elles font figure de pont ou de portes entre la société et les Frac. Ce qui nous intéressait dans cette opération était d’amener des publics qui n’ont pas forcément l’habitude d’aller dans un Frac à aborder l’art contemporain autrement et leur offrir une expérience originale avec des exercices de médiation variés. C’est toute la richesse offerte par WE FRAC et ce voyage au sein des territoires le temps d’un week-end spécial.
4. Prochainement à la tête de la Maison Taittinger en quoi ces deux univers nourrissent-ils votre inspiration, valeurs au quotidien et se rejoignent ?
C’est une initiative qui reste très personnelle et qui n’est pas forcément liée à la Maison Taittinger. J’ai grandi au contact de l’art, ma grand-mère est artiste ainsi que d’autres membres de ma famille. Ce lien m’a toujours touché et le langage des artistes m’a toujours intéressé. J’ai souhaité suivre des études de dessin. J’ai toujours pensé que l’art est de première importance dans la société.
Au sein de Taittinger nous cultivons un projet qui m’intéresse parce que j’aime l’art, le projet Bouteilles Collections, des bouteilles confectionnées par des artistes qui ont tous marqué l’histoire de l’art par leur écriture. Si pour moi cela reste deux univers différents, une certaine porosité peut se faire car l’art me nourrissant constamment cela a forcément un impact sur ce que je suis.
5. Quelles rencontres ont-elles été décisives dans votre parcours et pourquoi ?
Il y en a eu plusieurs dont une décisive avec un ami de mon père, Gilles Bernard avec qui nous avons réalisé la première monographie sur le peintre surréaliste Alfred Courmes. Avec cet ami nous avons visités pas mal d’artistes dans leurs ateliers. Cette proximité avec la réalité des artistes au quotidien m’a fortement marquée et cette expérience à la sortie de mes études a été fondatrice.
Autres rencontres importantes à l’école d’art et de dessin Emile Cohl avec différents professeurs dont certains avec qui j’ai entretenu des liens plus privilégiés.
Et dans la vie en général des gens qui j’ai rencontré ou qui m’ont marqué comme ma grand-mère Corinne Deville, artiste qui n’a jamais voulu exposer ni parler de ses dessins mais qui avait un esprit à part et une liberté qui m’a façonnée en quelque sorte. D’autres influences seraient des écrivains ou des artistes du monde de la musique.
A quand remonte votre 1er choc esthétique ?
Ma relation vraiment intime avec la peinture remonte à mon arrière grand-mère Elisabeth de la Mauvinière. Elle dessinait beaucoup à la craie grasse et il s’en dégageait une odeur particulière dans son atelier. Quand on est petit on fait beaucoup les choses par mimétisme mais elle là c’était d’un autre ordre.
Les premiers chocs plus conscients sont sans doute Nicolas de Staël ou Edouard Vuillard.
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